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Les civils du Valenciennois dans la Grande Guerre 1914-1918

3 septembre 2016

Quand finira cette guerre.

 

     Voici extrait de la rubrique régionale de la Gazette des Ardennes du 16 janvier 1917, une description de la situation à Valenciennes. Lecteur, ne perdez pas de vue que le journal servait la propagande de l'occupant, mais suffisamment finement pour ne pas diffuser de fausses nouvelles, d'autant que la gazette était connue - sans y paraitre - en zone libre. Comme toujours, c'est une question de dosage..... le ton est parfois badin, même quand tombent les bombes d'avion.

 

GRV

    Valenciennes, l'Athènes du Nord, la ville artistique, un des plus beaux chefs-lieux d'arrondissement de la France, un des centres industriels important n'a pas connu comme beaucoup d'autres villes de la région de bombardements ni de fusillades.
    Au début de la mobilisation, il y avait une grande anxiété parmi la population.
    Quand il fallut partir, ce ne fut que pleurs. Pères, fils, gendres, cousins quittaient leurs familles, leurs enfants, leurs amis. Ils étaient gais et espéraient que la guerre - ce terrible fléau qui ne veut pas cesser - n'aurait pas lieu. Ils furent déçus et tous nous n'en doutons pas ont hâte que ce carnage prenne fin.
     C'est le 25 août que les Allemands firent leur entrée en ville. Il n'y avait plus de troupes, c'est ce qui explique qu'aucun combat n'eut lieu et que tous les édifices sont encore indemnes.
     L'ennemi installa ses services à l'Hôtel de ville et dans les principaux bâtiments de la ville.
     Naturellement, les débuts furent un peu froids entre occupés et occupant. Depuis lors, il y eut revirement. Les rapports entre civils et militaires sont à l'heure actuelle normaux et courtois. La population exécute sans récrimination les ordres émanant de la commandanture et nous pouvons dire que depuis plus de deux ans que l'ennemi est parmi nous aucun incident grave ne se produisit.

     De temps en temps, quelques aéroplanes alliés viennent jeter des bombes. Ils n'ont jamais atteint de buts militaires. Par contre plusieurs civils furent tués ou blessés (Anzin, Blanc-Misseron). Les noms de ces malheureuses victimes ont été publiés dans des précédents numéros par la "Gazette des Ardennes"
     Certains commerçants qui, au début de la guerre et par suite du manque de moyens de locomotion, avaient leurs magasins remplis de denrées alimentaires ont gagné de l'or en profitant de la calamité publique, pour vendre leurs produits à des prix exorbitants.
     Les malheureux durent et doivent encore actuellement se passer des denrées de première nécessité.
     Il y a longtemps qu'il n'y a plus de beurre en ville. Les oeufs et le lait se vendent à des prix dont les cultivateurs n'auront pas à se plaindre de trop. Ils ont dû mettre de l'argent "à gauche".
     Heureusement que le Comité hispano-américain a ravitaillé les populations envahies. Chaque semaine les ménagères se rendent à l'ancien bâtiment du Crédit Lyonnais chercher leurs provisions.
     Lard, café, sucre, lait condensé, riz, céréaline, etc. telles sont les principales marchandises mises en vente et à un prix abordable.
     Dans la nuit du 14 au 15 avril [1915], un vol important était commis au Crédit Lyonnais. La caisse de la boucherie municipale, qui ne fonctionna que pendant quelques mois, disparut. Elle renfermait environ 26.000 francs [quelques 72.000€]. la police ouvrit une enquête et ses investigations amenèrent l'arrestation du caissier Paul Bourdon. Malgré ses dénégations, ce dernier a comparu devant le tribunal correctionnel qui le condamna à deux ans de prison et 5.000 francs d'amende.[hélas authentique]
     M. Tauchon, maire, remplace M. Camdès,sous-préfet, qui abandonna son poste. [sic, en réalité Cauwès, voir]
     Parmi les décès signalons ceux de M. le comte Theillier de Poncheville, ancien député, ancien bâtonnier de l'ordre des avocats, conseiller municipal ; de M. Billet, capitaine au 127e, fils du second adjoint, de Mme Damien, épouse du premier adjoint, etc.
     L'hiver est arrivé. L'administration municipale a fait distribuer du charbon aux malheureux qui n'ont plus de chaussures et s'éclairent avec du "saindoux". Et chaque soir au coin du feu, ces déshérités de la nature pensent à leur mari ou à leur fils, se demandent tout bas et le coeur navré de douleur :
Quand finira cette guerre !
 
     On remarquera que rien n'est la faute de l'envahisseur, qui fait au mieux et avec lequel les Valenciennois s'entendent : on y est bien forcé quand les réquisitions - de matelas de laine, de poignées de porte en cuivre, etc. - sont assorties d'amendes et/ou de prison en cas de non-respect.

Avis 19170410

Je veux croire que les officiers n'étaient pas dupes quand on les saluait, c'était contraint et non par amabilité. La vie n'est pas facile, mais finalement avec un peu d'aide des neutres, (effectivement et pas de la part des autorités en France libre, c'est ce qu'il faut comprendre) tout s'arrange, et - lisant toujours entre les lignes- les déshérités pensent à leurs fils ou maris : c'est donc sur les femmes et les personnes âgées que le sort s'acharne, la faute étant rejetée sur ceux qui s'enrichissent (commerçants, cultivateurs .....)
 
    Rien n'est tout à fait faux dans cette courte description, dont on peut quand même se demander à quoi elle sert : ni les Valenciennois, ni les autres lecteurs, logés à la même enseigne ne seront dupes.
 
     Comme pour les cloches (qui seront aussi réquisitionnées) qui n'en entend qu'une n'entend qu'un son : Jules Thiroux, secrétaire général honoraire de la mairie de Valenciennes, raconte des épisodes de la période d'occupation et termine avec la

Situation de Valenciennes à la fin de l'occupation

 que je retranscris fidèlement, renvoyant par un lien (quand c'est possible) à un sujet que j'ai traité dans ce blog :

Dans quel état se trouvait la population et la ville de Valenciennes en Octobre-Novembre 1918 ?

La population ?
Au point de vue des vivres :
Plus de viande.
Plus de beurre.
Plus de lait.
Plus de volailles.
Plus d'oeufs.
Plus de pommes de terre.
Plus d'huile.
Plus de fruits.
Plus de bière, de vin, d'alcool.
Rien que le ravitaillement américain, composé surtout de pain, en quantité insuffisante.
Aux autres points de vue ?
Plus de vêtements, ceux en service étant usés jusqu'à la trame.
Plus de chaussures, On utilisait en cachette des morceaux de courroie, de selle et de giberne pour le ressemelage.
Plus de linge, tout ayant été réquisitionné chez les commerçants et souvent volé chez des particuliers.
Plus de matelas de laine. Elle était remplacée par des copeaux de bois.
Plus d'ustensile en cuivre ou en nickel.
Plus de papier.
Quant au point de vue des immeubles ?
Dans aucune des guerres précédentes — et le nord de la France en subit quelques-unes dans les siècles antérieurs — on n'avait assisté à pareille destruction systématique et sauvage de toute une région. Valenciennes était saccagée comme toutes les autres villes du front, Douai, Cambrai, moins certes que Lens, Arras, Bapaume qui avaient été plus longtemps sur la ligne de feu. Son coeur au moins restait intact, comme le dit le Président Poincaré, lorsqu'il lui rendit visite le 10 novembre 1918, mais :
409 maisons étaient complètement détruites.
4165 détruites partiellement.
Presque tous les immeubles particuliers vidés par les rapts.
1 groupe scolaire incendié (Saint-Vaast-là-Haut).
1 autre détruit par les obus (Faubourg-de-Paris).
L'école de la rue Capron transformée en prison, l'ancien Lycée en caserne, le Lycée Henri-Wallon et le Lycée de Jeunes Filles en hôpitaux et dévastés avant le départ de l'ennemi.
L'église du Sacré-Coeur au Faubourg de Paris et celle de l'avenue Dampierre aux trois quarts détruites, les autres gravement endommagées.
Les écluses, les ponts, la gare, détruits.
Les grandes usines des faubourgs, Escaut et Meuse, Forges et Aciéries de Trith-le-Poirier, rasées.
Voilà les conséquences de l'occupation d'une ville située en arrière du front, qui en resta éloignée de près de cinquante kilomètres durant cinquante mois, et ne fut exposée au bombardement que quinze jours.

 

 

 

 

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23 août 2016

Victimes de leurs compatriotes

 Mise à jour du 19/09/2016

    J'emploie a dessein pour le titre le terme de la Gazette des Ardennes pour sa rubrique quasi-quotidienne :

VDLC

     Il n'est pas possible de citer tous les noms parus, mais je relève ici ceux qui traitent du valenciennois.

 

     Publication du 20 août 1916 :

A BLANC-MISSERON (Nord)

Le 12 août 1916

 

  • LAMOTTE Henri, 35 ans, tué.

  • MARISSAL Victor, 59 ans, tué.

  • DUÉE Gilbert, 13 ans, tué.

  • DUÉE Paul, 10 ans tué.

  • DUÉE Auguste, 48 ans, blessé.

  • DUÉE Marcel, 7 ans ½ , blessé.

  • GENIN François, 40 ans ½ , blessé.

  • La femme FREMERY-GAUCHER Zelia, 55 ans, blessée.

  • NAVEAU Octave, 43 ans, blessé.

  • MORY Nestor, 51 ans, blessé.

  • STORDEUR Victor, 25 ans, blessé.
     

 

     Blanc-Misseron n'est pas une commune, c'est un quartier bien connu car lieu d'implantation de nombreuses industries, dont ferroviaires, à cheval sur Crespin et Quièvrechain, deux communes voisines limitrophes de la Belgique. Le nom viendrait d'un misseron (moineau en patois) blanc comme neige, dont Charles Deulin raconte l'histoire dans les Contes d'un buveur de bière, à lire sur Gallica. (Remarque : La source St Landelin n'est pas loin ;o) )

 


(cliquer pour accéder au site et à la suite de l'histoire)

 

     Le bois d'Amblise existe toujours, il a donné son nom à une aire de l'autoroute A2 qui le coupe, le chemin d'Amblise est à l'ouest de Crespin sur cet assemblage de plans du cadastre, le long de la frontière entre Crespin et Quarouble 3e commune qui est aussi limitrophe de Quiévrechain, la Belgique est à l'Est.

B-M

     La rue "Entre deux bois" est l'ancien chemin de Quarouble (à Crespin). Ces rues permettent, à partir des actes de décès, de localiser le lieu du drame. Je n'ai pu retrouver que 3 des 4 actes :

 

  • LAMOTTE Henri, né à Holain (Aisne) le 15/05/1881, décédé à Crespin au lieu-dit "Entre deux bois",

  • MARISSAL Victor, né à Quarouble le 20/04/1857, décédé à Quarouble au lieu-dit Amblise,

  • DUÉE Paul, né à Crespin le 8/08/1906, domicilié chemin d'Emblise à Quiévrechain y décédé :"tué par une bombe lancée par un aéroplane".

    Les heures de décés de ces 3 actes coïncident : 14h et 15h. Bien que l'acte de Paul Duée comporte une rature ("Gilb") je n'ai pas trouvé l'acte de Gilbert Duée : Paul avait un frère de ce prénom, né à Quarouble le 11/08/1903.

 

A noter qu'à Blanc-Misseron (Quiévrechain), la fonderie Ruelle, transformé en fabrique de munitions sera le théâtre d'une explosion le 1er juin 1918. Voir sur ce blog : Explosion à Quièvrechain

 


 

     Publication du 5 octobre 1916, des blessés à Anzin : la gazette pousse le souci du détail en citant pour chaque victime les membres de sa famille proche qui sont au front, ou prisonniers.

A ANZIN (Nord)

Le 2 Août 1916

  • LENNE Eugène, 19 ans, grièvement blessé. (Son père, Lenne Eugène, 43 ans, est soldat au 127e régimenet d'infanterie ; un oncle, Moriamoz [sic mais plus probablement Moriamez] Henri, est prisonnier de guerre ; un deuxième oncle, Moriamoz (sic) Léon est soldat au 127e régiment d'infanterie.)

  • LEGRAND Georges, 19 ans, grièvement blessé. (Son frère, Legrand Alfred, 28 ans, est soldat au 127e régiment d'infanterie.)

  • La femme PREAT Désirée, 57 ans, grièvement blessée. (Son fils, Preat Léon, 27 ans, est soldat au 40e régiment d'artillerie.)

  • CARLIN Noël, 55 ans, grièvement blessé. (A deux fils et un gendre dans l'armée française : Carlin François, 25 ans, Carlin Noël, 24 ans, tous deux soldats au 1er régiment d'infanterie, en garnison à Commercy ; son gendre Duchesne, 24 ans, est soldat au 127e régiment d'infanterie.)
  • DERBANNE Alexandre, 14 ans, grièvement blessé. (A un frère, Derbanne Henri, 22ans, soldat au 43e régiment d'infanterie ; un oncle, Godeau Clémence; 40 ans,soldat au 127e régiment d'infanterie et prisonnier de guerre.)

  • MARCHAND Gaston, 14 ans, légèrement blessé. (un de ses frères, Marchand Julien, 25 ans, est dans une colonne du train ; un deuxième frère, Marchand Emile, 19 ans ½ , est prisonnier civil ; un troisième frère, Marchand Henri, est soldat au 127e régiment d'infanterie ; son beau frère, Marianny Emile, 33 ans, est soldat au 91e régiment d'infanterie, en garnison à Mézières ; son oncle, Leuleu Félicien, 40 ans, soldat au 327e régiment d'infanterie, apparemment prisonnier de guerre au camp de Friedrichsfeld.)
  • TOMBA Hocine, 15 ans, légèrement blessé.
  • AVORTE Jules, 13 ans, légèrement blessé. (A un oncle qui est soldat dans un régiment d'infanterie en garnison à Nancy.)

     Les renseignements, qui, vu certaines imprécisions, semblent avoir été donné par les familles, mettent en évidence - pour nous qui les lisons 100 ans plus tard - l'implication des familles dans la guerre, et reposent la question de l'information dans les territoires occupés, question à laquelle répond très partiellement la Gazette des Ardennes, (notamment avec les listes de prisonniers), même si le but est multiple dans un journal émis par l'occupant.

 Voir le sujet sur la Gazette des Ardennes dans ce blog.

     La cause exacte n'est pas indiquée, mais Anzin étant situé loin du front, il est plus que probable que ce soit un bombardement aérien.

 


A SAINT-AMAND-LES-EAUX (Nord)

le 17 octobre 1916

 

  • QUESNOY Louis, 68 ans, tué. (Il avait un gendre, M. Flour, soldat dans l'armée française.)

  • HOUZÉ Émile, 33 ans, tué. (Il avait un frère soldat dans l'armée française.)

  • BRUON Edouard, 39 ans tué.

  • VERGIN Pierre, 50 ans, tué.

  • La femme VERGIN-MARCHAND Pauline, 42 ans, légèrement blessée.

  • La femme CHALANT-EDOUARD, 49 ans, légèrement blessée.

  • Veuve LEMAIRE-DHOTE Louise, 47 ans, légèrement blessée.

 

Les actes de décès à St-Amand donnent peu d'information

  • QUENOY Louis Arthur, né le 26/12/1848 à Bruille-lez-Saint-Amand, décédé en sa demeure 17 rue Gambetta.
  • HOUZÉ Émile Edouard, né le 03/08/1883 à St-Amand, décédé en sa demeure, Croix du Petit-Dieu, 37.
  • BRUON Édouard, né le 20/04/1877 à Ethe, province du Luxembourg (Belgique), décédé en sa demeure, 36 rue du Bruille.
  • VERGIN Pierre, né le 07/01/1867 à St-Amand, décédé en sa demeure, Croix du petit-Dieu, 37.

     Les lieux de décès (leurs domiciles, assez éloignés les uns des autres) ne permettent pas de déterminer un endroit pour ce qui a fort probablement été un bombardement aérien. Il faut souligner que la tenue de l'état civil était surveillée par l'occupant : au début de tels actes de décès étaient plus détaillés, puis beaucoup moins, ne nous laissant guère d'indice (de trace ?). Il faut parfois comprendre entre les lignes, quand, à Valenciennes par exemple, il est indiqué que l'acte est dressé sur ordre de la Commandanture, pour deviner qu'il s'agit d'un fusillé.

QUENOY, HOUZÉ et VERGIN figurent au monument aux morts de St-Aland : voir sur ce blog.

     A noter que la Croix du Petit-Dieu désignait un quartier où se trouve la placette éponyme du quartier du Moulin des Loups, à l'angle de la rue Roger-Salengro et du chemin de l'Empire. Là se trouvait comme à l'époque une grande croix, devant laquelle passaient les condamnés avant d'être emmenés au Mont du Gibet, situé au sud, un peu au-dessus de la rue de la Cense-au-bois. Voir une des gravures de l'album de Croy .

 


A VALENCIENNES

Dans la Gazette du 20 mai 1917 : bombardement du 2 mai 1917 : voir sur ce blog  suivre les années  pour 1918


 

 

Cette page est susceptible d'apports en fonction des parutions de la gazette.

 

 

 

19 août 2016

Autour d'une affiche à Valenciennes

 entete

     Ainsi commence l'article de la "gazette régionale" de la Gazette des Ardennes. Voici l'affiche en question :

Valenciennes 19160630 c
Théâtre Municipal de Valenciennes
Samedi 1er juillet 1916
Spectacle du théâtre municipal d'opérettes de Leipzig
Direction: Joseph Gross

"Cher Augustin"

Operette en 3 actes de Rudolf Bernauer et Ernst Welisch
Musique de Léon Fall

 

 L'article continue ainsi :

Un rassemblement ne tarde pas à se former. Des hommes et des femmes sont arrêtés devant la dite affiche à laquelle ils ne comprennent qu'une chose : c'est qu'il y aura une représentation au théâtre de Valenciennes, le samedi 1er juillet 1916 et qu'on y jouera une opérette.

Les conversations vont leur train :

- " Si ce n'est pas honteux de faire du théâtre en temps de guerre !" dit une pâle jeune fille d'une vingtaine d'années.

- "Oui, à l'heure même ou se font tuer nos maris, nos fils, nos enfants !" ajoute une femme .

- "A eux aussi, on tue des hommes et ils pourraient bien se dispenser, il me semble, de donner en spectacle des pièces à rire, quand il y a tant à pleurer pour tout le monde !" conclut un monsieur âgé.

Son observation tombe comme une sentence et tous de l'approuver du geste et de la parole .
Ils ne savent donc pas qu'à Paris, qu'à Marseille, qu'à Bordeaux, que dans toutes les grandes villes de France enfin, les cafés-concerts, les bals y sont ouverts, et qu'on y joue, et qu'on y chante et qu'on y danse ?

Ils ignorent que nos soldats prisonniers en Allemagne, ont installé des théâtres dans les camps, fondés des musiques et des chorales, et qu'ils s'amusent, eux aussi, à jouer, à chanter et à danser pour tuer le temps ?
Ou serait-ce qu'ils raisonneraient de parti-pris, avec la Haine plus aveugle encore que l'Amour ?
L'ignorance ou le parti-pris de cette foule à laquelle nous sommes mêlés nous fait pitié et résolument, nous prenons à coeur de lui apprendre, de lui ouvrir les yeux à une plus juste réalité, à un jugement meilleur. Nous lui disons tout cela, à ce troupeau de Panurge dont les "Mauvais Bergers" exploitent la naïveté et la bonne foi, depuis près d'un demi-siècle, dans les journaux, dans les livres, dans les conversations, dans tout et partout ... jusque dans l'histoire.

Et ces hommes et ces femmes qui nous écoutent, bouche bée, les yeux écarquillés de l'étonnement qu'ils ont d'apprendre ce qu'ils ne savaient pas, et le monsieur âgé semble dépité quand, à notre tour nous laissons tomber cette sentence :

"En septembre 1812, les Français parvenaient à établir un théâtre à Moscou, échappé à l'incendie, et l'on y jouait la comédie avec des acteurs français et italiens qui furent payés pour six mois, cela afin de faire croire aux Russes que nous étions disposés à passer l'hiver dans cette ville."

Ce que les Allemands font en 1916, nous l'avons fait il y a un peu plus de cent ans, et si vous en doutez, c'est écrit en toutes lettres, dans les "Mémoires du sergent Bourgogne" mort adjudant de place le 15 avril 1867, ici même, dans la bonne et franque ville de Valenciennes

Vous le voyez, rien n'est nouveau sous le soleil ...

      Je ne commenterai ni le ton ni cet article, ne sachant si le rédacteur était sur place, ni même s'il s'est exprimé, ce dont je doute fortement ..... "Das ist Propaganda".

     Il cite Adrien Jean-Baptiste François Bourgogne, né le 12 novembre 1785 à Condé-sur-l'Escaut, décédé le 14 avril 1867 à Valenciennes et inhumé avec son épouse au cimetière St-Roch :

stele B

Militaire français des guerres de l'Empire, célèbre pour ses mémoires sur la campagne de Russie. Le livre est disponible sur Gallica, en voici le passage cité :

 MSB

 

    L'auteur - pour amadouer le lecteur ? - fait également allusion au chroniqueur Jehan Froissart, né à Valenciennes vers 1337, qui disait :

Si aucun quiert qui je suis, je m'appelle Jehan Froissart, natif de la bonne et franke Valenciennes.

     La pièce, créée en 1912 fut bien entendu jouée comme beaucoup d'autres ; en voici un extrait : "Lass dir Zeit" (Prenez votre temps), chanté par Franz Fehringer vers 1950

 

 

13 août 2016

Civils victimes accidentelles d'engins de guerre

 

Le 20 avril 1916, vers huit heures du matin, quatre enfants du Chemin-Vert ont trouvé un petit obus perdu et se sont amusés à vouloir le défoncer avec un marteau.
Tout à coup cet engin fit explosion et les quatre enfants furent tués.
Aussitôt les officiers et les soldats qui logent dans la commune se sont rendus sur le lieu de l'accident, et c'est les larmes aux yeux qu'ils constatèrent la fin tragique de ces pauvres innocents.
Les obsèques eurent lieu le 21 à trois heures du soir, au milieu d'une nombreuse assistance.
Dans le cortège et en tête on a remarqué la présence d'un très grand nombre d'officiers et de soldats porteurs de gerbes et de couronnes.
La municipalité d'Aulnoy y assistait également.
Pendant l'office, M. le Curé a remercié les autorités militaires et civiles des marques de condoléances qu'elles témoignaient aux familles de ces malheureuse victimes.
A la sortie du cimetière, MM. les officiers se sont rendus chez Mme NEUS, mère de deux victimes, et en termes émus ils adressèrent à cette pauvre femme affolée de douces paroles de consolation et la part de douleur qu'ils prenaient pour la perte cruelle qu'elle venait d'éprouver.
La présence et l'esprit humanitaire des officiers et des soldats furent très commentés dans la commune.

     Cet article parait le 15 mai 1916 dans la rubrique "LA GAZETTE RÉGIONALE" du numéro 191 de la Gazette des Ardennes. Le ton de certains passages de l'article est très largement dû au fait que cette publication est éditée par l'occupant.

    Il n'en reste pas moins que le fait est avéré, il s'agit de :

  • DOOM Estelle Diane Sidonie, 6 ans, née à Hamme (Flandre-Orientale, Belgique) le 17/03/1910.
  • DOOM Maurice Camille, 7 ans et demi, né à Hamme (Flandre-Orientale, Belgique) le 06/08/1908.
  • NEUS Henri, 10 ans et demi, né à Hamme (Flandre-Orientale, Belgique) le 24/12/1905.
  • NEUS Pierre César, 2 ans et demi, né à Aulnoy le 30/09/1913. (Son acte de décès le fait naitre à Hamme, mais son acte de naissance a été rédigé à Aulnoy)

dont les noms figurent au monument aux morts d'Aulnoy :

noms

MaM

 

(A noter que le nom de Jean JAURES est également inscrit sur le monument)

       Le journaliste - qui insiste beaucoup sur la présence des militaires allemands - ne donne aucun détail sur ce "petit obus perdu". Gageons que s'il s'était agit d'un obus français ou anglais, voire une bombe d'avion, il n'aurait pas manqué de le signaler, ajoutant ainsi des noms à la longue liste des "Victimes de leurs compatriotes" qui paraissait dans presque toutes les Gazette des Ardennes.

      Le plus petit calibre d'obus utilisé (des deux cotés) était 37mm, et le calibre allemand le plus courant 7,7cm. Que faisait-il là où les enfants l'ont trouvé ... ?????? Peut-être l'obus était-il sur sa douille en laiton et ont-ils voulu récupérer celle-ci, ou la ceinture de cuivre.....

 


 

     On trouve quelque temps après la relation d'un accident du même type à Berseaucout (hameau de Pertain, Somme). Ce sont les enfants de la famille Alliot qui en ont été les victimes le 3 août 1916 :

Berseaucourt-Pertain 80

deux noms figurent parmi les victimes civiles du monument aux morts de Pertain : André et Fernand ALLIOT

80 Pertain mam
Photo :Stéphane Protois

 

Puis à Bruxelles, décidément malgré la guerre qui les entourait, l'attrait du danger est le plus fort :

Brux
VANNITSEN Joséphine Henriette

 

En juin 1917, c'est à Montmédy que le drame, toujours relaté par la Gazette des Ardennes, arrive :

Montmedy 1917-364
MIGNION Georges

 

 L'Est Républicain du 24/12/1918 signale de pareils accidents à Famars, Curgies, Saint-Amand-les-Eaux, Marly et Vieux-Condé :

Victimes
Paul BOURSE (St Amand les Eaux)
Jules MERIAUX (Marly)

 

Le 7 juin c'est à Lille qu'un accident semblable se produit :

1918-484 Lille
Gazette des Ardennes du 4 aout 1918, VAN HECKE Charles-Louis

Une fois de plus la Gazette des Ardennes, du 21 juillet 1918, relate :

1918-473 Valenciennes

     FERTIN Gaston Léon Emile était né à Valenciennes le 30 octobre 1908, de FERTIN Léon Joseph Jules et de DELATTRE Louise Léonie Agnès.

 
Il y en eut certainement bien d'autres  !

100 ans après ce genre d'accident arrive hélas encore dans nos régions ; n'oublions pas la règle :


"La munition n'a ni amis ni ennemis, elle ne connaît que des victimes"

 

Ces imprudences ne s'arrêtaient pas aux zones de front ou occupées :

1918-316 grenade à Toulon
Mai 1918 Charles JAUME

 

1918-384 obus à Pte-Synthe
Juin 1918, Albert BOHN

 

GdA 1918-599
Gazette des Ardennes du 25 septembre 1918, Marius LAIR

 

    La fin des hostilités va augmenter les risques, l'occupant  n'assurant pas le déminage ni le nettoyage, qui va incomber aux alliés :

Lille

 

Le 20 juillet 1919, le Bulletin de Meurthe et Moselle signale un accident par éclatement de grenade à SORNEVILLE : Jeanne BOTTELIN, 10 ans. (Son nom figure au monument aux morts de Sornéville).

Bulletin M&M 19190720

 

Le 12 avril 1927, Le Grand Echo du Nord relate une nouvelle tragédie, à Cuinchy cette fois :

GENF 19270412

 

 

3 août 2016

La Gazette des Ardennes : listes des camps de prisonniers et autres informations.

 

    Quand on tente d'imaginer la vie en territoire occupé, par exemple pour ceux du Valenciennois durant les 1531 jours de l'occupation, on se demande ce qu'ils savaient de ce qui se passait de l'autre coté de la ligne de front, et comment ils le savaient : il ne faut pas perdre de vue que l'habitant lambda ne pouvait que subir l'occupation sans correspondance avec la zone libre, et donc sans nouvelle des proches évacués, réfugiés, ni des parents et amis prisonniers de guerre. Ce n'est que lorsque les prisonniers ont pu envoyer des cartes qu'ils ont pu -parfois- faire passer avec leurs nouvelles un peu d'information (voir sur un autre de mes blogs le cas de mon grand-père maternel). Cependant toute communication concernant la zone libre par le biais de prisonniers de guerre était proscrite et censurée.

 

     Il y a bien eu en mai 1916 une procédure de "Correspondance avec les départements envahis" mise en place par le ministère de l'intérieur. Elle ne s'adressait qu'aux réfugiés de ces départements qui devaient se procurer auprès des autorités une carte, où ils rédigeaient un message de 20 mots. Une fois traduite en allemand et transmise par le biais de la Croix-Rouge suisse installée à Francfort-sur-le-Main aux autorités d'occupation qui ont semble-t-il toléré ce procédé qu'ils ne reconnaissaient pas officiellement, la carte, arrivée auprès des destinataires (s'il n'avaient pas changé de domicile), permettait une réponse -en allemand- et suivait le chemin inverse pour finalement (re-traduite) être adressée à l'expéditeur après un certain temps ... parfois 6 mois. Ont été autorisés à profiter de cette correspondance les militaires ayant de la famille en zone occupée.

 

    C'est donc le biais de nouvelles des proches que l'occupant a choisi pour délivrer un peu d'information en créant des listes de noms de prisonniers, puis de soldats évacués en Suisse etc. Cette parution était un argument d'achat de la Gazette des Ardennes, même si celle-ci restait un organe de propagande. D'autre part la question des prisonniers était un sujet sensible, l'Allemagne, qui n'avait pas apprécié que des soldats allemands capturés soient internés dans nos colonies d'Afrique, fera pression en prenant des otages civils qu'elle ira jusqu'à interner en Lithuanie, mais veut montrer par ces listes le soin apporté aux Français qu'elle détient. Par la même occasion un rédacteur français publiera des articles pacifistes et critiquant l'Angleterre.

    Bien entendu la Gazette sera la cible des critiques, comme celle d'Eugène Thébaut qui parait en 1918 dans la "Revue des Deux Mondes" sous le nom de "Gazette infâme" : à lire sur gallica.fr :

 


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    Le premier numéro de la Gazette parait le 1er Novembre 1914, édité à Rethel, distribué gratuitement et diffusant les communiqués, puis à Charleville à compter du 15 Mars 1915 ; la dernière Gazette portant le n° 773 parait le 8 novembre 1918. Il y aura jusqu'à 6 numéros par semaine, sur 4 puis 6 colonnes, une feuille recto-verso, davantage lorsque de longues listes de noms, puis les pages de réclames apparaissent.

Bandeau

L'intégralité des exemplaires est disponible sur le site de l'Université de Heidelberg, une partie seulement des 3042 pages numérisées permet la recherche en mode texte, la qualité des documents ne permettant de toutes façons pas une reconnaissance fiable des caractères, surtout des noms propres.

 

521 listes de noms de prisonniers répartis par camp seront publiées irrégulièrement à partir du 2 avril 1915 ; la dernière -évoquant une suivante- le sera le 25/10/1918. Chacune donne une estimation du nombre de noms qu'elle contient (de 100 à 6700), dénombrement probablement évalué "à la colonne" mais dont le total (réel ?) est signalé fréquemment.

L'en tête de la dernière liste est ainsi rédigée :

Le total des noms publiés jusqu'aujourd'hui se monte à environ 406.450
Le total des prisonniers français se trouvant en captivité en Allemagne jusqu'au 10 juillet 1918 se monte à environ 475.000, dont environ 40.000 ont été échangés.
    J'ai traité sur ce même blog des Listes de Soldats Français Inhumés derrière le Front Allemand qui paraîtront à partir du 24 mai 1916.

    Un premier relevé a été effectué ici par Jérôme du Forum "Pages 1418", qui a permis de connaître les camps apparaissant dans chacune des 521 listes : à la relecture on relève 204 lieux de détention pour 1758 citations de camps. Si les informations provenaient de l'occupant, elles étaient rédigées en France, pour que le journal ne souffre pas de ces fautes de français (surtout de construction des phrases) qui faisait sourire les lecteurs des affiches placardées quasi quotidiennement (voir Les Affiches sur ce blog) ; de ce fait les noms de lieu peuvent inversement souffrir de coquilles que n'aurait pas faites un parfait germanophone.

Un exemple : deux versions de ce qui pourrait bien être un même camp apparaissant dans les listes 11 et 20 :

  Altdamm A   Altdamm B  

    Or ce que l'on connaît actuellement des camps n'en signale qu'un seul à ce nom noté ALTDAMM ou -aux Bayerisches Hauptstaatsarchiv- "Gefangenen-Lager Alt-Damm bei Stettin". S'il s'agit du même, la ville est maintenant Dąbie en Pologne, 150km à l'est de Szczecin, ce qui nous éloigne (beaucoup) de la mention Bayern notamment.

 

      Il faudrait pour s'en convaincre étudier -via le site de la Croix-Rouge- les prisonniers cités : un premier essai a permis de trouver 4 fiches dont deux seulement mentionnent un camp pour ce prisonnier interné en Suisse le 1/12/1916 venant de Cottbus, mais qui avait séjourné à Döberitz venant de Halle (il avait été blessé et capturé le 20/09/1914 près de Vic sur Aisne -à Autrèches précise le registre du CICR- et fut rapatrié, probablement pour être soigné, le 27/02/1918)

Buckenmeyer Aloys
Aloys BUCKENMEYER de Belfort, soldat au 35e RI

    

     Une carte des camps est parue dans la Gazette le 4/06/1915, à cette page ; si elle n'est pas fausse elle est difficilement lisible, on imagine les proches l'examinant à la loupe pour situer un prisonnier. On pourra s'aider de celle-ci, plus lisible,

carte gallica
parue dans Gallica.

 

    Voici d'abord les dates de parutions de ces listes, puis pour chaque camp les listes où il apparaît. A chaque fois, un lien dirige vers la page correspondante de la Gazette :

  • Lien direct pour les listes par numéro ,

  • Liens vers chaque camp... Pour certains, la liste s'étend parfois sur 2 à 3 pages, le lien pointe toujours sur la première.


Merci de me signaler toute erreur ou omission, hors coquille d'origine.

         Viendront ensuite les listes de :

  • Prisonniers blessés évacués en Suisse (avec mention des blessures),
  • Soldats français décédés derrière la ligne de front,
  • Ceux décédés en Allemagne, (dans les hôpitaux des camps)
  • Personnes décédées en territoire occupé,
  • Victimes civiles résultant de bombardements (artillerie ou aviation) et qualifiées de "victimes de leurs compatriotes",
  • La transcription de "Nécrologies Françaises" (tirées de journaux parisiens),
  • Prisonniers Français faits par les Bulgares,
  • ou spéciales, comme celles donnant
    • des nouvelles de PG Ardennais au camp de Friedrichsfeld,
    • la liste des victimes de la catastrophe des 18-Ponts à Lille le 11/01/1916,
    • les morts de Gallipoli,
    • les noms des évacués vers les Ardennes.

     Comme on le constate, aucune n'est particulièrement réjouissante, le manque d'information (en temps réel) depuis la zone libre vers les territoires occupés accentue le sentiment d'abandon, favorisant ainsi le recours à la propagande allemande.

     A noter qu'une "copie" française de la Gazette des Ardennes Illustrée portant le n°12 et datée du 1er mars 1916 sera lancée par avion, mais je n'en connais pas le contenu ; elle différait de l'officielle par la présentation qui venait juste de changer avec le n°11.

GDAI 10

GDAI 11

La première page du "vrai" n°12 étant celle-ci :

GDAI 12
source : bm-lille

    Il y aura également une copie de la Gazette ordinaire portant le n°154 du 12 mars 1916, peut-être suivie d'autres, c'est du moins ce que dit la Gazette officielle ........

 

La liste n°125  (par ex.) du 17 mars 1916 commence ainsi :

     Les sentiments humanitaires dont s'inspire la publication, dans la "Gazette des Ardennes", des noms des 815.000 prisonniers français actuellement internés en Allemagne, n'ont pas été appréciés par tous avec la même équité. Que nous importe ! Nos lecteurs ne pensent pas de même qu'on le fait dans certaines rédactions sur les boulevards parisiens. Nous ne laisserons pas troubler l'intime contentement que nous éprouvons d'avoir pu contribuer à calmer les inquiétudes de milliers de familles françaises, portant un rayon de joie dans les foyers laissés dans la plus douloureuse incertitude par le gouvernement français, en leur annonçant la bonne nouvelle que leur fils était sain et sauf, se retrouvant en captivité allemande aussi heureux que le permettent les circonstances.

        La présentation déroulante ci-dessous ne permettant pas le référencement des noms de camps, la liste complète de ceux-ci est répétée plus bas. 

 

La dernière Gazette


 

Liste n°     
 Date de parution   Nombre
de noms

 

 

 
Camp 
 Listes N°       

 


 

Liste des camps cités dans la gazette des Ardennes (voir ci-dessus).

 

Aachen Guetersloh I/Westf. Nürnberg
Altdamm I/Bayern Hagen I/Westf. Offenbach A/Main
Altdamm I/Brdbrg. Halbe (Brandenburg) Offenburg I/Baden
Altengrabow I/Brdbrg. Halberstadt Ohrdruf I/Th.
Amberg I/Bayern Halle A/Saale Osnabrueck
Andernach Hamburg Paderborn
Augsburg Hameln A/Weser Parchim I/Mecklenburg
Bad-Orb Hammelburg I/Bayern Passau
Bautzen I/Schl. Hanau Pforzheim
Bayreuth Hannover Pirmasens
Benediktbeuern I/Bayern Hannoversch-Muenden Plassenburg (Post Kulmbach)
Berger-Damm Heidelberg Plassenburg B/Kulmbach I/Bayern
Berlin Heidelberg (Officiers) Preussisch Holland
Bernaud /OBB Heilbronn Puccheim I/Bayern
Bernburg /Anhalt Heilsberg Quedlinburg
Bielefeld I/West Heuberg B/Konstanz Rastatt
Bischofswerda I/S. Hofgeismar Regensburg
Bischofswerda I/S. (Officiers) Hohenasperg I/Wtmrg Reisen I/Posen
Brandenburg an der Havel Homburg (Pfalz) Rosenberg-Kronach I/Bayern
Burg B/Magdeburg (officiers) Ingolstadt Rostock
Burg bei Magdeburg Iserlohn I/Westf. Saarbruecken
Cassel-Niederzwehren Kaiserslautern Saarburg I/Lothr.
Celle I/H. Karlsruhe Saarlouis
Chemnitz Karlsruhe (Annexe) Saint-Ingbert (Pfalz)
Clausthal I/Harz Kempten Salzwedel
Coblenz Koenigsbrueck I/S. Sangerhausen
Colmar I/E. Koenigstein Scheuen/Celle (Hann.)
Cöln A/Rh. Konstanz Schleissheim I/Bayern
Cottbus I/Brandenbrg. Lagensalza I/Th. Schwäbisch Gmuend
Crefeld Landau (Pfalz) Senne I/Westf.
Crefeld (officiers) Landsberg A/Lech Sennelager I/Westf.
Crossen A/Oder Landshut I/Bayern Siegen I/Westf.
Cuestrin Langensalza Skalmierschuetz
Darmstadt Laufen (Oberbayern) Soltau (Hannover)
Diedenhofen Lechfeld Speyer
Dillingen I/Bayern Limburg A/Lahn St.-Avold
Doeberitz Lindau A/Bod. Stargard I/Pomm.
Duelmen Lippspringe Stendal
Duesseldorf Lippstadt Stettin
Duisburg Ludwigsburg-Eglosheim Stralsund
Duss I/Lothringen Ludwigshafen A/Rh. Strasburg I/Elsass
Dyrotz Luebeck Stuttgart
Ebenberg-Landau I/Bayern Luswigsburg I/Wbg. Tauberbischofsheim
Edewecht (Oldenburg) Magdeburg Torgau
Eichstaett I/Bayern Magdeburg (officiers) Trier
Erfurt Mainingen Tuchel
Erlangen Mainz Tuebingen
Festung Koenigstein Mainz (Officiers) Ulm
Festung Torgau (officiers) Mannheim Verden (Hannover)
Festung Wesel Mergentheim Verden A.D.Aller
Forbach I/L Merseburg Villingen I/Baden
Frankfurt A/M. Meschede I/Westf. Wahmbeck
Frankfurt A/O Metz Wahn/Rheinland
Freiburg I/Breisgau Metz (St Clemens) Weilburg A.D. Lahn
Freising Minden I/Westf. Weingarten I/Wurttbg.
Friedberg (Hessen) Muelhausen I/E Werl I/Westf.
Friedrichsfeld B/Wesel Muelheim A.D. Ruhr Wesel
Fuerstenfeldbruck I/Bayern Muenchen I/B. Wetzlar
Galgenberg/Wuerzburg Muenden (Hannover) Wetzlar (Annexe)
Gardelegen I/Brdbrg. Muensingen I/Wuertbrg. Wiesa (Erzgerb.)
Germersheim I/Bayern Muenster I/Westf. Wittenberg
Giessen Mülhausen I/E. Worms
Goettingen Munster Wuelzburg B/Weissenburg I/B.
Golzern A/Mulde Münster Wuerzburg
Grafenwoehr I/Bayern Munster-Hannover Zerbst (Anhalt)
Grosskarolinenfeld Neuburg A/D Zossen
Guben Neunkirchen (Saar) Zweibruecken I/Bayern
Guestrow I/M. Niederzwehren B/Cassel Zwickau I/Sachsen

 


Listes de blessés rapatriés.

 

     Le 4 juin 1915, le n°56 de la Gazette publie une première liste de soldats blessés rapatriés. Il s'agit en même temps de montrer que l'occupant est beaucoup moins inhumain qu'on ne le dit. Ce sont de grands blessés, rapatriés par voie d'échange, et, selon la Gazette, déjà rentrés en France -via la Suisse- au moment où les listes sont publiées.


Voir ci-dessous l'en-tête de la première liste, puis de la 5e, qui font aussi œuvre de propagande.

enteteblesses

enteteblesses5

57 listes seront publiées tout au long de la guerre (en fonction des échanges ?). Comme toujours, la qualité de la typographie interdit toute reconnaissance optique de caractères, et tout dénombrement (sans certitude aucune de l'exhaustivité de ces listes). Près de 10.000 soldats sont ainsi nommés.

    Un point intéressant est que le type de blessure est signalé, (sauf vers la fin), ce qui constitue un renseignement de plus pour les chercheurs.

 

      Date de parution

 Liste 

 

Les autres listes se trouvent ICI

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15 juillet 2016

Réfugiés en Côte-d'Or

      La Ville de Dijon a publié en 4 tomes le Mémorial Administratif de la Guerre, rendant compte de l'activité de l'administration municipale tout au long des 4 années de guerre. Dès le début apparaissent des articles relatifs aux évacués, émigrés, prisonniers civils, déportés et rapatriés, qui traversent la ville. Les soldats prisonniers ne sont pas oubliés, et même si c'est plus particulièrement aux civils et notamment ceux de ma région que ce blog est dédié, il n'est décemment pas possible d'omettre aucun de ces convois, d'autant que les conditions de vie, de déportation et de détention sont les mêmes.

     Il faut également apprécier dès le début de la guerre une situation commune à tous les lieux accueillant dans l'urgence un surplus de population, l'exemple de Dijon se trouvant malheureusement être encore d'actualité.

     Je ne fais que rapporter les convois signalés, et non les œuvres de secours à ceux-ci, actives du début à la fin.

Les premières personnes déplacées apparaissent dès le mois d'août 1914 :

Émigrés et évacués. — Au début même de la guerre, la ville devint naturellement, par sa position géographique, le premier refuge des populations évacuées des villes frontières par autorité militaire ou administrative, auxquelles s'ajoutaient quelques émigrés volontaires provenant des régions plus ou moins directement menacées par l'ennemi. Ce mouvement prit immédiatement une importance qui devait attirer l'attention de l'administration municipale à la fois pour éviter l'encombrement de la ville et pour procurer à ces victimes de la guerre les premiers secours indispensables, sans obérer trop gravement les finances communales.

     Aussi, le 4 août, le maire demande-t-il instamment au gouverneur de faire acheminer par la gare au-delà de Dijon les évacués, sans les autoriser à séjourner en ville : ayant à nourrir une population nécessiteuse considérable, il ne peut se charger d'une population flottante de plusieurs milliers d'individus. Mais ces malheureux passagers ne furent pas cependant abandonnés, et peu à peu des instructions de l'autorité supérieure réglèrent, théoriquement, leur sort et leur condition. C'est ainsi que, sur une demande du 21 août, le préfet avisait le maire que le logement et la nourriture des évacués étaient à la charge de l'Etat, qui y pourvoyait par voie de réquisition, si toutefois il s'agissait d'individus ayant un titre régulier, et qu'il existait à la préfecture une commission spéciale destinée à assurer ce service.

      N'oublions pas que les villes de l'arrière voient arriver rapidement un flux important de blessés, notamment Dijon - place forte dans la zone des armées- qui était un important centre d'évacuation, les grands immeubles (lycées, séminaire) étaient déjà réquisitionnés.

En septembre la situation empire, d'autant que l'avance allemande ne parait pas contenue :

Émigrés et évacués. — Le mouvement qui avait attiré à Dijon de nombreux émigrés volontaires ou amené des évacués des régions, occupées ou menacées par l'ennemi ne se ralentissait pas et il ne tarda pas à causer au Gouverneur de la Place et au Maire, responsables de l'approvisionnement et par conséquent de la résistance éventuelle du camp retranché, les plus vives préoccupations. La marche des Allemands semblait se précipiter vers le sud-est et Dijon pouvait être l'un des objectifs de leur état-major. Le Général Gouverneur se plaignit donc vivement de l'hospitalisation à domicile d'évacués et d'émigrés, qui réussissaient ainsi à se soustraire à l'obligation de suivre les convois qui les devaient, à heures fixes, acheminer vers d'autres destinations. Mais la Mairie dut décliner toute responsabilité dans ces pratiques qui, s'inspirant d'un sentiment légitime de compassion, étaient pour ce motif recommandées par la Commission départementale d'évacuation des places fortes.

Les émigrés et les évacués continuèrent donc à affluer, remplissant les hôtels, les garnis et les appartements inoccupés, épuisant les approvisionnements difficiles à renouveler en raison de la pénurie des transports, constituant une menace très sérieuse pour le maintien de l'hygiène publique dans une ville surpeuplée et par ailleurs encombrée de blessés ; le Maire, inquiet, obligé d'ailleurs de suivre les instructions précises et formelles de son Journal de ravitaillement, et le Général Gouverneur, non moins persuadé de la nécessité de mettre un frein à cette immigration excessive, tombèrent d'accord (lettres du 6 septembre) pour faire paraître, du 10 au 12 septembre, un avis invitant les émigrés à quitter la ville :

Depuis quelque temps, la ville de Dijon a reçu un nombre considérable d'évacués et d'émigrés des villes frontières. Beaucoup de ces évacués et émigrés se sont fixés dans notre ville.

Notre population s'est ainsi accrue dans des proportions inquiétantes au point de vue de l'hygiène et de la santé publiques. On peut craindre aussi, en ce moment où les transports sont arrêtés ou du moins très irréguliers, de graves difficultés pour le ravitaillement de la population sédentaire pour laquelle il paraît prudent de réserver nos approvisionnements.
     Cet avis fit grand bruit, et le Maire se justifia par des chiffres, arguant qu'en sa qualité de place forte Dijon (78.000 ha) n'aurait jamais dû recevoir d'élément étranger :
...depuis la déclaration de guerre, plus de 100.000 hommes de troupe sont passés à Dijon ; que nous avons en ce moment une garnison de près de 15.000 hommes cantonnés à Dijon et dans la banlieue ; que nous allons en recevoir d'autres ;

[Que] nous avons reçu et recevons encore tous les évacués de l'Est par mesure administrative ; que nous avons eu jusqu'à 3.000 blessés à demeure, et 1.000 à 2.000 passant journellement, qu'on panse, ravitaille et dirige vers l'intérieur ;

[Que] nous avons reçu également, à un certain moment, jusqu'à 30.000 émigrés venant de tous pays, même de ceux non menacés ;

     Enfin, peu à peu, un grand nombre d'étrangers quittèrent la ville. Tous d'ailleurs n'avaient pas des ressources personnelles leur assurant une certaine indépendance. Pour ceux des évacués qui étaient plus ou moins réduits à la misère, on sait qu'il était pourvu à leur logement et à leur nourriture par voie de réquisition.

 

En octobre 1914 l'afflux exige des mesures, et notamment des précautions :

Émigres et évacués. — La question des émigrés et des évacués, qui avait motivé en août et en septembre de justes alarmes de la part du Gouverneur et du Maire, responsables du ravitaillement de la Place, reçut au cours du mois d'octobre, une solution catégorique et d'ailleurs conforme aux mesures déjà prises par l'Administration municipale.

« Prière prendre mesures et notamment donner instructions aux commissaires militaires des gares, pour que les réfugiés et évacués ne soient pas acheminés sur les places fortes d'où ils seraient expulsés. »

« Il m'est signalé que des réfugiés sont actuellement dans des régions où leur présence constitue une difficulté sérieuse au point de vue ravitaillement et un danger au point de vue de la sécurité de l'armée. En vous plaçant à ce double point de vue, examinez de concert avec autorités militaires locales opportunité évacuation de ces réfugiés sur zone intérieure et adressez-moi, s'il y a lieu, proposition d'urgence. Indiquez-moi nombre et signalez spécialement suspects, vous ferai connaître points sur lesquels ils doivent être dirigés. »

réfugiés belges
Réfugiés Belges à Dijon. Aquarelle Lt. Cel Guillaume Cullard.
(Bib. Mun. Dijon)



Janvier 1915
LES RÉFUGIÉS BELGES ET FRANÇAIS

Le gouvernement vient de prendre les décisions suivantes relatives aux allocations de secours aux réfugiés.

Il a été établi que certains de ceux-ci, jouissant de ces allocations, repoussaient systématiquement toutes les offres d'emploi rémunéré qui leur étaient présentées, préférant vivre médiocrement, mais ne rien faire. Ceux qui seront signalés dans ce cas à
l'Administration se verront incontinent supprimer toute espèce d'allocation officielle.

D'autre part, les jeunes Belges de 18 à 30 ans sont invités à s'engager dans leur armée nationale. Toute allocation sera également supprimée aux hommes de cette catégorie qui refuseront de s'engager.

Seuls continueront à toucher l'allocation ceux qui, tout en ayant égard aux observations du premier paragraphe, s'étant présentés pour contracter un engagement, seront déclarés inaptes au service. Une pièce du bureau de recrutement sera donc désormais nécessaire pour toucher l'allocation.

     La situation finit par s'éclaircir et devenir quasi-"normale", probablement avec la stabilisation du front. C'est alors que vont arriver les réfugiés, d'abord de ceux que l'occupant a préalablement déportés. Ainsi en mars 1915 :
Émigrés, évacués et réfugiés. — On sait comment, par un abus de force s'ajoutant à tous les autres, les Allemands avaient imaginé de déporter nombre d'otages et de malheureux, qu'ils avaient arraché de leur pays envahi pour les envoyer en Allemagne comme prisonniers civils, à qui un traitement barbare était réservé. Peu à peu cependant, ils se décidèrent à relâcher quelques-uns de ces malheureux et à les renvoyer dans leur patrie.
Le 12 mars, on put lire bien en vue dans les journaux de la ville l'appel suivant :

APPEL URGENT

       Un convoi de mille prisonniers civils retour de captivité dans les camps de concentration allemands doit arriver incessamment à Dijon.
Il faut, lorsqu'ils arriveront dans notre ville, que nous puissions parer autant que possible à leur pitoyable dénuement. Il faut qu'après avoir tant souffert de la faim, du froid et des mauvais traitements, ils trouvent ici réconfort moral et matériel.
(......)
De toute urgence, il faut être prêt à donner à nos compatriotes libérés des camps de concentration : vêtements, nourriture et aussi quelques espèces.

Des femmes et des enfants font partie du groupe qui est attendu. Donc, vêtements d'hommes, vêtements de femmes, vêtements d'enfants, linge de corps, chaussures, espèces, etc., etc., seront reçus dans ce but déterminé et avec reconnaissance.

 Apparait également en mars dans le mémorial dijonnais le terme de prisonnier civil :

POUR LES PRISONNIERS CIVILS L'appel des comités réunis de nos œuvres dijonnaises a été entendu. Nos compatriotes ont été profondément émus à la lecture du rapport officiel des atrocités qu'ont subies nos malheureux compatriotes dans les camps de concentration.

Avec un empressement qui n'a d'égal que la profonde pitié qu'ils ont ressentie, ils sont venus en foule apporter aux sièges des différents comités des offrandes de toute sorte.

Tout sera mis en œuvre pour bien accueillir ces malheureux rapatriés, les gâter si possible, les réconforter et leur donner la douce impression qu'ils sont enfin, après tant de vicissitudes, rentrés dans leur patrie, notre France bien-aimée, et qu'ils passent en Bourgogne
(.....)
Parmi ces malheureux, le dénuement est grand, et la ville de Dijon se prépare à leur faire oublier leurs longues souffrances par son bon accueil et l'offre de tout ce qui leur sera nécessaire et même d'un peu de superflu.
Un premier convoi arriva le jeudi 8 avril ; les journaux du lendemain en firent le récit :

LES ÉVACUÉS DU NORD A DIJON

     Un premier convoi de réfugiés civils, retour d'Allemagne, est arrivé hier matin, à 9 h. 20, en notre gare. Sur le quai, une nombreuse assistance attendait le train spécial annoncé de Thonon.
(......)
     Ce fut une vision émouvante que celle du train entrant en gare ; car, de toutes les portières, partaient des cris de: « Vive la France ! » cependant que des mains enfantines agitaient tout le long du convoi de petits drapeaux tricolores. Avec l'aide empressée des personnes présentes, le débarquement eut lieu en quelques minutes : très peu d'hommes — une quarantaine environ — dans ce contingent de cinq cents évacués ; des femmes de tout âge, et surtout des enfants, parmi lesquels beaucoup de bébés portés par leurs mères. Des dames charitables se firent aussitôt un devoir de soulager les mamans un peu trop chargées, et le long cortège, enfin formé, se dirigea, par la rue Mariotte, vers les locaux du grand séminaire. Cortège bien fait pour inspirer de la pitié aux curieux qui se pressaient en grand nombre sur les trottoirs.

     Toutes ces victimes de la guerre sont des gens du peuple, des femmes dont les maris ont été mobilisés, de vieux ouvriers sans travail, — et nous en dirons tout à l'heure la raison, — bref des familles entières de « nécessiteux » pour employer le style administratif. Ils sont originaires de la région de Valenciennes et de Douai, et ils y étaient encore il y a quatre semaines. Raismes, Saint-Amand, Hasnon, Evin-Malmaison, Montigny-en-Ostrevent, Lens, Hénin-Liétard, telles sont les localités dont les noms reviennent le plus souvent dans les réponses que nous font les «évacués». Car ce ne sont point des « prisonniers civils » de la catégorie de ceux dont il fut question récemment dans les rapports officiels. Pour n'avoir pas, connu l'horreur des camps de concentration, ces infortunés n'en sont pas moins dignes de notre profonde sympathie. Ils ont été arrachés à leurs tristes foyers, et si les Allemands nous les renvoient, par la Belgique et la Suisse, c'est qu'ils ont décidé de ne plus pourvoir à leur existence.

On le voit, il s'agissait bien de civils rapatriés, via la Belgique et la Suisse, ceux de la longue liste des bouches inutiles désignées par l'occupant.
     Une brave lemme d'Evin-Malmaison nous renseigne sur ce point avec une particulière précision. Les Allemands, quelques jours à peine après leur installation dans ce pays, ont voulu imposer la consommation de leur affreux pain noir. Comme les enfants tombaient malades, les ménagères voulurent mettre à profit quelques réserves de blé ignorées de l'ennemi. Le soir, en cachette, ce blé était moulu... dans les moulins à café. Malheureusement, la fraude est trop vite découverte, et, un matin, les patrouilles font une rafle générale des précieux ustensiles. Le pain noir indigeste, si cruel à l'estomac des pauvres gosses, devient la seule ressource de nos gens. Ajoutons que le lait se fait de plus en plus rare : en février, il n'y a plus que vaches dans tout le pays, alors qu'il y en avait 300 à la veille de la guerre. Et bientôt commence le rationnement du pain noir : de 250 grammes par jour et par personne, on tombe à 200, puis à 150.
     Le 11 mars, à 9 heures du soir, les « familles nécessiteuses », c'est-à-dire celles où il y a le plus d'enfants, sont avisées qu'elles auront à se tenir prêtes pour un départ qui aura lieu le lendemain matin. A l'heure dite, les malheureux se réunissent devant la mairie, ayant fait un paquet de leurs pauvres liardes. Il y a là des vieillards, hommes et femmes de ans, qui ne veulent pas se séparer de leur fille. aux jupes de laquelle s'accroche la marmaille, et qui porte le dernier né, un poupon de dix mois. Quatre sœurs, dont les maris sont sur le front, emmènent à elles seules dix-huit petiots et n'ont qu'une angoisse au cœur, celle d'être un jour séparées. A la gare prochaine, le convoi s'entasse dans des wagons à bestiaux, et le train part pour Peruwelz, en Belgique, où doit se faire la concentration des évacués. Après un séjour de trois semaines dans cette ville. où la population elle-même si éprouvée fait de son mieux pour venir en aide à nos compatriotes, ceux-ci sont retirés du local où on les a casernés, et les voilà de nouveau embarqués pour un voyage à travers l'Allemagne, jusqu'au lac de Constance, — Aix-la-Chapelle, Cologne, Lindau. Il arrive à nos « voyageurs » de rester 36 heures sans recevoir aucune nourriture, et le stationnement dans les gares, avec défense d'en sortir, dure parfois une journée.
On comprend la joie immense que les évacués devaient éprouver quelques heures plus tard, à Schaffouse, puis à Zurich, lorsqu'ils purent apprécier le chaleureux accueil de la Suisse hospitalière et charitable.

Trajet Val-Dij
De Valenciennes à Dijon : près de 1600km.
(Rappelons que la ligne de front était infranchissable)

 
    Nous n'avons pu recueillir que fort peu de renseignements sur la situation militaire dans les pays d'origine de nos évacués. Les Allemands, comme bien on pense, veillent à ce qu'aucun de leurs secrets ne vienne à la connaissance de la population civile. En tout cas, ils se montrent beaucoup moins arrogants, nous a-t-on dit, qu'aux premiers jours de l'occupation. En ce qui concerne leurs déprédations, quelques ouvriers de Raismes nous ont raconté que les machines-outils des usines de construction avaient été toutes enlevées et envoyées en Allemagne. Le chômage est complet. Ajoutons que nos compatriotes, malgré les dures privations qui leur furent infligées, n'ont jamais perdu leur foi dans une délivrance prochaine. Les grondements ininterrompus de la canonnade voisine ranimaient leur courage.
     Quelques mots, pour finir, sur la réception et les bons soins dont les évacués du Nord ont été l'objet au grand séminaire. D'abord, visite médicale, ensuite fut servi un repas dont nos lecteurs apprécieront le menu confortable : potage, bouchées à la reine, — lesquelles avaient été généreusement offertes par M. Emile Parizot, du buffet de la gare, — navarin aux pommes, entrecôtes rôties, fromage et dessert, le tout arrosé d'un «ordinaire » excellent suivi d'un verre de bon vin.
Dans l'après-midi eut lieu la répartition des convois à diriger sur les arrondissements de Beaune, de Semur et de Châtillon. Nul doute que les victimes civiles de la guerre ne soient accueillies par nos compatriotes et voisins comme elles le furent à Dijon.

Le mardi 13 avril, nouveau convoi, dont parlent les journaux du 14 :
LES ÉVACUÉS
Hier matin, un nouveau convoi d'évacués est arrivé à Dijon, venant d'Evian. Quatre cents personnes environ, en grande majorité des femmes et des enfants, originaires des régions de Longwy, Etain, Fresnes-en-Woevre, Mars-la-Tour. Des familles nécessiteuses constituaient le principal contingent. Mais on y voyait aussi, à la différence du précédent convoi, quelques personnes d'une condition aisée et qui auraient bien voulu ne pas quitter leur pays, ayant encore le moyen de payer leur subsistance, y compris le pain réglementaire et obligatoire des Allemands. Pourquoi cette impitoyable expulsion ? Les personnes interrogées l'attribuent au manque d'approvisionnements en farine et en viande. Obligation leur avait été faite depuis longtemps déjà de changer leur or pour des billets. Cet ordre leur fut renouvelé, la veille du départ, lequel eut lieu vendredi dernier.
     Les évacués quittèrent donc leurs villages des pays de Meuse et de Moselle, se demandant ce qu'il adviendrait, non pas de leurs maisons, — car le sort des habitations ne laisse aucun doute en ces régions où la canonnade fait rage, — mais surtout des objets de valeur, literie, linge, meubles, fatalement abandonnés aux convoitises de l'ennemi.
C'est à Metz que la concentration s'opéra, et, le surlendemain, les évacués arrivaient à Schaffhouse.
Le Comité dijonnais des réfugiés a donné, une fois de plus, la preuve d'un dévouement qui mérite les plus grands éloges. Le jour où l'on établira le bilan des initiatives généreuses dont notre ville a donné l'exemple, pendant la guerre, une mention toute spéciale sera due aux bons citoyens qui ont accepté cette tâche particulièrement laborieuse et délicate.
Après quelques heures de repos dans les locaux du grand séminaire, où les attendait un dîner confortable, les évacués, au nombre de 250, ont repris le chemin de la gare, pour être dirigés sur l'arrondissement de Semur. Les autres partiront ce matin pour Châtillon-sur-Seine.
Enfin, le vendredi 23 avril arrivait un dernier convoi ; les journaux du lendemain donnèrent brièvement le récit de sa réception :
LES PRISONNIERS CIVILS
Hier vendredi, dans l'après-midi, 240 prisonniers sont arrivés en gare de Dijon, venant d'Allemagne. Le train, qui devait arriver à Dijon à 11 h. 21, est arrivé à Dijon à 2 h. 15, c'est-à-dire avec trois heures de retard.

La plupart des évacués sont originaires des Ardennes, de la Meuse, de l'Aisne et principalement de la Marne.
Sous la surveillance vigilante des commissaires des divers comités, les voyageurs se rendirent dans les locaux aménagés à leur intention au grand séminaire, rue Docteur-Maret, où un copieux déjeuner leur fut servi, et des vètements furent mis à leur disposition, grâce à de généreux donateurs.
Pendant le trajet d'Annemasse à Dijon, les réfugiés se sont arrêtés 21 heures à Thonon, et 251 sont descendus à Beaune, où la meilleure hospitalité leur a été offerte.
Dans la soirée, 125 prisonniers [civils] sont partis pour Semur, et 115 partiront demain pour Châtillon.
 

 

Emigrés, évacués et réfugiés. — Plus heureux a certains égards que les militaires prisonniers, les « prisonniers civils » étaient partiellement et peu à peu rapatriés d'Allemagne.[Ce fut hélas un voeu pieu, les déportations continuèrent, et les rapatriement -partiels- aussi] Nous avons compté en avril plusieurs de ces convois. Ils continuèrent en mai. Le 8 mai, le Maire était avisé par le Préfet qu'un train d'environ 260 rapatriés d'Allemagne devait partir de Thonon le dimanche 9 et arriver à Dijon le lundi 10 mai, a 11 heures 20. Effectivement, le 11 mai, on put lire dans les journaux le récit de cette arrivée :
LES ÉVACUÉS
Encore un convoi, qui n'est sans doute pas le dernier.... Il se composait de 315 personnes, vieillards, femmes et enfants, originaires de Lille.
(......)
C'est le 21 avril que ces braves gens ont quitté Lille sur l'ordre des Allemands. Après un internement qui ne dura pas moins de quinze jours à Saint-Amand-les-Eaux, ils furent dirigés sur Schaffhouse.
Un déjeuner réconfortant attendait les évacués dans la vaste galerie du grand séminaire. Rendons un sincère hommage à l'excellent personnel chargé de ce service. Il est admirable de voir la sollicitude, la gentillesse et l'empressement dont font preuve. en cette circonstance, tels serveurs professionnels, auxiliaires attitrés de nos banquets les plus somptueux, et qui, pour ces convives infortunés, se montrent doublement attentifs et prévenants.
Les évacués s'installent ensuite par petits groupes amicaux dans la grande cour ombragée, et bientôt les cris joyeux des enfants complètent cette poignante impression de paix reposante et de tranquillité familiale. Impression troublante, en effet, si l'on songe à toutes les misères qui se sont abattues sur tous ces malheureux et que subissent encore ceux qui restèrent là-bas. Mais voici que des enfants font le cercle autour d'un petit garçon d'une dizaine d'années qui leur montre des cartes postales. Ce sont des souvenirs de Lausanne, distribués aux « internés qui passent par cette ville. Au bas d'une belle image, — en vue du lac de Genève, — nous lisons cette légende : « Le foyer est détruit, la famille dispersée pour un peu de temps, mais la grande famille française est là pour vous accueillir. Patience et courage ! Relevez la tête et que votre force d'âme continue à soutenir ceux qui préparent la victoire ! Vive la France ! »
Le 17 mai, nouveau convoi, dont firent mention les journaux du lendemain :
LES ÉVACUÉS
Hier matin, à 11 h. 20, est arrivé en gare Dijon-Ville un convoi d'environ 250 évacués, composé de vieillards, de femmes et d'enfants originaires de Meurthe-et-Moselle, principalement de Longwy et Longuyon.
(......)
Ce fut vendredi dernier qu'ils furent obligés de quitter leur pays et envoyés à Metz, puis à Strasbourg, et enfin en Suisse, où un accueil touchant les attendait.
Dans les locaux du Grand Séminaire, un déjeuner réconfortant leur fut servi. Voulez-vous voir le menu? Le voici :
Potage paysanne, bœuf nature, haricot de mouton, fromage et biscuits variés, café. Et cela fait par M. Lanier, ce qui veut tout dire.
Les évacués passeront la nuit au Grand Séminaire. Demain, ils seront dirigés sur Châtillon et Semur.
Entre les deux, un appel pressant avait été adressé aux donateurs le 13 mai, afin de pouvoir munir ces malheureux des vêtements les plus indispensables :
En raison du nombre considérable de femmes et d'enfants qui faisaient partie des derniers convois, alors que les hommes étaient quelques-uns à peine, la distribution de vêtements de femmes a été particulièrement active ainsi que celle des layettes et des chaussures (930 objets).
La provision réunie, grâce à la générosité de nos concitoyens, se trouve donc grandement diminuée en ce qui concerne les chaussures pour femmes et enfants de toute pointure, coiffures pour enfants, fillettes et garçonnets.
Les tabliers courants en cotonnade pour femmes et fillettes sont très demandés et il en a manqué lundi dernier.
Nous faisons donc un appel spécial pour ces différents objets, car il arrivera d'autres convois, et ces articles font particulièrement défaut à ces malheureuses rapatriées et aux nombreux enfants qui les accompagnent.
Merci d'avance à nos généreuses compatriotes qui voudront bien, une fois de plus, faire un choix dans leurs chaussures usagées et ne pas oublier d'envoyer des tabliers de cotonnade pour ménagères.

 

 Août 1915

Émigrés, évacués et réfugiés. - Au premier rang des victimes civiles de la guerre figuraient les réfugiés qui avaient fui l'invasion ou qui avaient été évacués de zones dangereuses. A eux, il est vrai, allait l'assistance officielle, qui se préoccupait d'adoucir leur triste sort. Le Ministre de l'Intérieur prescrivait ainsi, le 11 août, d'obvier aux exigences abusives de certains propriétaires inhumains à l'endroit des réfugiés; il ordonnait de lui signaler tous les cas connus d'une exploitation aussi condamnable de la misère du temps, et de lui proposer les remèdes appropriés pour y mettre fin. A l'honneur de la ville, on ne recueillit, après enquête, aucune plainte d'aucun réfugié sur les abus dont il aurait pu être victime ; il n'y avait plus d'ailleurs à Dijon qu'un nombre relativement restreint de ces pauvres déracinés Comme précédemment, la presse continuait à annoncer la mise en vente des listes de rapatriés français, rassemblés par le bureau des recherches à l'Hôtel de Ville de Lyon, pour permettre aux familles dispersées de se reconstituer (2 août).

 

 Septembre 1915


Émigrés, évacués et réfugiés. — Bien que n'ayant pas subi directement les maux de la guerre, les Dijonnais ne pouvaient, en effet, se désintéresser du sort de ses victimes. Ils avaient vu dans leurs murs des évacués et des réfugiés dont la misère suffisait à exciter la charité. Ces tristes convois ne cessaient guère, à intervalles plus ou moins longs : le 24 septembre, le Préfet avisait le Maire qu'un train de 300 évacués de la Marne était parti de Fismes le matin à destination de Dijon et devait vraisemblablement arriver le lendemain vers midi, la durée prévue pour le voyage étant de 29 heures. Le comité préfectoral des évacués était, il est vrai, spécialement chargé de leur réception ; mais le Maire ne pouvait ni ne devait ignorer ce qui se passait dans la ville. Dès le 19 septembre, en vue de besoins éventuels, ce Comité sollicitait une contribution en nature de la population :

POUR LES ÉVACUÉS

Le Comité des évacués, 10, rue du Chapeau-Rouge, serait très reconnaissant aux personnes qui pourraient lui procurer des assiettes creuses et des bols usagés, même quelque peu ébréchés, ce genre de matériel étant insuffisant au siège du Comité.

Quant aux rapatriés et à leurs familles, ils étaient informés par les journaux de la publication de la dernière liste les concernant, le 15 septembre :

INTERNÉS ET RAPATRIÉS CIVILS FRANÇAIS

La septième et dernière liste des internés et rapatriés civils français vient de paraître. Elle concerne les civils internés en Allemagne au début de la guerre et rentrés en France par Genève, du 24 octobre 1914 au 5 mars 1910. au nombre de 10.845. Elle concerne aussi les civils rapatriés du 1er juillet au 31 août 1910, dont les noms sont inscrits sur une feuille volante qui constitue un supplément à la sixième liste de rapatriés.

La série des listes d'internés et de rapatriés est désormais complète. Les six listes de rapatriés parues à ce jour comprennent 65.000 noms, ce qui, avec la liste présente des internés, donne un total de plus de 76.000 personnes.

Toutes ces listes (sauf la première qui est épuisée) sont en vente, au bénéfice du vestiaire genevois des rapatriés civils, au prix de 1 fr. 10 chaque, à Lyon. Hôtel de Ville, bureau de recherches des réfugiés.

Décembre 1915

Le 8 décembre, le Préfet annonçait l'arrivée prochaine, le 12 décembre, d'un convoi de rapatriés d'Allemagne ; des circonstances particulières retardèrent un peu la mise en route du train, qui n'entra en gare de Dijon que le samedi 18. La veille, un avis avait paru à ce sujet dans les journaux :

LES PRISONNIERS CIVILS

Demain samedi, dans la matinée, arriveront, par train spécial, à Dijon, cinq cents prisonniers civils, de retour d 'Allemagne.
Nos malheureux compatriotes seront reçus, à bras et à cœur ouverts, par le Comité des évacués, qui, depuis le commencement de cette horrible guerre, ne cesse de prodiguer son dévouement aux victimes de l'invasion teutonne.
Après un repos de quelques jours, les ex-prisonniers seront répartis ainsi : deux cents dans l'arrondissement de Semur ; cent cinquante dans chacun des arrondissements de Beaune et de Châtillon,

Puis vint, le 19 décembre, le compte rendu habituel :

UN NOUVEAU CONVOI D'ÉVACUÉS

Hier, vers midi et demie, un train spécial venant d'Annemasse amenait à Dijon un important convoi d'évacués du Nord : plus de trois cents personnes, femmes et enfants, en presque totalité originaires de Lille.

A la différence des précédents, ce convoi ne comprenait que des évacués volontaires. La kommandantur avait fait placarder des affiches avisant la population qu'elle organisait un service de départ et que les habitants désireux de regagner la France avaient deux jours pour se faire inscrire. Un premier train quitta Lille le mardi 14, à 1 heure 1/2. Il emmenait 180 voyageurs, divisés en deux catégories, les indigents et les personnes capables de payer le prix de leur billet : soit 46 fr. 40 en 3e classe pour le trajet de Lille à Schaffouse.

Avant de monter dans le train, les évacués furent fouillés et durent remettre tout l'or qu'ils pouvaient détenir, recevant en échange de la monnaie allemande. Les Allemands exigèrent également que les billets de banque leur fussent remis contre des marks avec un change de 27 %.

A Schaffouse, où ils arrivèrent via Hirson, Charleville, Metz, Strasbourg, les évacués furent admirablement reçus par le Comité de la Croix-Rouge helvétique. Leur passage en gare de Genève fut également marqué par de touchantes manifestations en l'honneur de la France.

Dans la grande salle de l'ancien évêché, où un repas chaud leur fut servi comme d'habitude, nous avons causé quelques instants avec nos compatriotes du-Nord. Des renseignements qu'ils nous ont fournis, il résulte notamment que le prix de la vie a terriblement augmenté à Lille en ces derniers temps. Le lait — de très mauvaise qualité — se paie 60 centimes le litre quand on peut en trouver. Des boîtes de lait concentré pouvant donner trois litres se vendent 1 fr. 25. Le bœuf est à 5 fr. la livre ; le beurre atteint 10 fr. le kilo ; les pommes de terre de 0 fr. 75 à 1 fr. le kilo ; les oignons 1 fr. le kilo; la rareté des œufs a donné lieu à une hausse extraordinaire : on les paie 0 fr. 75 pièce.
[1 franc 1915 équivaut à quasiment 3 euros actuels] Le pain fourni par le Comité de ravitaillement américain se délivre pour un prix à peu près normal à raison de 750 grammes par personne pour deux jours ; le riz, les haricots, le lard, les lentilles provenant de la même source sont à des prix raisonnables.

     Nos braves Lilloises nous ont parlé des mesures de rigueur dont la population est constamment l'objet de la part des autorités allemandes. On peut dire qu'elle fut mise en pénitence pendant presque tout l'été. Du 1er juillet au 14, la circulation des rues fut interdite aux habitants à partir de cinq heures du soir. Motif : des femmes avaient salué un cortège de prisonniers français aux cris de Vive la France. Même interdiction du 28 juillet au 17 août.
Cette fois, les Allemands punissaient la population en raison de l'attitude patriotique des ouvrières lilloises qui refusaient de travailler à la confection des sacs à terre pour les tranchées allemandes. Nous avons en son temps relaté cet incident. C'est au sujet de cette affaire que des notables lillois furent emmenés comme otages en Allemagne cependant que la ville était frappée d'une lourde indemnité.

     Comme bien on pense, les habitants de Lille étaient privés de toute communication avec l'intérieur. Les nouvelles de France leur étaient fournies — on devine dans quelles conditions — par des journaux allemands imprimés dans une langue soi-disant française : le Bruxellois, la Gazette des Ardennes, le Bulletin de Lille, recueil des actes administratifs de l'autorité boche. Fort heureusement que de temps à autre, quelques paquets de journaux jetés sur la ville par un aéroplane ami apportaient aux Lillois des paroles de réconfort et d'espoir.

     Un drame affreux a mis en deuil cette vaillante population, il y a deux mois de cela : quatre citoyens des plus honorables ont été condamnés et fusillés sous l'inculpation d'avoir favorisé l'évasion d'un aviateur anglais.
 [George Maertens, commerçant ; Ernest Deconynck, lieutenant ; Sylvère Verhulst, ouvrier ; Eugène Jacquet, marchand de vins : fusillés le 22 septembre 1915]
Puis ce fut la mort tragique d 'un jeune homme de 17 ans qui tut passé par les armes pour avoir, parait-il, fourni des renseignements aux troupes alliées [Léon Trullin, fusillé le 8 novembre 1915].[Tous les 5 sont représentés sur le monument "des Fusillés", œuvre du Valenciennois Félix Desruelles ; dynamité en 1940, il est reconstruit en 1960. Léon Trullin - représenté couché- a également son propre monument.]

Monument aux fusillés 1930


    Les évacués ont témoigné devant nous d'un moral excellent. Rien de plus touchant que le courage tranquille de ces femmes qui ont conservé leur confiance dans l'issue heureuse de la guerre. La plupart ont des parents qui les attendent et chez qui elles vont retrouver les joies de la famille. Les autres seront dirigées aujourd'hui même sur Semur et Châtillon-sur-Seine.

Le 12 janvier 1916 était publiée la relation accoutumée :
UN NOUVEAU CONVOI D'ÉVACUÉS
Un convoi important de réfugiés des pays envahis est arrivé, vers midi, à Dijon ; il comprenait plus de 400 de nos compatriotes provenant principalement des Ardennes et notamment de Sedan et des environs de Rethel et de Vouziers.
(.....)
Ce convoi était composé principalement de femmes, d'enfants et de vieillards, les jeunes gens, à partir de 15 ans, étant gardés par les Allemands. Plusieurs petits orphelins avaient été confiés aux bons soins d'une dame de la Croix-Rouge ; à leur descente du train, ils ont été emmenés aussitôt à l'hôpital.
A leur arrivée, nos infortunés compatriotes ont été conduits à l'ancien évêché, où leur fut servi un repas chaud dont voici le menu : pot-au-feu, rôti de veau, purée de pommes, fromage de gruyère, biscuits, pain d'épices, fruits et café.
Nous avons pu nous entretenir avec quelques évacués de Sedan. Réunis vendredi matin, à 9 heures, dans une grange, ils ne furent embarqués qu'à 4 heures de l'après-midi. Leur voyage fut très fatigant : quatre jours et quatre nuits en chemin de fer. Ils ne tarissent pas d'éloges sur la réception qui leur fut faite en Suisse et sur les bons soins qui leur furent donnés.

     Ils nous ont fourni quelques renseignements sur la vie de Sedan, car ce qui se passait en dehors de la ville était complètement ignoré d'eux, défense étant faite de se rendre d'une localité à une autre. La vie était très chère, et généralement les objets de première nécessité manquaient. Ainsi on ne pouvait avoir ni pétrole, ni charbon, ni beurre. Le lait écrémé — le seul que l'on pouvait trouver — était vendu à raison de 3 centimes le litre. La viande, du bœuf seulement, coûtait. 2 fr. 75 la livre ; les œufs, 0 fr. 75 les deux; le café, 3 fr. 25 la livre; la chicorée, 2 francs la livre; l'huile, 7 fr. 5 à 8 francs le litre ; la graisse, 1 fr. 5 la livre. L'on ne pouvait s'éclairer qu'avec de petites bougies vendues 0 fr.75 alors que leur prix habituel est de 0 fr. 05. Le gaz était au prix de 0 fr. 30 le mètre cube. Quant à la boisson, il fallait se contenter d'eau, le vin et la bière servant exclusivement aux Allemands.

     Tous les quinze jours, le ravitaillement, fourni par le Comité américain, se faisait à la mairie. Chaque personne recevait trois livres de pommes de terre et une certaine quantité de riz, de haricots et de lard. Les évacués se plaignent de la qualité de ces denrées et surtout du prix un peu élevé auquel ils les achetaient. Pour le pain, qui était généralement assez bon, chacun en recevait une demi-livre par jour.
Quant à la vie industrielle, elle est complètement arrêtée. Toutes les usines sont fermées et complètement vides, les Allemands ayant eu soin de mettre la main sur toutes les matières premières et sur toutes les machines qu'ils ont expédiées dans leur pays.
Malgré les souffrances subies, on entend peu de plaintes sortir de la bouche de nos infortunés compatriotes. Et, cependant, ce n'est pas sans quelques larmes dans les yeux qu'ils évoquent devant nous les durs moments passés, n'ayant aucune nouvelle de leurs parents et amis, ne connaissant des événements que ce que leur racontaient les journaux allemands. Ils nous arrivent pleins de courage et de confiance dans l'avenir, heureux de se retrouver loin de l'Allemand abhorré.

     Quelques-uns d'entre eux sont partis, dès hier, retrouver leurs familles. Un grand nombre, 250 environ, sont partis, dans l'après-midi, pour le Châtillonnais, dans un train mis à leur disposition par la Compagnie des Tramways départementaux. D'autres enfin ont été hospitalisés à Dijon, soit dans des familles de la ville, soit dans des hôtels, par les soins de la Municipalité. A tous ces Français grandis par l'adversité, Dijon a fait le plus chaleureux accueil.

1er février 1916 : ORPHELINS DE THANN DE PASSAGE A DIJON

     M. le Colonel gouverneur de la place a informé le Maire que 30 orphelins venant de Thann et conduits à Roanne passeraient cette nuit à Dijon, et l'a prié de vouloir bien prendre les dispositions nécessaires pour les héberger.
Le Maire s'est mis immédiatement en rapport avec l'administration de l'hôpital pour qu'il soit donné à ces petites victimes de la guerre une bonne hospitalité aux frais de la Ville. L'administration des hospices a bien voulu se charger de les restaurer et de les coucher. Ces enfants, qui arriveront à 22 heures 09, seront conduits à l'hôpital où un bon souper et de bons lits les attendront ; ils repartiront demain à midi après avoir déjeuné.
     En fait, le convoi fut retardé, et l'hospitalité de la Ville réduite à fort peu de chose. Du moins voulut-on donner aux enfants quelques friandises, dont les marchands firent hommage de plein gré et ne voulurent pas recevoir le paiement. C'est seulement le 1er février vers 14 heures que les petits émigrés traversèrent la gare. Les journaux du 2 février en donnent une brève relation :
LES ORPHELINS DE THANN
Les trente orphelins de Thann, dont on nous avait annoncé l'arrivée pour hier soir et qui devaient être reçus et hébergés aux frais de la Ville par l'hôpital général, on leur avait préparé un dortoir et la nourriture, sont arrives hier vers treize heures cinquante. Ils ont été reçus en gare par M. le Maire, qui avait été heureusement prévenu à temps.
M. Dumont leur a fait distribuer une ample provision de gâteaux et d'oranges, ainsi qu'un gros paquet de bonbons envoyés par la maison Perrier,  et les trente gamins, heureux, se sont ré-embarqués à destination de Roanne, où ils ont dû arriver hier soir à neuf heures.

Dijon n'oublie pas les soldats prisonniers, d'autant que pour les blessés que l'Allemagne libère, la ville est un point de passage :

     La condition des prisonniers  est si dure, leurs charges sont si lourdes, leur situation pécuniaire est si critique ! Il est nécessaire que tout le monde comprenne qu'il s'agit, non d'adoucir le sort de quelques prisonniers particulièrement malheureux, mais de faire vivre des centaines et des centaines de soldats français réduits par le régime allemand à la famine.
     Les témoignages de nombreux prisonniers évacués d'Allemagne comme grands blessés ou comme appartenant aux services sanitaires, nous ont renseignés sur le sort misérable de nos compatriotes dans les camps allemands, et aussi, il faut le dire, sur la « très fidèle remise aux prisonniers, français des paquets qui leur sont adressés ».
Le régime alimentaire des camps est le suivant : par jour, 180 grammes de pain K, au réveil, du café d'orge ; au déjeuner, une soupe de farine d'orge ou d'avoine, ou de riz, avec quelques raclures de bas morceaux de viande, un peu de pommes de terre, ou de riz, ou des pâtes ; quelquefois un peu de charcuterie ou un morceau à peine mangeable de viande ; le soir, un hareng en saumure, qu'on laisse sécher quelques jours pour lui enlever son mauvais goût, ou un morceau de fromage, voilà ce que les Allemands donnent à nos hommes.
La Croix Rouge de Genève, qui visite les camps, parle constamment, dans ses rapports, do « l'angoissante question de l'alimentation des prisonniers en Allemagne ». Les Russes qui ne reçoivent pas de colis meurent de faim, ils cherchent de la nourriture jusque dans les ordures ; ils mangent les têtes de harengs que nos hommes jettent.
Les prisonniers secourus de retour en France nous ont dit qu'ils ne devaient la vie qu'à nos envois.

      Jusqu'en mars 1917,  plus aucun convoi n'apparait dans le mémorial,  avaient-ils été redirigés ailleurs, le rédacteur du mémorial considérait-il ces passages comme habituels ??

Émigrés évacués, réfugiés. — Les convois de rapatriés des régions envahies continuaient à être acheminés à travers la Suisse sur la gare d'Evian-les-Bains. d'où ils étaient répartis dans les diverses régions de l'intérieur ; les journaux, du 15 mars rendaient compte du passage d'un de ces convois en gare de Dijon, où un petit nombre de nos malheureux compatriotes allaient se séparer de leurs compagnons de route pour être ensuite dirigés sur des localités voisines.

Un convoi de rapatriés est arrivé, nuitamment, à Dijon, venant d'Evian, gare de concentration.
(......)
     500 de nos malheureux compatriotes ont pris place dans 10 trains. Deux chefs de convoi d'une amabilité sans  égale les accompagnent. Chacun d'eux porte une petite pancarte avec un numéro d'ordre et de plus une cocarde tricolore, que tous, hommes, femmes et enfants ont tenu à se procurer lorsqu'il leur a été donné de fouler le sol de la Patrie. A peine le train a-t-il stoppé, que de la cantine des permissionnaires sont apportées des marmites remplies les unes d'un excellent potage, les autres de lait destiné aux enfants, car ils sont nombreux. Et grâce à l'organisation ainsi prévue par le Comité des évacués, chaque rapatrié peut ainsi se restaurer dans le train, il leur est ensuite fait une distribution de produits dijonnais, gracieusement envoyés par la Manufacture dijonnaise des Biscuits Pernot.
Environ 40 rapatriés qui doivent être dirigés sur Sombernon et Meursault, descendent en gare de Dijon. Ils sont conduits au Comité des évacués où un excellent repas leur est servi par de charmantes réfugiées et, où, jusqu'à l'heure du départ, ils peuvent se reposer dans un bon lit.
Pendant que nos amis, se restauraient, nous avons pu nous entretenir avec quelques-uns d'entre eux. Le plus grand nombre venaient de Bapaume, de Cambrai, de l'Aisne. Il y en avait également quelques-uns de la Marne (Loivre, Courey, Brimont).
Il ne nous est pas possible, malheureusement de donner ici tout le détail des souffrances qu'ils ont eu à endurer. Dirons seulement que certains avaient été arrachés de leurs domiciles depuis 1914 et transportés ensuite dans d'autres localités où ils avaient été contraints de travailler.
Puis que dire des exactions, des tourments qui leur furent infligés quand les Allemands les autorisèrent à rentrer en France. Visites minutieuses, rien ne leur fut épargné. Ajoutons que pendant dix-huit jours ils furent enfermés dans un village d'Allemagne entièrement cerné par la troupe et où ils ne pouvaient être ravitaillés.

 

     Cependant le front bouge, notamment avec le recul des l'ennemi ver la ligne Hindenburg (ou Siegfried pour les Allemands, et dont les secteurs, de Bapaume à Noyon, se nomment Wotan, Siegfried, Alberich, Brunhilde, Kriemhilde), 800km² de régions occupées sont "libérées", mais .... les villes et villages sont détruits, et si l'occupant n'a pas évacué les populations vers l'arrière (puis transférés via la Suisse), ils constituent un nouveau flux de réfugiés venant du front. Le ministre de l'Intérieur (Théodore STEEG) s'adresse aux maires via les préfets :

     A la date du 1er décembre 1914, après qu'un grand nombre de nos compatriotes avaient dû se replier devant l'ennemi, et alors que nous revenaient les premiers rapatriés des pays envahis, je me suis directement adressé aux Maires pour les associer étroitement aux efforts du Gouvernement, en vue d'assurer a tous nos réfugiés un accueil empressé les aidant à supporter leur détresse passagère.
Mon appel a été entendu, et, en France libre, les victimes de l'invasion ont retrouvé la place qui leur était due.
La longue durée de la guerre et le nombre croissant des rapatriés, sans lasser les bonnes volontés et la générosité première, ont cependant atténué leur élan.
Or, actuellement une nouvelle catégorie de nos compatriotes vient s'ajouter à celles que nous avons l'impérieux devoir de secourir. Il s'agit des évacués de la zone récupérée dont le maintien a été reconnu impossible dans des régions entièrement dévastées. Leur situation n'est pas moins malheureuse que celle des rapatriés dont de nouvelles arrivées sont imminentes, et il y a là un ensemble de misères qui motive un redoublement d'efforts dont les populations trouveront le stimulant dans le fait même que les évacuations de la zone récupérée témoigne du succès de nos armes. Je ne saurais donc douter du dévouement, de la générosité et du cœur de tous ceux à qui je m'adresse encore en toute confiance.
(......)
      On notera le terme (administratif ?) de "zones récupérées", que je rapprocherais du cas des jeunes gens "Non recensés en temps utile par suite d'un cas de force majeure" (sic. Un coup de tampon, vu le nombre) et dont l'état des services commence par : "resté en pays envahi, retrouvé en pays reconquis" (sic).
On parlera d'ailleurs à propos de ces zones de "contrées envahies et dernièrement reconquises".
Le 31 mars, la Mairie fait publier l'avis suivant :
PROCHAINE ARRIVÉE DE RÉFUGIÉS
La Préfecture de la Côte-d'Or vient d'être informée de l'arrivée très prochaine, à Dijon, de deux convois successifs de réfugiés venant des régions nouvellement reconquises dans nos départements encore envahis.
Afin que nos infortunés compatriotes conservent un souvenir réconfortant de l'accueil qui leur est réservé en notre ville, un chaleureux appel est fait, au nom de la Municipalité et des Pouvoirs publics, aux personnes qui pourraient tenir des lits à leur disposition.
Prière à ces personnes de vouloir bien en donner avis, rue Michelet, 1 (ancien évêché), au siège de la Commission des évacués, soit le matin, entre 9 et 11 heures, soit le soir, entre 14 et 18 heures.

Le premier convoi de « libérés » arriva le samedi 7 avril à Dijon; ils ne firent d'ailleurs qu'un séjour très court en notre ville, juste le temps d'y prendre un repas réconfortant; l'événement ne devait cependant pas passer inaperçu, et les feuilles du 8 avril publiaient à son sujet les lignes reproduites ci-après :
ARRIVÉE EN COTE D'OR D'UN PREMIER CONVOI DE LIBÉRÉS
Hier matin samedi, par train spécial, est arrivé en Côte-d'Or un premier convoi de réfugiés originaires des régions récemment libérées par la vaillance de nos soldats et de leurs alliés.
Un grand nombre était déjà descendu à Nuits-sous-Ravières, se rendant dans la région du Châtillonnais, et aux Laumes, se rendant dans le Semurois. Cent cinquante environ sont venus jusqu'à Dijon.

Pendant le trajet, nous pouvons nous entretenir avec quelques-uns d'entre eux. Il y a là des femmes, des vieillards, des enfants. Tous portent encore sur les traits la marque des souffrances endurées sous le joug de l'envahisseur, mais dans leurs yeux une flamme luit, la flamme joyeuse de la libération, la flamme de la victoire certaine, joie à laquelle, par malheur, se mêle la vision d'horreur des pays détruits.
Comme ils ont été heureux, nous disent-ils, quand ils virent arriver les premiers soldats français ! C'était un tel bonheur qu'ils n'osaient y croire, et il fallut quelque temps pour comprendre que ce n'était pas un rêve, mais bien une réalité.
Nous arrivons à l'évêché. La salle à manger est ornée de drapeaux. Sur les tables il y a des fleurs. Il y a du lait pour les enfants; pour les adultes, un excellent potage avec le bœuf, un succulent navarin de mouton aux pommes, du gruyère, du pain d'épices offert par la maison Philbée, des biscuits offerts par la maison Pernot, du vin, du café. Le service est fait par de gracieuses et dévouées femmes et jeunes filles. Réfugiées à Dijon, elles ont pour chacun des libérés, une parole aimable et une caresse pour les enfants. Pendant le repas, une de ces dames vint présenter les souhaits de bienvenue de la part de Mgr Landrieux, évêque de Dijon, qui, empêché de se rendre au milieu des libérés, avait tenu néanmoins à leur faire parvenir un premier secours de 50 francs.
Un autre secours de 30 francs est également remis par M. Dupin, au nom de l'Union des comités de réfugiés en Côte-d'Or.
Le soir, sous la conduite de M. Muel, représentant des réfugiés de Meurthe-et-Moselle, le convoi est parti par tramway spécial pour les villages dans la direction de Saint-Seine et Lamargelle.
      D'autres convois vont arriver. De nouveaux libérés vont être répartis dans les villages de la Côte-d'Or. Dès maintenant, nous souhaitons à nos frères attendus une cordiale et sincère bienvenue. Nous savons que tous vont recevoir de nos si bonnes et si hospitalières populations côte-d'oriennes un accueil chaleureux.
Et là, dans l'atmosphère de chaude sympathie qui va les entourer, ils pourront, sinon oublier, du moins voir s'estomper comme un mauvais songe les souffrances endurées.

     Ce premier convoi ne tardait pas à être suivi d'un second qui, se dirigeant sur Beaune, ne fit que traverser la gare de Dijon dans la matinée du  11 avril :

Un nouveau convoi d'environ 250 libérés est arrivé en gare de Dijon hier matin, vers 11 heures.
(......)
Le convoi se dirigeant sur Beaune, les voyageurs ne sont pas sortis de la gare et c'est dans le train même qu'une distribution de  lait, bouillon, thé, pain, fromage, leur a été faite afin de leur permettre de pouvoir attendre l'heure d'arrivée à Beaune, où un copieux repas les attendait.

     Enfin, dans la matinée du 13 avril, arrivait, en gare un convoi d'évacués de Reims, la ville martyre que l'ennemi bombardait avec acharnement :

CONVOI D'ÉVACUÉS RÉMOIS
Hier matin, vers 11 heures, un convoi d'environ 165 évacués de Reims est passé en gare de Dijon, venant d'Epernay et se dirigeant sur Mâcon.
(......)
Composés en majeure partie de vieillards, de femmes, d'enfants, les voyageurs ont été conduits pendant le court arrêt de leur train à la cantine des permissionnaires, où un repas avait été préparé à leur intention. Alors qu'ils se restauraient, nous nous sommes entretenus avec eux, et les détails qu'ils nous ont donnés sur l'état dans lequel ils ont laissé leur infortunée cité qu'ils ont dû quitter il y a quatre jours, nous ont arraché les larmes des yeux. Tout est saccagé, tout est détruit. Bombardement par avions, obus incendiaires, gaz asphyxiants, rien n'est épargné. Certains quartiers que nous avons connus riches et florissants ne sont plus qu'un monceau de cendres.

      En présence de ces malheureux, qui ont vécu depuis tantôt trente mois dans cet enfer du bombardement, et qui n'ont quitté leur pays qu'à la dernière extrémité, nous ne pouvons nous empêcher de penser combien peu de choses sont les restrictions auxquelles nous pouvons être soumis ; et devant tant de souffrances, tant de courage, nous nous inclinons. Que cet hommage, rendu au nom de la population dijonnaise à ceux qui ont été longtemps martyrisés, soit le prélude de l'œuvre de réparation à laquelle participera la nation entière, payant ainsi la dette sacrée qu'elle a contractée envers ces braves gens.

     On cessait momentanément de voir passer à Dijon les grands convois de rapatriés ou de libérés; on signalait cependant le 31 mai le passage d'une centaine d'enfants belges qu'on dirigeait sur la Suisse.
UNE COLONIE D'ENFANTS BELGES
     Durant que les Allemands cherchent à gagner, à voler plutôt un prochain salut dans une paix fragile, les convois de leurs victimes continuent au travers de la France, y cherchant un refuge ou un passage pour ceux dont les barbares ont détruit les foyers et mis le pays en servage. Hier matin le train de Paris via Fribourg emportait 97 tout jeunes enfants, de nationalité belge, presque tous orphelins, recueillis par l'Œuvre de la reine des Belges, bénéficiaires du quotidien, très charitable et si efficace secours américain. C'était tout ensemble un spectacle amer de tristesse et un modèle d'ordre et de discipline. Quelques dames de notre ville leur apportèrent, à l'arrêt, le secours d'une aide compatissante et quelques caresses. Au buffet de la gare, une collation et des gâteries leur avaient été préparées, dont la générosité de M. Parizot s'est plu, d'un geste très délicat, à faire remise aux petits déshérités et à leurs protecteurs.

    Après l'exode des populations que la guerre avait chassées de leurs foyers, on assistait parfois au mouvement inverse ; c'est ainsi que les journaux du 31 octobre relataient le passage à Dijon de 140 petits Alsaciens qui regagnaient leur pays natal : 

RETOUR EN ALSACE
Dijon a eu hier, pendant quelques heures, la visite de cent quarante petits Alsaciens des deux sexes. Arrivés à midi trente de Saint-Etienne, où ils résidaient depuis de longs mois, ils retournaient en Alsace, leur pays natal, sous la surveillance d'un directeur, d'un docteur et de deux dames.
Reçus à la gare par le Comité des évacués, ils ont été aussitôt conduits à la cantine des permissionnaires, où un déjeuner les attendait. Nos jeunes hôtes, il est inutile de le dire, ont fait honneur au repas copieux qui avait été préparé à leur intention et qui leur fut servi, avec leur dévouement habituel, par les dames de la Croix-Rouge et le personnel de la cantine. Le déjeuner allait prendre fin, quand, sur un signe de leur directeur, tous ces enfants se levèrent, et, au milieu de l'émotion générale, entonnèrent la Marseillaise, ce chant devenu pour eux l'hymne de la délivrance.
A 2 heures, les petits Alsaciens, souriant, quittaient la cantine, où ils avaient été entourés des meilleurs soins, et se rendaient à la gare où, dans le train de Belfort, des compartiments leur avaient été réservés. A 2 h. 15, le train se mettait en marche, et nos jeunes  frères d'Alsace prenaient la route de Thann, où ils retrouveront, dans cette partie de l'Alsace redevenue française, les joies du pays natal et du foyer familial.

Le 16 décembre 1917 le maire faisait publier l'appel suivant :
ARRIVÉE D'ÉVACUÉS DES RÉGIONS ENVAHIES
Le Maire de Dijon est informé par M. le Préfet de la Côte-d'Or qu'un nouveau convoi d'environ 500 rapatriés, venant d'Evian, sera dirigé sur le département de la Côte-d'Or et que, probablement, nos malheureux compatriotes devront séjourner à Dijon le 21 ou le 22 décembre courant. On sera avisé, en temps utile, du jour et de l'heure de leur arrivée.
Il peut se faire que ces malheureuses victimes de la guerre soient obligées de passer une nuit à Dijon. C'est en présence de cette
éventualité que le maire prie instamment les familles qui pourraient disposer, pendant une nuit, d'un ou plusieurs lits, soit à leur propre domicile, soit à leurs frais, chez un logeur, de vouloir bien se faire inscrire, à partir de demain lundi, à l'hôtel de ville, bureau des logements militaires, rue des Forges.
Les hôteliers et logeurs qui désirent contribuer à cet acte de solidarité sont également priés d'indiquer au même bureau à quel prix, le moins élevé, ils pourraient assurer le coucher de ces rapatriés et combien ils pourraient en recevoir.
Le maire espère que ces éprouvés, qui ont droit à tous les égards et à toutes les sollicitudes, recevront à Dijon la généreuse hospitalité qu ils ont trouvée en Suisse. C'est à l'initiative privée des Français, qui, plus heureux, n'ont pas eu à souffrir des brutalités et des exactions des barbares, qu'il appartient d'assurer à nos frères rapatriés la cordiale réception qu'ils méritent.

     Le convoi annoncé arriva à Dijon le 22 décembre ; les journaux du lendemain publièrent à ce propos les lignes suivantes :
LES RAPATRIÉS
Hier matin, à 5 heures 44, 633 rapatriés, venant d'Evian-les-Bains, sont arrivés à Dijon.
Ces malheureux, originaires de l'Aisne, du Nord et du Pas-de-Calais, avaient été emmenés par les Allemands en Belgique, où ils se trouvaient depuis huit mois. Malgré les souffrances qu'ils ont endurées, leur moral est excellent, et c'est avec joie qu'ils nous ont dit leur courage et leur espoir.
Ils ont été conduits à la cantine de la gare et à l'ancien évêché, où des repas chauds et copieux leur ont été servis. Après avoir été restaurés,ils ont été répartis, savoir 126 dans l'arrondissement de Dijon (région d'Is-sur-Tille); 167 dans l'arrondissement de Beaune, 177 dans l'arrondissement de Chàtillon-sur-Seine et 163 dans l'arrondissement de Semur-en-Auxois.
Tous sont repartis dans la journée, mais, avant de quitter Dijon, ils ont manifesté leur satisfaction de la réception qui leur avait été faite et adressé leurs remerciements aux autorités et aux organisateurs.
On n'avait donc pas eu à s'occuper du logement ; à ce sujet cependant la population n'avait pas manqué de répondre à l'appel que le maire lui avait adressé, puisque  celui-ci la remerciait publiquement dans les termes suivants :
Le maire de Dijon adresse ses très sincères remerciements à toutes les personnes qui avaient bien voulu, à sa demande, réserver des lits à nos malheureux compatriotes rapatriés des régions envahies ; 215 lits avaient été généreusement mis à sa disposition indépendamment de dortoirs collectifs.
Les rapatriés ayant été dans la journée d'hier dirigés sur leurs nouvelles résidences du département, n'ont pu profiter de la cordiale hospitalité qui leur était réservée.
Le maire espère qu'il retrouvera les mêmes offres lorsqu'un nouveau convoi devra séjourner à Dijon.
Quant aux sommes qui ont été versées et dont le montant s'élevait à 440 francs, elles ont servi en partie à, améliorer le repas de nos hôtes d'un moment; le surplus sera employé aux mêmes besoins des premiers rapatriés qui seront dirigés sur notre ville.
     L'année 1918 verra son lot de convois, sous la menace des bombes de gothas, les évacuations n'avaient pas tardé à commencer : le 1er février, c'était à 75 ouvrières de la manufacture des tabacs de Nancy et à leurs enfants, dirigés sur Dijon, qu'il fallait assurer le logement ; le 13, on signalait le passage en gare de réfugiés en provenance de la même ville :
LES RÉFUGIÉS
Avec le train de Nancy sont arrivés, hier, en notre gare, deux groupes de réfugiés : l'un de 105 vieillards et l'autre d'enfants assistés. Ces malheureux devaient, peu après, prendre le train de Chalon afin d'être dirigés sur Bois-Sainte-Marie et Semur-en-Brionnais, près de Charolles (Saône-et-Loire), où ils seront hospitalisés jusqu'à la fin des hostilités.
Pendant leur arrêt à Dijon, vieillards et enfants ont été conduits à la cantine militaire, où ils trouvèrent le meilleur réconfort : bouillon, boissons chaudes, ainsi que tout ce qui pouvait leur être agréable.
Ce cordial accueil a fait grand plaisir aux voyageurs, lesquels, bientôt, prenaient place dans le train qui devait les emmener dans une région charmante, où ils retrouveront le calme et la tranquillité.
Le 6 mars, c'étaient des garçonnets de santé débile, évacués des départements du nord et dirigés sur Cannes, qui recevaient l'hospitalité à la cantine des permissionnaires.

A peine l'offensive ennemie était-elle déclenchée qu'on assistait au passage des grands convois :
LES RÉFUGIÉS
Hier matin 25 mars, à 8 h. 45, est arrivé en gare de Dijon un train de 900 réfugiés, venant de Beauvais, à destination de Màcon.  
(......)
Après avoir été ravitaillés par les membres du comité, ces malheureux ont continué leur route. Ajoutons qu'un service d'ordre avait été organisé par M. Flury, commissaire central, qui était également présent.
La formidable bataille d'où dépendait le salut de la France se poursuivait âprement.

Nouveaux convois les 27 et 28 mars : 

L'EXODE
Dans la nuit de mercredi à jeudi, onze évacués des pays envahis sont arrivés en gare de Dijon. Ils ont été conduits à la cantine de la gare pour y être restaurés. Au matin, ils ont pu se rendre au siège des réfugiés, rue Michelet.
Hier, à 7 h. 1/2 du matin, un millier environ d'évacués des environs de Montdidier sont arrivés à leur tour en notre gare, où ils devaient séjourner une heure avant d'être dirigés sur Grenoble.
Conduits à la cantine militaire, il leur y a été servi un substantiel repas, dont ils se sont montrés très satisfaits.
Ils ont pu ainsi, bien réconfortés, continuer leur route sur le beau pays où ils trouveront, sinon l'oubli de leurs peines, du moins le calme repos d'une vie paisible.

Le 3 mars, on annonçait le passage de deux trains d'évacués contenant chacun 1.200 personnes : l'un venant de Senlis et l'autre de Rouen ; puis c'étaient des groupes de moindre importance : 130, 40, 300, comportant plus spécialement des vieillards et des malades, dont partie couchés, en provenance de Châlons-sur-Marne et à destination de Cannes, dont il fallait assurer le ravitaillement et parfois l'hospitalisation.

 

LES ÉVACUÉS
La nuit dernière, à minuit 30, environ 150 évacués de Compiègne et des environs sont arrivés en gare de Dijon-Ville. Après avoir été ravitaillés par les soins de la cantine, ils ont été conduits à l'ancien séminaire pour y passer la nuit.
Dans l'après midi, deux autres trains d'évacués sont passés à Dijon : le premier à 2 heures, à destination de Beaune : le second. transportant environ 350 vieillards, à 3 heures 1/2. Quatre de ces derniers, très àgés, ont dû être hospitalisés dans notre ville. Les autres ont été dirigés sur Nice.
Les évacués de ces deux trains ont été ravitaillés par les soins du comité intermunicipal.  C'était tout le lamentable cortège des pauvres gens fuyant, devant l'invasion, la ruine de leurs foyers dévastés, misérables troupeaux humains apeurés et tremblants, avec encore, dans les yeux, des visions d'épouvante.

L'organisation adoptée à Dijon permettait de faire face à toutes les nécessités de la situation ; dès la fin de mars, et en prévision des grands mouvements stratégiques qui devaient avoir pour effet de multiplier les évacuations des populations, le comité municipal décidait d'organiser à la gare une permanence de 8 heures du matin à minuit, afin d'assurer d'une façon irréprochable l'assistance qui était due aux réfugiés de passage. Tous les efforts convergeaient d'ailleurs vers ce but ; les heureuses dispositions arrêtées par les administrateurs de la cantine des permissionnaires en vue du ravitaillement de nos hôtes de quelques heures, les puissants moyens matériels dont ils disposaient, les installations et aménagements apportés aux locaux de la rue Michelet pour l'hébergement des fugitifs qui devaient trouver un asile dans le département; le dévouement, des membres du comité et de leurs divers collaborateurs, l'empressement que les Dijonnais mettaient à répondre à l'appel que le Maire leur avait adressé en apportant des dons en espèces ou en nature, tout ne concourait-il pas à atténuer la détresse de nos malheureux compatriotes, pitoyables victimes de la guerre.

La municipalité participe à l'effort de la ville d'Evian dans l'accueil des rapatriés :

   Les misères dont les Dijonnais étaient les témoins attristés ne devaient pas leur faire oublier qu'il en était d'autres qui, par leur similitude, réclamaient impérieusement des secours ; depuis que la famine régnait chez eux, nos ennemis évacuaient des départements envahis toutes les personnes qu'ils considéraient comme des bouches inutiles : femmes faibles, enfants, vieillards, infirmes; ces évacuations se faisaient par la Suisse, et nos compatriotes rejoignaient la terre française à Evian, où une œuvre admirable, l'Œuvre eviannaise d'assistance aux rapatriés, les recevait en attendant qu'ils fussent dirigés sur les régions que leur assignait le Gouvernement. Il y avait en grand nombre parmi eux des malades victimes des privations, des peines morales, des travaux forcés infligés par la cruauté de l'envahisseur; il y avait aussi  et surtout ceux qui avaient tout perdu, au sens littéral du mot: des mères, avec trois, six, huit enfants, qui n'avaient dans leurs poches que quelques sous et souvent même rien du tout. L'Œuvre éviannaise distribuait journellement à ces pauvres épaves de la tempête qui, depuis plus de trois ans, bouleversait le monde, un premier secours en espèces : 5 francs, 10 francs, 20 francs, 30 francs et plus, suivant les besoins et les charges de chaque famille nécessiteuse ; ne vivant que des dons généreux de ceux qui s'intéressaient au sort des rapatriés, elle adressait à la Municipalité de Dijon une demande de subvention. Pouvait-on rester sourd à cet appel ?
     Le Conseil municipal ne le pensait pas, et, dans sa séance du 22 février, il votait, à l'unanimité de ses membres présents, une subvention de 1.000 francs à l'Œuvre éviannaise ; ce vote constituait non pas un acte de charité, mais un geste de solidarité, de justice et de patriotisme.

    On pourra lire sur ce sujet l'opuscule du Dr De Monchy sur l'arrivée à Evian le 14/10/1917 du premier train d'enfants Belges rapatriés :


Cliquer sur les flèches, ou sur une page pour accéder au site (gallica.bnf.fr)
UN CONVOI DE PRISONNIERS RAPATRIES 
La soirée de vendredi [1er mai 1918] fut, pour la cantine de la gare, une soirée fort animée. Tout d'abord, vers 9h. 1/2, arrivaient près de 400 jeunes recrues de la classe 1919, Parisiens, qui se rendaient à Auxonne.
Nous avons assisté au ravitaillement de tout ce monde et avons pu admirer la rapidité avec laquelle le service est assuré par un personnel dévoué.

A 10 heures, arrivaient à leur tour 360 rapatriés d'Allemagne, prisonniers appartenant aux classes 1887, 1888 et 1889, qui venaient d'être échangés contre un nombre égal de prisonniers allemands.
Du camp de Munster, ils sont venus par Constance, en traversant la Suisse, à Genève et à Lyon. Ils n'oublieront pas, disent-ils, l'accueil qui leur a été fait en Suisse française, de même quBellegarde et à Lyon. Ils conserveront également bon souvenir, croyons-nous, de la cordiale réception qui leur a été faite à Dijon.
(......)
La plupart portent barbe et cheveux blancs. « Nous sommes les vieux de l'an 14 », disent-ils. Déjà ils paraissent avoir oublié les misères qu'ils ont dû connaître, car une douce joie illumine le visage d'un certain nombre d'entre eux ; d'autres (beaucoup sont originaires de pays envahis), songent qu'ils ne pourront encore retrouver la famille, qu'ils n'ont pas vue depuis si longtemps.
Mais la soupe est servie, une bonne soupe à laquelle succède un plat de viande froide, arrosé de bon pinard et de café. Un cigare est en outre distribué à chaque convive, qui, maintenant, peut attendre l'heure du départ.
Il est minuit. Nous quittons tous ces braves, en leur souhaitant un heureux retour.

Nouveau passage le 2 mai : 

PASSAGE DE RAPATRIÉS
Avant-hier soir, à 22 h. 40, un convoi de 434 rapatriés d'Allemagne est arrivé à Dijon, venant de la direction de Lyon.
Ces militaires, qui font tous partie de l'armée territoriale et appartiennent en grande partie aux corps des G. V. C., gendarmes et douaniers, paraissaient extrêmement fatigués.
(......)
Le même menu que pour le précédent convoi fut servi par nos dévouées infirmières, qui ne manquèrent pas d'adresser à chacun un mot aimable et réconfortant.
Après s'être restaurés et avoir pris un peu de repos, ils repartaient hier, à 5 heures du matin, dans la direction de Paris.

Le 17 mai enfin, c'étaient 118 personnes de nationalité italienne, fuyant la Russie inhospitalière pour rejoindre leur patrie. 

ÉVACUÉS DE RUSSIE
Hier, par l'express de Paris, sont arrivées à Dijon plusieurs familles italiennes, qui, établies en Russie et fuyant l'invasion allemande, étaient parties il y a environ trois mois. Passant par Arkhangel et l'Angleterre, elles étaient arrivées à Paris il y a quelques jours.
A leur arrivée en notre gare, ces évacués, au nombre de 118, ont été reçus par les délégués du Comité des évacués et de la cantine de la gare. Pendant qu'un certain nombre d'entre eux se rendaient dans les hôtels de la ville, les autres, moins fortunés, gagnaient la cantine, où un repas leur était offert.
Cet accueil leur fut si sensible qu'ils manifestèrent le désir de marquer cette satisfaction sur un registre. La déclaration fut ensuite signée par plusieurs d'entre eux.
Vers six heures, ils reprenaient le train qui les ramènera sous le beau ciel d'Italie.

Juin 1918

Réfugiés, évacués et rapatriés. — Avec le fléchissement de nos lignes, il fallait de toute urgence procéder à l'évacuation des populations menacées ; et c'était certes un des plus navrants spectacles que celui auquel il était donné aux Dijonnais d'assister quand les convois passaient en gare, emportant vers de lointaines régions ces pitoyables victimes de la guerre. Rien ne dira jamais la morne résignation de ces vieux, de ces femmes, de ces petits, ballottés comme des épaves sur les grandes lignes de France, en route pour des destinations ignorées. Beaucoup parmi eux avaient déjà monté ce douloureux calvaire en 1914; puis, la première grande tourmente passée, ils étaient revenus s'installer au village, réédifier leur foyer et cultiver leur champ ; et voilà qu'à nouveau il fallait s'éloigner. Qui aurait pu s'étonner d'entendre parfois sortir de ces bouches des paroles de doute et de découragement?

 

Au début du mois de juillet, on signalait encore des passages d'évacués;

 Réfugiés, évacués et rapatriés. — le 1er juillet, la préfecture avisait la mairie de l'arrivée à la gare de Dijon-Ville, les 2, 3, 4 et 5 juillet, de quatre détachements d'évacués de 100 personnes chacun, auxquelles on prescrivait de faire assurer un repas.
L'exode des petits parisiens continuait; les journaux du ier juillet publiaient l'entrefilet ci-après:
L'EXODE DES PETITS PARISIENS
Vingt-cinq petits Parisiens, garçons et fillettes, sont arrivés hier après-midi à Dijon, sous la conduite de deux délégués de l'Œuvre des enfants des chemins de fer français. Après un substantiel repas à la « cantine des poilus », ces enfants ont été remis à des familles dijonnaises qui ont eu la générosité de leur ouvrir leur foyer et auprès desquelles ils trouveront le repos et les soins dont leur jeune âge a si grand besoin.

Le 10 août, 80 réfugiés passaient encore à destination de Tarascon et Nîmes.
Par contre, le 22 août on envisageait le retour des groupements d'enfants et des familles nécessiteuses ayant quitté Paris sous la menace des bombardements ; la date de ce retour était fixée au 1er septembre.

Le 31 juillet, nouveau passage : 

PASSAGE DE PRISONNIERS RAPATRIÉS
Mercredi dernier, plus de 300 prisonniers furent ravitaillés à la cantine des permissionnaires. Ils avaient été précédés chaque jour de convois n'excédant pas une centaine.
Comme l'habitude patriotique en a été prise, les dames de la Croix-Rouge ont mis tous leurs soins et leur bonne grâce accoutumée à assurer le service des tables de ce repas modeste, mais chaud et réconfortant.
Les membres du comité de la cantine, dont les conseillers municipaux qui en font partie, les membres du comité des évacués, qu'un coup de téléphone appelle, assuraient l'organisation matérielle de cette réception, comme toujours improvisée.
Nos malheureux compatriotes, rentrant directement des camps allemands, étaient émus jusqu'aux larmes, et ce fut une belle explosion d'enthousiasme patriotique quand M. Lheureux, de l'Opéra-Comique, qui se trouvait de passage à ce moment, entonna de son admirable voix la Marseillaise, dont le refrain fut repris en chœur par les quelques 2.000 poilus présents à minuit dans les grandes salles.
Et c'est aux cris de : « Vive Dijon ! » maintes fois répétés qu'à minuit et quart nos prisonniers rapatriés gagnaient la salle de repos pour y dormir profondément, harassés de fatigue, avant le départ de leurs trains respectifs. Ajoutons que M. Got, si aimé des poilus dans ses imitations de chants d'oiseaux, avait auparavant joyeusement claironné à leur intention une brillante fanfare des airs traditionnels de l'armée française, ce qui fut un plaisir pour ces pauvres gens, qui ne les avaient pas entendus depuis près de quatre ans.
Réconfort indispensable à ceux qui ont tant souffert là-bas et dont la reconnaissance s'exprime de maintes façons variées, mais inoubliables.

Le 7 septembre enfin, le Comité de l'Office central faisait à la presse cette nouvelle communication

LES RAPATRIÉS
Les retours des rapatriés, qui avaient été momentanément suspendus pendant le mois d'août, ont repris.
Deux convois sont de nouveau passés dimanche et lundi et ont été reçus à la cantine par les membres de la commission.
Nos compatriotes, des universitaires arrivant de Genève et de Lausanne, ont été profondément émus de la modeste, mais cordiale réception qui leur était faite ; et, après avoir chaleureusement remercié des attentions délicates dont ils avaient été l'objet, ils ont continué leur route vers Paris et les au-delà à 5 heures du matin.

     Dijon, cependant, ne se bornait point à assister les rapatriés qui traversaient notre gare ; dans la même séance du 28 août, le Conseil municipal décidait d'allouer une subvention de 1.000 francs au Comité de réception des rapatriés civils et militaires de Bellegarde (Ain) ; au 10 juin 1918, ce comité avait déjà reçu et ravitaillé 400.000 rapatriés civils, 15.000 membres du personnel sanitaire et 30.000 grands blessés.
     Toutes les villes traversées par les convois n'avaient pas pris la même initiative que Dijon ; la grande presse avait signalé cette regrettable lacune. C'est pourquoi le Conseil municipal émettait le vœu, dans sa séance du 28 août, « que le Gouvernement organise un service de transport et de ravitaillement en cours de route des rapatriés civils et militaires, de façon que ces derniers soient transportés le plus rapidement et le plus confortablement possible à leur destination, et que, durant le trajet, ils soient convenablement ravitaillés ».
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2 avril 2016

Henri DURRE, député du Nord

 

     Pour les Nordistes, et plus certainement pour ceux du (très large) valenciennois, le nom de Henri DURRE évoque une rue, une avenue, une place, une école, voire une station de bus. D'ailleurs si vous en connaissez "hors région", merci de me laisser un commentaire.

photo HD

 

  • Henri DURRE est né à Maubeuge le 15 septembre 1867 où lui sont donnés les prénoms de Théodore Henri ; vous trouverez son nom dans le Dictionnaire des Parlementaires Français, mais aussi sur le monument aux morts du Palais Bourbon.

    Monument AN


    "Sa tombe est l'un des monuments que le promeneur peut voir au cimetière St Roch de Valenciennes : date du décès 28 octobre 1918.

    Partisan du rapprochement Franco-Allemand, à 18 ans il épouse une Allemande.

    Établi Représentant de commerce à Valenciennes, c'est un socialiste actif, rédacteur à "L' Avenir de Valenciennes" ; conseiller municipal dès 1900, puis conseiller général, il se présente à la députation : battu en 1902, élu en 1906, battu en 1910, réélu en 1914, il prend ses fonctions deux mois avant la déclaration de guerre : "Sont déclarés élus pour les 3 circonscriptions de Valenciennes, MM. Pierre MELIN, Henri DURRE et François LEFEBVRE" [ce dernier était maire de Denain] (Journal officiel du 3 juin 1914)."

    Le Journal Officiel des débats parlementaires fait état des séances de juin, de celles (12) de la première quinzaine de juillet, puis de la session extraordinaire du 4 Août. Il faudra attendre ensuite la 2de session extraordinaire du 22 décembre pour que les députés siègent à nouveau. Henri DURRE assistait aux séances des 15 juillet et 22 décembre. Entre-temps, le député était dans Valenciennes occupée.

 

La Municipalité lors de la déclaration de guerre se composait de :

M. le Docteur Tauchon, Maire;
MM. Damien et Dugnolle, Adjoints;

des Conseillers, au nombre de 27:
MM. Thellier de Poncheville, J. Billiet, Lepillez, Durre (Député), Dupont père, René Delame, Fourmeux, Boulanger, H. Mabille de Poncheville, Tromont, Douay, Guillaume, G. Pillion, Giard-Motte, Hédot, Lajoie, Debaralle, Millot, Armbruster, Jeanjean, Vilain, Mineur, Derudder, Coulon, Bouillon.

M. l'Adjoint Dugnolle étant mort le 8 août 1914, fut remplacé par M. Jules Billiet comme deuxième Adjoint.
MM. Millot et Carlier-Daniaux, mobilisés, allèrent rejoindre leur corps.

Le Conseil se réunissait chaque matin à 9 heures sans convocation.

 

Le député Henri DURRE avait rejoint le conseil municipal dont les délibérations actent sa présence dès le 5 Août ; je ne relate que les faits marquants auxquels il participe.

  • Séance du Lundi 31 août 1914. Le peu d'argent qui restait dans les banques ayant servi à payer les premières réquisitions et l'achat de denrées de première nécessité, le Conseil municipal, chassé de la Mairie, se réunit au Café Français, place d'Armes.

         Les Allemands voulant absolument se procurer de l'argent, le Commandant Kintzel donna un permis à MM. les députés Durre et Melin, accompagnés de M. Vergeot, percepteur, pour se rendre à Paris afin d'obtenir du Gouvernement l'autorisation de contracter un emprunt pour faire face aux besoins urgents de la Ville. Au début de l'occupation, le flanc droit de l'armée allemande était mal gardé, leur seul objectif étant alors Paris qu'ils comptaient atteindre le 25 août, ce qui les perdit d'ailleurs, n'ayant pas compté sur la résistance héroïque de nos amis les Belges. Il était donc assez facile, les premiers jours de l'occupation, de traverser les lignes allemandes qui ne dépassaient pas Saint-Amand-Orchies.

         Après un voyage assez mouvementé, ils furent assez heureux pour rencontrer le ministre des Finances et le ministre de l'Intérieur qui leur firent d'abord espérer qu'un décret paraîtrait le lendemain à l'Officiel, autorisant les communes de l'arrondissement de Valenciennes à emprunter pour la continuation du service des lois sociales et notamment des secours aux familles des ouvriers mobilisés. [Il n'y eut pas de décret, mais une lettre écrite au nom du gouvernement, ceci pour éviter toute jurisprudence]

         Quelques heures après le départ de Valenciennes des députés, la situation s'était singulièrement compliquée pour nous par la rançon importante imposée à la Ville de Valenciennes, nécessitant concours des banques de la ville pour faire face à cette exigence ; il eût fallu, pour le bien, pouvoir remplacer au moins la somme décaissée, mais un nouveau sauf-conduit à cet effet, qu'avait permis d'espérer l'autorité allemande locale, ne fut pas accordé par le général commandant à Cambrai le corps d'occupation.

         Quoi qu'il en soit, nos députés rentrèrent ici jeudi soir, [3 septembre] et dès vendredi, une commission spéciale, que nous nous empressâmes de constituer, se mit à l'œuvre et élabora le projet que nous allons vous soumettre, et qui permettra, nous l'espérons, de remédier aux besoins les plus urgents.
  • 15 septembre 1914 ici se place l'épisode du "Testament de Guillaume" que raconte René Delame

    "Le Commandant Kintzel exigea de nouveau une amende d'un million, sous peine de prise d'otages ou de représailles. Il offrit à nouveau un sauf-conduit pour aller demander cette somme au gouvernement français.

    Le Député Durre partait ce jour-là sans laissez-passer pour Paris, empruntant le tramway de Saint-Amand à Hellemmes. Chose extraordinaire, les Allemands avaient autorisé le tramway de Saint-Amand à Hellemmes à circuler, ce qui permit à bon nombre de jeunes gens de passer les lignes; mais ils le supprimèrent peu de temps après. Ayant seul l'autorisation de circuler en auto, le Conseil me délégua donc pour aller avec Durre à Lille, demander à M. le Préfet du Nord son appui afin d'éviter des représailles.

    Ayant passé les lignes allemandes je rejoignis M. Durre en route et le fis monter dans mon auto. Je lui remis comme cela était convenu le rapport qui nous était parvenu sur la chute de Maubeuge pour qu'il en donnât connaissance au gouvernement à Bordeaux. Nous fûmes surpris de passer aussi facilement les lignes des deux armées, ne rencontrant ni Français ni Allemands.
    (.....)
    Je laissai M. Durre avec le préfet du Nord à Lille et je rentrai à Valenciennes pour faire part de ma réponse. Naturellement le Commandant Kintzel n'en fut pas satisfait."

 

  • A la séance du 28 octobre 1914, M. Durre, Député, rendit compte de son voyage à Lille et de son entrevue avec M. le Préfet du Nord, qui approuve les décisions du Conseil en ce qui concerne l'application des lois sociales et le paiement des allocations journalières.

 

  • séance du 3 décembre 1914, après que le Maire fût allé faire une démarche à la Commandature.
    Le lieutenant Von Mikusch lui répondit que, avant de permettre et d'organiser l'envoi de correspondance aux prisonniers, il serait avantageux de nous procurer, par l'entremise de la Croix-Rouge de Genève, l'indication du lieu de leur internement, mais il ne donna aucun renseignement sur le moyen de faire parvenir nos lettres à Genève.
    MM. Durre et Melin, députés, devant se rendre quelques jours plus tard à Paris pour participer à la session de la Chambre, proposèrent de faire une démarche auprès du Comité de la Croix-Rouge, à Paris, pour obtenir que les lettres expédiées par les soins de la Croix-Rouge de Genève, nous parviennent, via Bruxelles, par les soins de la Poste allemande.

 

  • 5 décembre 1914 : Constitution d'une Commission d'études formée pour préparer le ravitaillement de l'Arrondissement.
    M. Durre, au moment où son nom fut proposé, déclara que lui-même et son collègue M. Melin tenaient à prévenir l'assemblée de leur prochain départ, si, comme le bruit en était parvenu à Valenciennes, le Parlement français avait été convoqué pour la fin du mois, il vaudrait donc mieux, croit-il, introduire dans la Commission une autre personne. [Les députés seront également présents à la séance du 7/12]

 

  • Vendredi 11 décembre 1914. - Coup de théâtre. - La réunion du Conseil municipal touchait à sa fin, quand entre le Sous-préfet de Valenciennes, M. Cauwes, accompagné de son collègue de Cambrai.

    Tous deux étaient revenus depuis peu à Lille. Le général allemand qui commandait à Lille les avait envoyés administrativement pour s'entretenir avec le commandant supérieur de Valenciennes, le Général [allemand] de Mongelas.

    Une grande altercation eut lieu entre le Sous-Préfet et les Députés Durre et Melin; ce fut un véritable réquisitoire au sujet de l'abandon de son poste avant l'arrivée de l'ennemi.
    (…)
    Quoi qu'il en soit, Durre et Melin, trouvèrent que le Sous-préfet aurait dû donner des ordres et des instructions avant son départ, et puisqu'il était parti, il n’y avait pas de raison qu’il revînt.

  J'ouvre une parenthèse pour le cas de M. Cauwes :

La règle de droit public est que les fonctionnaires d'autorité, qui représentent directement le Gouvernement, se replient en cas d'invasion, alors que les autres fonctionnaires demeurent en principe à leurs postes.

A la veille de l'invasion, les instructions, non écrites, étaient identiques. C’est ainsi que M. Trépont, Préfet du Nord, a reçu et exécuté l'ordre de se rendre à Dunkerque, lors de la première occupation de Lille. M. Cauwes répondit qu'après avoir assisté le 23 août, à un engagement le long de la frontière de Belgique, à Blanc-Misseron et Crespin, il avait reçu des ordres de se replier en en même temps que l'administration des Postes, et qu'il avait brûlé à Saint-Quentin, tous les papiers de mobilisation.

S'étant rendu le 26 août au Ministère de l'Intérieur, le Ministre se refusa même à croire que les Allemands fussent à Valenciennes. Selon les ordres du Gouvernement, il partit immédiatement rejoindre son corps, où il fut affecté au début de septembre au 6e régiment d'Infanterie Territoriale.

Plus tard, il reçut l'ordre du Gouvernement de rejoindre M. Trepont à Lille. Plusieurs jours plus tard, le Gouvernement sur la demande des élus modifia sa doctrine, et des ordres nouveaux ont maintenu à leur résidence les fonctionnaires de l'administration préfectorale, de la zone située plus en arrière et qui fut bientôt envahie. C'est ainsi que le Sous-préfet de Saint-Quentin dût rester à sa place, et que M. Trepont qui avait exécuté les premières instructions du Gouvernement, lors de la première invasion de Lille, et qui était rentré dans Sa Préfecture après le départ de l'ennemi, y est resté quand Lille, par la suite, a été occupée pour la seconde fois.

Pour faciliter la réintégration du Sous-préfet dans ses fonctions, le Maire M. Tauchon, [qui avait refusé la proposition de l’occupant de le nommer officiellement sous-préfet, alors qu’en l’absence de M Cauwes il en assurait les fonctions] envoya sa démission de suppléant à l'autorité allemande, le 13 décembre. Son geste fut unanimement approuvé par le Conseil municipal. M. Douay ajouta qu'il le comprenait parfaitement, aucune investiture officielle ne lui ayant été donnée par le Gouvernement français, ce geste ne pouvait que l'honorer.

A la séance du 16 décembre, M. le Maire eut le regret de faire savoir au Conseil que la demande de M. Cauwes n'avait pas été admise par l'autorité allemande.
« Je conserverai donc, ajouta-t-il, les fatigues et les responsabilités de l'administration de l'arrondissement ».

Les deux Sous-préfets, au cours de divers entretiens avec l'autorité allemande ayant refusé de participer en quoi que ce soit aux réquisitions et à toute exécution des ordres ennemis concernant le travail forcé de la population civile, furent faits prisonniers de la 6e armée allemande, et astreints à des résidences fixes, comportant surveillance et visite journalières.

C'est ainsi que M. Cauwes fut interné à Tournai. Mme Cauwes, restée à Valenciennes, dans une clinique où elle venait de mettre au monde un enfant, étant atteinte de plus de phlébite aux deux jambes partit avec son mari et ses deux enfants à Tournai, où ils restèrent pendant toute la durée de la guerre.

Pendant son séjour dans cette ville, M. Cauwes put rendre des services aux armées alliées, ce qui lui valut la Croix de Guerre (citation à l'armée) la Croix Britannique et citation civile (Officiel du 24 octobre 1919) VOIR .

 Montgelas figurera après la guerre sur une liste de personnes destinées à être jugées :

Montgelas

  • séance du 31 décembre 1914 : Nous envoyons notre meilleur souvenir à M. Durre, Conseiller municipal et Député, à M. Melin, Député, qui ont bravé les dangers d'un long voyage pour accomplir leur devoir de représentants de notre région.

 

     Il n'y a aucun détail sur la façon dont les députés ont rejoint la zone libre ; même avec une autorisation de l'occupant, impossible de tenter la traversée du front qui s'était stabilisé et fermé depuis la fin de ce qu'il est convenu d'appeler la course à la mer qui est tout à fait terminée fin octobre. Voir sur le site cartographie14-18. Il était déjà assez extraordinaire qu'Henri DURRE aît pu faire l'aller-retour en septembre-octobre.
Restent deux hypothèses :

  • passage par la Suisse comme évacué : fort peu probable en 1914 et l'occupant s'en serait vanté, et 11 jours au plus n'auraient pas suffi,
    ou
  • embarquement dans un port néerlandais (ceux de Belgique étaient occupés), ce qui suppose d'abord un passage -évidemment interdit- de la frontière.

     A noter qu'il ne s'agit pas- comme je l'ai vu écrit dans un journal de l'ouest - de se réfugier à Paris, mais bien d'y faire son devoir de député : défendre au mieux sa région occupée.

Toujours est-il qu'il participe à la session exceptionnelle du 22 décembre 1914. Celle-ci est inaugurée par deux discours qui ont eu la chance d'être enregistrés et disponibles sur Gallica (hors panne de leur serveur) :

 Celui de Paul DESCHANEL, Président de la Chambre des Députés :

deschanel



Disque 80t/mn, 2 faces d'une seule plage, cliquer sur >| pour la face B

 

Celui de René VIVIANI, Président du Conseil des Ministres.

Viviani



Disque 80t/mn, 2 faces d'une seule plage, cliquer sur >| pour la face B

 

Le 2 septembre 1916, il prononce un discours lors des funérailles de Gustave DUBLED, autre député - socialiste- du Nord (6e circonscription de Lille) décédé le 23 août 1916 à St Maur, et inhumé à Paris au cimetière de Pantin. Le député Mélin l'y accompagnait. A noter que l'épouse du député décédé était restée en zone occupée. (Merci à julienpop pour le signalement)

L'Humanité 19160903
(L'Humanité du 3 septembre 1916)

 

Le 11 avril 1917, le nom du député apparaît dans la Gazette des Ardennes n°378, le journal donnant périodiquement dans la rubrique "Nouvelles Régionales" des informations sur des personnes résidant en zone libre (civils ou militaires). Parfois pour l'annoce de décès, parfois pour signaler qu'ils sont en bonne santé (b.s.). L'origine de l'information n'est pas connue (faits divers relevés dans les journaux de France libre ?)

GdA 378

       Le député DURRE apparaît dans de nombreuses interventions et discussions reportées au Journal Officiel, certaines ayant plus particulièrement trait aux réfugiés venus des régions occupées, aux otages, aux prisonniers, aux militaires des régions envahies, ouvriers spécialisés, que leurs patrons ne peuvent réclamer, ou à caractère social, comme une proposition de loi ayant pour objet de décider que, pour les accidents du travail, les frais médicaux et pharmaceutiques seront, dans tous les cas et quelle que soit l'incapacité occasionnée par l'accident, à la charge du chef d'entreprise. En n'oubliant jamais sa région envahie :

BRN 19161104
Bulletin des réfugiés du département du Nord
04/11/1916

Huma 19180129
 L'Humanité du 29/01/1918

 

     A la 121e séance, celle du 22 octobre 1918, le Président de l'Assemblée fait une déclaration à l'ouverture :

Mes chers collègues, (...) Une affreuse nouvelle vient de nous parvenir. (MM. les députés se lèvent.) Notre collègue Durre a été tué près de Valenciennes par une balle de mitrailleuse, et notre collègue Mélin a été blessé. Ils avaient voulu à tout prix, rejoindre leurs compatriotes au premier moment de leur délivrance. Leur cœur n'avait pas assez calculé le danger.
Déjà, en pleine occupation allemande, ils avaient traversé, au péril de leur vie, les lignes ennemies pour revenir prendre place parmi nous. Et c'est à l'heure où ils allaient recueillir la récompense de leur courage qu'ils ont été frappés. L'émotion douloureuse de la Chambre sera unanime. (Applaudissements.) Durre était né à Maubeuge en 1867. Il devint voyageur de commerce. Il fut élu député de la 2e circonscription de Valenciennes en 1906.
Vous vous rappelez la part active qu'il prit à nos travaux, ses nombreuses interventions à la tribune sur des sujets très divers, le dévouement avec lequel il défendit les intérêts des populations envahies à propos des dommages, des réfugiés, des orphelins, des victimes civiles et des prisonniers de guerre.
C'était un homme de cœur. Il me disait naguère son ardente impatience de voir Maubeuge et Valenciennes enfin affranchies du joug de l'étranger. Ses concitoyens, ses électeurs seront consternés, comme nous, en apprenant cette fin tragique. Nous sommes tous auprès de sa famille en ces horribles heures. (Vifs applaudissements.) J'adresse, en votre nom, à notre collègue Mélin, sur l'état duquel nous sommes d'ailleurs rassurés tous nos vœux pour sa prompte guérison. (Applaudissements unanimes.)

     Effectivement, le pire est arrivé au Député décédé la veille, la nouvelle devait paraître dans la presse comme en témoigne le Journal des Débats à qui l'on a demandé de reporter l'annonce après celle de la Chambre. C'est Le Petit Parisien du 30 octobre qui relate les faits le plus complètement, avec le concours d'un témoin qui accompagnait les députés : M. Roger MILLOCHAU, de Lille, rédacteur au Petit Parisien.

 

Le Petit Parisien
Mercredi 30 Octobre 1918
1549e JOUR DE LA GUERRE

 

petit parisien 19181030 1


    Deux membres du Parlement, MM. Durre et Mélin, députés du Nord, ont été atteints par des balles allemandes, aux portes des Valenciennes, avant-hier matin. Le premier a été tué le second blessé. C'est au cours d'une mission qui leur était dictée par leur dévouement qu'ils ont été frappés.
Témoin du drame, je vais essayer d'en dire l'horreur.


    Nous étions partis de Paris en auto, samedi matin, et, le soir, nous arrivions près de Denain. Nous dûmes passer la nuit à Douchy parce qu'on ne pouvait passer sur les passerelles de l'Escaut que de jour. Il y avait dans la voiture MM. Durre et Mélin, députés de Valenciennes, Deffaux, industriel de cette ville, l'adjudant-chef Lévy et moi-même.

    A dix heures du matin, nous entrions dans Denain au moment de la cérémonie de la délivrance, à laquelle assistait le prince de Galles. Bientôt, le maire de Denain, M. François Lefebvre, également député de Valenciennes, vint se joindre à nous. Il nous exposa la situation douloureuse des derniers habitants restés dans des communes voisines, exposés aux bombardements et à la famine. Les trois députés résolurent de visiter les villages non évacués complètement et de prendre l'initiative de toutes les mesures nécessaires.

    L'après-midi Durre et Mélin se rendirent à Petite-Forêt, dont le maire, M. Corbeau, nous accompagnait. Nous étions à peine arrivés que des obus allemands éclatèrent à deux cents mètres. L'ennemi visait une batterie anglaise. Ce jour-là, déjà, les deux députés risquaient leur vie comme ils l'avaient risquée quelques jours auparavant à Saint-Amand. De là on gagna Raismes, Oisy et Anzin. La nuit tombait. On décida de revenir le lendemain de bonne heure.

    Avant-hier lundi, dès neuf heures et demie du matin, nous étions à Anzin. Notre auto nous déposa place de la Mairie, au coin de la rue de Saint-Amand, grande avenue menant tout droit à Valenciennes, qui n'était distante que de quelque centaines de mètres. Cette fois, il y avait Durre, Mélin, François Lefebvre, Deffaux, l'adjudant Lévy et moi. Dans Anzin c'était la ruine : maisons éventrées, intérieurs pillés dévastés. Il faisait un temps délicieux, ciel bleu, soleil clair. Le village paraissait désert et, en effet, seuls quelques rares habitants s'y trouvaient, cachés dans des caves. Un grand silence impressionnant pesait, solitude louche, inquiétante. Nos voix résonnaient comme dans une nécropole surtout celle de Durre, joyeuse, claironnante.

    Nous marchions d'abord sur le trottoir de droite, le long des façades. Mais l'amoncellement des décombres, de verre brisé nous gênait. On prit le milieu de la chaussée. En route, deux vieillards, MM.Dumoulin et Fosse, sortis de leurs cachettes et voyant passer leurs amis, s'étaient joints à nous. Ils encadraient Durre qu'ils renseignaient sur la situation. Peu à peu, en avançant tout en causant vers Valenciennes, nous nous étions fractionnés machinalement: François Lefebvre et moi en avant, à quelque trente mètres derrière, en plein milieu de la rue, Durre et ses deux interlocuteurs; puis, un peu sur la droite, Mélin et M. Deffaux. L'adjudant avançait en côtoyant les maisons, sur le trottoir de gauche.

Le drame

    Il était dix heures. Nous étions rue de Saint-Amand, tout près des premières maisons de Valenciennes, dont le faubourg prolonge, sans solution de continuité, l'agglomération d'Anzin. L'endroit où commence Valenciennes est marqué par un croisement de rues qu'on nomme la croix d'Anzin. Le carrefour ne formait plus qu'un vaste et profond entonnoir. Les Allemands en retraite, le dimanche précédent, l'avaient fait sauter à la dynamite.

petit parisien 19181030 2
[l'auteur de ce texte est à la droite de M. Lefebvre, n°6]

    Lefebvre et moi nous avançons pour nous rendre compte de la façon dont on pourrait franchir l'obstacle. Au moment précis où nous venions de nous arrêter au bord de l'excavation, une mitrailleuse allemande, que nous n'apercevions pas, entre en action. Elle était dissimulée, sans doute, dans une des premières maisons de Valenciennes. Aux premières détonations, nous croyons, Lefebvre et moi, que c'est un avion qui entame un combat. Nous levons la tête. Soudain, derrière nous, des exclamations, des pas précipités, un cri poignant. Nous nous retournons. Durre était, tombé, les bras en avant, au milieu de la rue, il tâchait de se relever. Mélin,le visage ensanglanté, était entraîné par M. Deffaux dans la direction d'où nous venions. Il y eut un mouvement instinctif chez les autres. En courant, nous allâmes nous coller contre les murailles de gauche les plus proches. Cela dura quelques secondes. Mais une voix implorante s'éleva "Venez à mon secours, ne m'abandonnez pas." Durre nous appelait : la mitrailleuse s'était tue. Nous eûmes tous trois, j'en suis sûr, le même serrement de cœur. Les mêmes mots nous vinrent aux lèvres « On ne peut pas le laisser comme cela, allons le chercher. »

    En nous avançant courbés, au ras de terre, nous parvînmes aux côtés de notre pauvre ami.
Deux de nous le prirent sous les épaules, un lui soutint les pieds. En nous traînant presque, nous pûmes le déposer dans le vestibule d'une petite maison à demi ruinée, en face de nous, 3, rue de Saint-Amand. Le couloir était si étroit que nous ne pouvions retourner notre ami. Pour que son visage ne touchât pas le carrelage, on lui soutenait la tête.
Doucement, il nous dit « Adieu, mes amis, merci, c'est fini; j'ai fait mon devoir. » Puis, il entra dans le coma. L'un de nous fouilla la maison et revint avec un traversin et un vieux coussin. Nous le portâmes alors dans une petite salle à manger attenante. On le mit sur le dos, à même le plancher. Il n'y avait pas de matelas, les Allemands ayant tout pillé, tout dévasté. On le palpa, on examina son pardessus. Il n'avait sur lui aucune tache de sang. Enfin on découvrit un petit accroc dans la région du cœur. Une autre petite déchirure à égale hauteur dans le dos marquait la sortie de la balle. MM. Dumoulin et Fosse partirent pour prendre chez eux un pansement. L'adjudant Lévy courut chercher un brancard ou de quoi en improviser un.

    Quelques minutes se passèrent. Notre ami eut un faible râle, quelques soubresauts. Le malheur était consommé. François Lefebvre sortit à son tour pour prévenir que tout secours était inutile. Le drame n'avait pas dure vingt cinq minutes.
Je restai auprès du corps.

    Au bout d'un temps qui me parut effroyablement long et qui, en réalité, avait été d'une demi-heure, le médecin-major d'un régiment écossais se présenta. Il me dit que mes compagnons avaient prévenu le poste de secours installé cinq cents mètres plus loin qui avait transmis un ordre à l'ambulance canadienne du secteur. Une auto allait venir enlever notre pauvre Durre.

    Mais, entre temps, un combat aérien s'était livré au-dessus d'Anzin. Notre chauffeur, Emile Tasselin, de la R. G. A. T., dont la limousine avait été vue, avait été attaqué à la mitrailleuse, heureusement sans être atteint. Une escadrille anglaise força l'avion ennemi à s'enfuir.
Un peu après, une douzaine d'obus se mirent à pleuvoir sur la Grand'Rue, empêchant l'auto-ambulance de passer. Ce fut un cauchemar...

    Enfin, vers onze heures et demie, le corps de Durre fut placé dans la voiture et amené à Denain.

Voilà ce que j'ai vu.
René MILLOCHAU.

     Le schéma de l'article ne tient pas compte des distances, voici les numéros reportés sur un plan d'Anzin de cette époque, la rue de St Amand ayant pris depuis le nom d'Anatole France ; la numérotation n'a pas changé, mais les maisons sont devenues commerce, et le n°3 ne se ressemble plus..

Anzin no

 

Une photographie de la rue où s'est déroulé le drame :

croix d'anzin b

    Le même Petit Parisien nous fait part le lendemain de l'inhumation à Denain, et c'est d'ailleurs dans l'état-civil de cette commune que l'acte de décès a été enregistré le jour même à 11h du matin.

petit parisien 19181031

 

     L'enterrement n'ayant pas eu lieu de façon officielle, il est décidé en 1920 que les restes seront transférés -en grande pompe- au cimetière St Roch de Valenciennes : Le journal L'HUMANITE lui consacre une colonne à la une.

 

Les obsèques officielles de Durre

---o+o---

Le transfert des restes de notre camarade a donné lieu à une émouvante cérémonie.

   C'est au milieu d'une affluence des plus considérables que l'on a procédé dimanche au transfert des restes de notre regretté camarade Henri Durre qui avait été provisoirement inhumé à Denain. L'on n'a pas encore oublié en quelles circonstances tragiques le député Valenciennois a trouvé la mort.
[... l'auteur rappelle les événements décrits plus haut ...]
La cérémonie d'hier avait été organisée à l'occasion du transfert des restes de Durre à Valenciennes.
Une assistance des plus considérables dans laquelle figuraient des délégations de tous les groupements socialistes et de toutes les organisations syndicales ainsi que les principaux élus du Parti, assistaient à la cérémonie.
Au cimetière de Valenciennes, ou a eu lieu l'inhumation définitive, des discours d'une profonde émotion furent prononcés par Ernest Saint-Venant [les noms varient Saint-Revenard à Stiévenard] au nom du conseil municipal, [Louis] Blemant au nom de la section socialiste de Valenciennes, Lebas [Jean-Baptiste, député-maire de Roubaix] au nom du groupe parlementaire, [Olivier] Deguise député de l'Aisne, et par MM. Lauwereyns [Dr] au nom du conseil général et le sous-préfet Lachazen.
R.F.

     D'autres journaux, comme le Temps citent aussi Ernest Couteaux, député du Nord ; Le Gaulois évalue "une foule de 30 à 40,000 personnes"

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photo des funérailles

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     Sa tombe, dont la stèle est l'oeuvre du sculpteur Valenciennois Felix Desruelles, au cimetière St Roch ; la dernière des trois Moires (ou Parques pour les romains) Atropos, représentée ici comme une vieille femme, coupe le fil de la vie après que Lachésis ait déroulé ce qu'avait tissé Clotho. Le hibou est l'interpète d'Atropos.

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Un buste mortuaire du député est posé sur sa tombe :

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  • En novembre 1921, un cargo charbonnier de 6500 tonnes, de type Marie-Louise, sortira des chantiers navals de Caen et portera le nom de "Député Henri Durre".

  • Le 20 février 1924, le Journal Officiel publie le décret d'attribution de la médaille de la Reconnaissance française de première classe (Vermeil) à MM DURRE et MELIN.

    MRF Durre Melin

  • Voir également sur ce même blog la page consacrée à la médaille de la Reconnaissance française.

  • A noter : Henri DURRE n'a pas été reconnu Mort pour la France.

    . .

  • Le 3 novembre 1918, soit le lendemain de la libération de Valenciennes, parait dans "Le petit journal" du parti social français, l'article ci-dessous concernant le député Mélin :

    Le_Petit_journal

 


Sources
Gallica: Journaux d'époque numérisés;
Bibliothèque municipale de Valenciennes ;
Base de données des députés ;
René Delame : "Valenciennes Occupation allemande 1914-1918. Faits de guerre et souvenirs" Hollande & Fils ed. 1933 ;
Documents personnels.

 

 

7 mars 2016

Après l'armistice...

 

    On voit souvent (surtout en cette période du Centenaire) les scènes de liesse de l'armistice, mais ce qui est très largement passé sous silence, c'est qu'une fois l'allégresse retombée, les conditions matérielles étaient les mêmes que celles de l'avant-veille : restrictions, pour une longue période encore, mais surtout, pour les territoires occupés, qu'ils soient ou non sur la ligne de front, les destructions, par fait de guerre ou par un occupant furieux d'avoir à quitter les lieux et qui rentrait dans un pays qui n'avait pas été envahi.

     En janvier 1919, Lucien Hector JONAS, né le 8/04/1880 au 213 avenue Anatole France à Anzin revient dans sa ville natale, lui qui a si souvent parcouru le front en tant que "Peintre militaire attaché au musée de l'Armée". Se doutait-il de l'état de la cité ?  L'émotion va le pousser à écrire le texte qui suit, empreint du style de l'époque.

Je n'ai pas retrouvé la trace exacte des personnages principaux, peut-être l'auteur a-t-il voulu cacher une identité trop précise (j'y reviens ensuite) mais les lieux et les conditions de vie sont bien réelles, aussi ai-je illustré le texte d'imagettes à cliquer pour en montrer la réalité, alors qu'une courte explication apparaît en survolant les parties en italique souligné :


Le Calvaire de Zélie Goniaux d’Anzin


     Le 2 août 1914, son mari Théophile Goniaux, chef porion à la fosse Thiers,
fosse thiers l'avait laissée à Anzin avec ses deux bébés pour aller rejoindre le 327° qui partit vers Namur. Le 24 août, les Boches entraient dans la ville.
Comme la petite maison de Zélie, située à l'entrée du coron, était coquette, un feldwebel de la Kommandantur s’y installa en maître. Pour fuir cette domination et pour nourrir ses petits, elle entra chez M. Darphin, l’ingénieur en chef des travaux du jour, afin d'y faire le ménage.

     Elle souffrit beaucoup d’être séparée de son homme. Elle pensa mourir en apprenant par son frère prisonnier, qu'il était mort, réduit en bouillie avec la moitié de sa section à Berry-au-Bac. Elle vécut cependant pour les mioches, avec  l'espoir d'aller prier avec eux devant sa croix de bois qu'elle rêvait auréolée de fleurs.

Combien le temps lui parut long jusqu'en août 1918 !

     A l’heure de la débâcle, le sous-officier déménagea précipitamment, emportant des bibelots de famille et tout le linge de la maison… et aussi les six couverts en argent que lui avait donnés M. Daubresse, l’ingénieur de la fosse Thiers, le jour de son mariage.

     En octobre, elle fut évacuée avec toute la population et elle emmena dans une brouette la petite Lydie, qui venait d’avoir cinq ans et souffrait d’un gros rhume, deux casseroles en cuivre et sa dernière couverture. Le petit Nestor, âgé de six ans, portait une caisse remplie de farine et de riz, donnée par le comité de ravitaillement américain.
Après avoir traversé Valenciennes, elle marcha sur le pavé de la route de Mons.
En se retournant près de Saint-Saulve, elle vit s’effondrer le clocher de l’église
Anzin eglise 1918 où elle fut baptisée, où elle fit sa première communion, où elle fut unie à son Théophile, où elle porta ses enfants pour le baptême par des jours ensoleillés.

Le temps lui sembla plus long encore pendant son exil à Boussu, en Belgique.

A la fin de Novembre, elle revint à Anzin. croix anzin 1918
     Avec émotion, elle revit les maisons démolies sur la grand’route
croix anzin 1918 droit, les rails des tramways sautés et tordus vers le ciel rails tordus, la mairie criblée d’obus, perforée et branlante Anzin mairie 1918, l’église effondrée eglise 14-18 b… et le cimetière labouré d’éclats. La tombe de son père était éventrée… Elle se jeta dans le trou béant comme pour le boucher de son corps…  les pleurs et les cris de ses enfants l’obligèrent se relever et à poursuivre son chemin de croix.

     Elle longea le long coron blessé, couché sur le trottoir de la route, et avec angoisse aperçut, tout au bout, sa maison ajourée comme une valenciennes. Elle entra : c’était affreux. La pluie, par le plafond troué, pénétrait dans la pièce qui servait de salon et de salle à manger… Dans la chambre à coucher, elle ne trouva qu’une chaise d’enfant, à laquelle il manquait un pied, et un petit soulier de la poupée de Lydie.

     Elle s’effondra… ses enfants se rapprochèrent d’elle… et, serrés l’un contre l’autre, ils se mirent à pleurer…dans le grand silence de la ville dévastée, où, jadis, résonnaient les trains de laminoirs et les marteaux-pilons.

…Quand je suis allé là-bas, je les ai vu tous les trois, dans la même pièce basse, donnant sur la cour… la seule pièce dont les murs soient encore solides et dont le plafond constitue un abri.
Les deux enfants étaient couchés sur de la paille, en plein jour, recouverts de loques et de vieux vêtements pour souffrir moins du froid et de l'humidité... car ils n'ont plus rien à se mettre sur le dos... ils n'ont plus de chaussures.. ils sont amaigris et rapetissés par la fièvre, tandis que leurs yeux sont agrandis par l’épouvante et par la fatigue.

     Près d'eux, veillant avec anxiété, assise sur un volet placé sur deux caisses, leur maman, résignée, les regarde dormir, les recouvre quand ils remuent, ôte son châle pour les mieux protéger quand ils toussent et ne pouvant rien faire pour les soulager, pleure tout doucement ou se tord les bras de désespoir.

     Tous qui, comme moi, dormez sur un bon matelas bourré de laine, dans une chambre tiède, je vous en supplie, ayez pitié de Zélie et de ses enfants, ayez pitié de ses sœurs, de tous les petits Nestor, de toutes les petites Lydie, et donnez-leur des couvertures, des vêtements, du linge et des bottines!

Songez qu'à Anzin, la cité du charbon, des femmes et des enfants peuvent mourir de froid, parce que les Boches avant de partir ont noyé les galeries des fosses, fait sauter le cuvelage et le moulinage; des mines et abattu le chevalet métallique, cet élégant et haut beffroi des communes noires.

 

     Je n'ai pas trouvé Théophile Goniaux Soldat du 327e RI mort pour la France, mais GONIAUX Jean-Baptiste, du 127e RI mort pour la France le 5 mars 1915. Mineur également, né à Denain et résidant à Escaudain. L'hôpital temporaire n°17 était situé dans les locaux du collège municipal, rue du Collège à Châlons-sur-Marne (actuelle rue du lycée à Châlons en Champagne).

collége CsM

 


 

Sa fiche sur le site Mémoire des Hommes :
GONIAUX JB MDH

     Blessé par une grenade allemande le 1er mars 1915, il sera cité à l'ordre du régiment et décoré de la Croix de Guerre le 8 avril 1915.

    Ce n'est pas LE Théophile de Zélie, mais son parcours est extrêmement proche, il est probable que l'auteur a condensé plusieurs personnages, sans pour autant trahir la vérité.

     La rue Lécaillez n'est pas celle du récit : qualifiée de "plus éprouvée de la guerre", elle permet de mieux appréhender le désarroi des habitants. :

ANZIN la rue lecaillez t&n
(cpa perso et vue Google)

 

 

  

7 février 2016

Les fusillés du valenciennois

 

     Même si l'expression "du valenciennois" peut paraître réductrice, ils ont tous un lien avec notre ville : la plaque du monument aux morts de Valenciennes qui les recense ne cite que les noms, en voici les détails avec, sous leur nom, un lien vers la page qui leur est consacrée.

 

 

 

 

DELBECQUE Augustin Curé de Maing (Nord).  Né à Lillers (Pas-de-Calais) le 02/11/1868.     Fusillé à Valenciennes au Faubourg de Paris le 17/09/1914 pour espionnage en revenant de Dunkerque
 
CAZER Hérasse  Verrier à Aniche (Nord)  Né à Aniche (Nord)  le 01/03/1855.     Fusillé à Valenciennes près du cimetière St Jean le 25/09/1914 accusé d'avoir tiré sur des soldats allemands
 
LEGEL Léon  "de Lourches"       Fusillé à Valenciennes près du cimetière St Jean le 25/09/1914 accusé d'avoir tiré sur des soldats allemands
 
CANONNE Alfred  Cultivateur, domicilié à Ors, rue de Landrecies (Nord).  Né à Honnechy (Nord) le 15/05/1856.      Fusillé à Valenciennes au Rôleur le 16/10/1917, pour avoir tenté de faire parvenir des nouvelles, par pigeon voyageur, aux troupes françaises.
 
COTTEAU Edmond  Menuisier à Ors (Nord).  Né à Honnechy (Nord) le 03/03/1884.     Fusillé à Valenciennes au Rôleur le 16/10/1917, pour avoir tenté de faire parvenir des nouvelles, par pigeon voyageur, aux troupes françaises.
 
HERBAUX Victor Meunier, domicilié à Valenciennes, faubourg de Paris, Chemin Latéral.  Né à Lille le 07/01/1882.      Fusillé au Rôleur à Valenciennes le 16/10/1917 pour avoir atterri par moyen d'un ballon libre derrière nos lignes, dans l'intention de faire de l'espionnage.
 
LEGRAND Henri Instituteur, évacué ;
en exercice à l'Ecole primaire supérieure de Valenciennes.
 Né à Quesnoy-s-Deule (Nord) le 07/02/1885.     Fusillé au Rôleur à Valenciennes le 23/02/1918 à 7 h 15 du matin, pour espionnage par pigeon voyageur.
 
BEAUVOIS Nicolas Tisserand, demeurant à Rieux (Nord).  Né à Rieux en Cambrésis (Nord) le 04/06/1854.     Fusillé au Rôleur à Valenciennes le 23/02/1918 à 7 h 15 du matin, pour espionnage par pigeon voyageur.
 
THUILLIEZ Pierre Employé communal, demeurant à Rieux (Nord).  Né à Carnières (Nord) le 01/11/1870.     Fusillé au Rôleur à Valenciennes le 23/02/1918 à 7 h 15 du matin, pour espionnage par pigeon voyageur.
 
MOHR Jules Inspecteur d'assurances à Valenciennes.  Né à Ham (Somme) le 06/12/1858.

    Fusillé au "Tir National" à Bruxelles (B) le 19/04/1916 pour espionnage.
 

GRESSIER Emile Cantonnier-chef à St-Amand-les-Eaux (Nord).  Né à Sars-et-Rosières (Nord) le 13/07/1860.     Fusillé au "Tir National" à Bruxelles (B) le 19/04/1916 pour espionnage.
 
PAGNIEN Alfred Ingénieur, résidant à Valenciennes.  Né à Valenciennes le 28/06/1878.     Fusillé à Gand (B) le 23/03/1918 pour espionnage.
       

 

     Comme on pourra le constater à la lecture de chacune des pages qui leur est consacrée, il n'ont pas été les seuls à être fusillés. Français, Belges ou Britanniques, certains avaient simplement "tenté" de servir leur pays, d'autres avaient mis au point de véritables réseaux d'espionnage, le plus souvent en liaison avec les services britanniques, ou des filières d'évasion vers les Pays-Bas.

        De nombreux noms dont j'ai traité le cas figurent aux monuments de Condé-sur-l'Escaut, Estreux ou St-Amand-les-Eaux par exemple : voir le sommaire.

 

      Les archives royales de Belgique signalent avec les fusillés dont elles rappellent la liste deux civils qui ont été condamnées à de lourdes peines de prison pour espionnage ou aide au passage de la frontière :

condamnés

DREYFUS Léon et LIENARD Albert : 10 ans de travaux forcés.

 

 

 

24 août 2015

Evacués de Valenciennes

      La Bibliothèque Nationale de France, a mis en ligne sur son site Gallica 21 listes de noms de personnes du département du Nord évacuées en zone libre, ainsi que leur destination ; ces listes ont été publiées en 6 fascicules par la Direction de la Sûreté Générale.

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     Le premier de ces volumes (listes 1 à 3) a été imprimé en Octobre 1914, le dernier en Janvier 1915. Il s'agissait non seulement de tenir à jour le flux des personnes déplacées, à cette date fuyant l'arrivée de l'ennemi, que de découvrir d'éventuels espions parmi les réfugiés. La publication des listes -par voie de presse ?- devait permettre de renseigner les familles, pour autant qu'elles aient accès aux documents !

     On trouvera ci-dessous :

  • Une carte reflétant la situation,
  • Les 519 noms d'habitants de Valenciennes, relevés dans ces listes,
  • La liste des départements d'accueil.

Voir aussi  : Listes d'évacués du Nord

   

clic-droit & afficher l'image

   

Evacués de VALENCIENNES (données OCR relues et corrigées)

Liste n°
Nom Prénom Inscrit à Département
3 ADAM Victor Saint-Brieuc Côtes-du-Nord
16 ANDRÉ Joseph Rezé Loire-Inférieure
13 ARMAND Mme Fleury-les-Aubrais Loiret
13 BABAUS Georges Gros-Chastang Corrèze
10 BACQUET Antoine Paris Seine
3 BAGET Albert Saint-Brieuc Côtes-du-Nord
1 BALLAGUY Jeanne Lyon Rhône
5 BARBET Lucien Carbon-Blanc Gironde
16 BARÉ Marthe Rezé Loire-Inférieure
14 BARÉ Mme Le Mans Sarthe
1 BARON Denise Saint-Valery-en-Caux Seine-Inférieure
1 BASQUIN François Givors Rhône
1 BASQUIN M. Givors Rhône
1 BASQUIN M. Givors Rhône
1 BASQUIN M. Givors Rhône
1 BASQUIN M. Givors Rhône
1 BASQUIN Mme Givors Rhône
1 BASSELIER Anatole Givors Rhône
1 BASSELIER Angèle Givors Rhône
1 BASSELIER M. Givors Rhône
6 BAUDE Alphonse Mauzé-sur-le-Mignon Deux-Sèvres
6 BAUDE Desirée Mauzé-sur-le-Mignon Deux-Sèvres
14 BEC Aurélie Riom Puy-de-Dôme
4 BELLER Gaston Saint-Malo Ille-et-Vilaine
19 BERICHARD Jules Rouen Seine-Inférieure
8 BERLIOT Augustin Saint-Etienne Loire
16 BERNARD Léon Villeneuve-du-Passage Ariège
4 BERTIN Lucienne Villaines-en-Duesmois Côte-d'Or
13 BERTOLOTTI Pierre-Alexandre Gros-Chastang Corrèze
1 BESLEVEFF Eléazar Saint-Marcel Aude
6 BESNIER François Mauzé-sur-le-Mignon Deux-Sèvres
6 BESNIER Gabrielle Mauzé-sur-le-Mignon Deux-Sèvres
19 BESSON Léon Léguilhac-de-l'Auche Dordogne
9 BESSON Léon Saint-Crépin-d'Auberoche Dordogne
9 BESSON Louis Châteauneuf Charente
1 BETOURBE Léon Saint-Senier-sous-Avranches Manche
1 BEUKELAER Adrienne Saint-Valery-en-Caux Seine-Inférieure
1 BIÈVE Marie de Saint-Valery-en-Caux Seine-Inférieure
10 BIGORNE Alcide Paris Seine
6 BLANQUART Maurice Angers Maine-et-Loire
1 BLANQUET Pierre Palegry Pyrénées-Orientales
19 BLAS Pierre Rouen Seine-Inférieure
17 BOISSEAUX Alphonse Lunas Hérault
15 BONDUL Charles Marseille Bouches-du-Rhône
10 BONFIL Gaston Paris Seine
13 BOQUET Henri Cordemais Loire-Inférieure
5 BOQUET Hippolyte Landiras Gironde
10 BOQUET Rémy Bordeaux Gironde
15 BOQUET Rémy Bordeaux Gironde
4 BOQUET Rémy Chalais Charente
9 BOQUET Rémy Chalais Charente
10 BOTTIAUX Alphonse Mirepoix Haute-Garonne
16 BOUCHER Alexander Saint-Etienne Loire
16 BOUCK Pierre Saint-Etienne Loire
9 BOUILLEZ César Nieuil Charente
10 BOUILLON Michel Paris Seine
15 BOULANGER Armand Fouquerolles Oise
15 BOULET Nicolie Arcachon Gironde
10 BOURGEOIS Alexandre Bordeaux Gironde
19 BOURGEOIS Alexandre Bordeaux Gironde
19 BOURGEOIS Elise Bordeaux Gironde
8 BOURNOVILLE Jules Luc-sur-Mer Calvados
10 BOUTTMAN Arthur Tarascon Ariège
5 BROCHARD Jules Lauvollon Côtes-du-Nord
5 BROCHARD Léa Lauvollon Côtes-du-Nord
5 BROCHARD Léa Lauvollon Côtes-du-Nord
8 BRULANT Jules Saint-Etienne Loire
15 BUCAT Henri Nevers Nièvre
15 BUCAT Jean Nevers Nièvre
16 BUREAU Jules Rive-de-Gier Loire
14 BURY Mme Le Mans Sarthe
19 BUSCHMAN Suzanne Pontoise Seine-et-Oise
19 CABOCHE - Rouen Seine-Inférieure
21 CACHEUX Elie Trouville Calvados
21 CACHEUX Elie Trouville Calvados
21 CACHEUX Virginie Trouville Calvados
10 CAHEN-LECOQ Albert Libourne Gironde
10 CAILLIEZ Arthur Le Tremblay Ille-et-Vilaine
5 CALDAGUÈ Louis Houillères Loire
18 CARDOU Marie Tours Indre-et-Loire
19 CARLIER Jean-Baptiste Rouen Seine-Inférieure
13 CARRIER Nestor Belligué Loire-Inférieure
6 CARTON Rene Agen Lot-et-Garonne
16 CAVÉ-DELACOURT - Rezé Loire-Inférieure
1 CESLIK Wawezguer Saint-Etienne Loire
13 CHARPENTIER Clément Cordemais Loire-Inférieure
16 CHAUD Paul Saint-Etienne Loire
20 CHAVIALLE Marceau Châteauponsac Haute-Vienne
10 CHRISTOPHE Marcellin Paris Seine
19 CLARIN Eugène Bordeaux Gironde
19 CLÉMENT Désiré Rouen Seine-Inférieure
1 COLDRE Elise Sancerre Cher
1 COLDRE Georges Sancerre Cher
1 COLDRE Georges Sancerre Cher
1 COLDRE Jeanne Sancerre Cher
1 COLDRE Marguerite Sancerre Cher
1 COLDRE Marie Sancerre Cher
1 COLDRE Valentine Sancerre Cher
1 COLIN César Martin-Eglise Seine-Inférieure
8 COLLENGE Fernand Saint-Etienne Loire
10 COLLEZ Léon Saint-Ouen-la-Rouerie Ille-et-Vilaine
19 COLPART Maurice Lapalisse Allier
12 COMPAGNO François Saint-Etienne Loire
8 COMPAGNON François Saint-Etienne Loire
9 COQUELET Berthe Tours Indre-et-Loire
5 CORDIER Joseph Saint-Aaron Côtes-du-Nord
8 CORNIL Alfred Saint-Etienne Loire
19 CORNU Auguste Rouen Seine-Inférieure
9 COTTÈRE François Quettreville Manche
15 COUTEAU César Trignac Loire-Inférieure
19 CRÉPEAUX Adèle St-Germain-en-Laye Seine-et-Oise
20 CRETEUR Albert La Jonchère Haute-Vienne
9 CRETEUR Marcel Angoulême Charente
4 CRÉTEUR Marcel Angoulême Charente
1 DANGRÉAUX Léa Tours Indre-et-Loire
8 DANJON Ludovic Moutonneau Charente
3 DARRAS Marcel Saint-Brieuc Côtes-du-Nord
4 DASSONVILLE Antoinette Saint-Malo Ille-et-Vilaine
4 DASSONVILLE Guy Saint-Malo Ille-et-Vilaine
4 DASSONVILLE Paul Saint-Malo Ille-et-Vilaine
10 DAUPHIN Desire La Chapelle-Saint-Laurent Deux-Sèvres
10 DAUVILLERS Jean Paris Seine
8 DEBLECQ Jules Mazières Charente
8 DECARPINI Jean-Baptiste Saint-Etienne Loire
1 DECRAUX Gaston Saint-Jacques Calvados
14 DEDON Modeste Saint-Anthème Puy-de-Dôme
1 DEGAY Marie Veigné Indre-et-Loire
13 DEHAVAY Gérard Mazères Haute-Garonne
10 DEHAVAY Girard Mazères-du-Salat Ariège
17 DEHONT Pierre Cruzy Hérault
19 DEJODE Arthur Rouen Seine-Inférieure
6 DELAME Anne-Marie Saint-Maxire Deux-Sèvres
7 DELANNAY Paul Pionnat Creuse
17 DELAYE Marie Senozan Saône-et-Loire
17 DELAYE Sabine Senozan Saône-et-Loire
3 DELBECQ François Saint-Brieuc Côtes-du-Nord
16 DELBECQ Gaston Salles-Lavauguyon Haute-Vienne
17 DELCAMBRE Michel L'Ille-d'Elle Vendée
16 DELCEUW Félix Illiers Eure-et-Loir
6 DÉLÉCLUSE Albert Barillac Hautes-Pyrénées
19 DELETTRE Abel Rouen Seine-Inférieure
19 DELFORGE Emile Rouen Seine-Inférieure
19 DELPIERRE Alexandre Rouen Seine-Inférieure
10 DELPLACE Leon Jurançon Basses-Pyrénées
10 DELPLACE Marguerite Jurançon Basses-Pyrénées
18 DELSARTE Théophile Tulle Corrèze
3 DELSAUT Adolphe Pessac Gironde
8 DELSAUT Robert Chantrezac Charente
19 DELSAUT-NICODÈME Adolphe Bordeaux Gironde
19 DEMICHY Alex Le Donjon Allier
8 DEMICHY Espérance Marseille Bouches-du-Rhône
19 DEMICHY Espérance Saint-Clément Allier
19 DEMONT Augustin Rouen Seine-Inférieure
1 DENIS Louis Givors Rhône
1 DENIS Mme Givors Rhône
19 DEPINON Victor St-Germain-en-Laye Seine-et-Oise
21 DÉPRET Henri Loge-Fougereuse Vendée
1 DEQUENNE Marie Misy-sur-Yonne Seine-et-Marne
8 DESCAMPS Eugene Saint-Angeau Charente
19 DESCAMPS Jules Rouen Seine-Inférieure
19 DESCARPENTRIE Olympe Argenteuil Seine-et-Oise
10 DESCARPENTRIER Edmond La Chapelle-Saint-Laurent Deux-Sèvres
8 DESTATTE Charles Champniers Charente
4 DESVATTE Charles Champniers Charente
13 DETOURBE Jules Trignac Loire-Inférieure
13 DEVALLEZ Henri Montceau-les-Mines Saône-et-Loire
14 DEVEMY Justine Le Mans Sarthe
10 DEWILDE Philémon Paris Seine
6 DIEU Louise Chartres Eure-et-Loir
6 DIEU Madeleine Chartres Eure-et-Loir
1 DONABIN Alice Cosne Nièvre
4 DOR Jules Chalais Charente
8 DOR Jules Chalais Charente
1 DOTTEL André Loiron Mayenne
8 DOUCHEMENT Théodule Saint-Etienne Loire
17 DOYE Victor Tressan Hérault
20 DRECQ Joseph Bersac Haute-Vienne
10 DRUCHAERT Emile Paris Seine
14 DRUESNE Alphonse Garrey Landes
10 DRUIN Philippe Paris Seine
14 DUEZ Maurice Grazac Tarn
21 DUFONT Louis Orléans Loiret
19 DUHEM Victor Labets-Biscay Basses-Pyrénées
19 DUMONT Hilaire Arfeuilles Allier
10 DUPONT Gaston Paris Seine
6 DUPONT Madeleine Saint-Maxire Deux-Sèvres
1 DUPONT Mme Saint-Jacques Calvados
10 DUPRÈS Julien Paris Seine
14 DURANT François Aiguefonde Tarn
13 DUSSOT Clément Trignac Loire-Inférieure
5 DUSSUEL François Landiras Gironde
3 DUTERNE Henry Saint-Brieuc Côtes-du-Nord
2 DUVAL Jeanne Laval Mayenne
8 DUVIVIER Jules Les Loges-sur-Brécey Manche
10 EBÉRARD Marcel Paris Seine
10 EBÉRARD Marcel Paris Seine
1 ELALDIEFF Alexandre Saint-Marcel Aude
6 ENESE Carolus Saint-Pierre-de-Clairac Lot-et-Garonne
1 ETRUIN Joséphine Saint-Valery-en-Caux Seine-Inférieure
3 EVE André Saint-Brieuc Côtes-du-Nord
19 EVRARD Georges Varennes-sur-Allier Allier
1 FARINEAU Estelle Planchez Nièvre
1 FAUX Joseph Blismes Nièvre
6 FIÉVET Hubert Luçay-le-Mâle Indre
6 FLANDROY Arthur Angers Maine-et-Loire
9 FLAUTIGNIE Charles Goudeville Charente
8 FONTAINE François Dignac Charente
15 FORESTIER Henri Orléans Loiret
6 FOSSE Adolphe Tessy-sur-Vire Manche
8 FOSSE Adolphe Tessy-sur-Vire Manche
10 FOSSES Gérard Rimoux Ille-et-Vilaine
1 FOUQUE Elisabeth Cosne Nièvre
5 FOUQUET Henri Saint-Etienne Loire
1 FOURNEAUX Marguerite Saint-Jacques Calvados
15 FRANÇOIS Emile Parthenay Deux-Sèvres
8 FRANQUARD Charles Roumazières Charente
13 FRANROIS Alfred L'Eglise aux-Bois Corrèze
18 FRAUGUEVILLE Juliette Tours Indre-et-Loire
9 FRÉMONT Emile Macey Manche
10 FRISON Jules Paris Seine
15 FROISSART Xavier Nevers Nièvre
1 FROMONT Elodie Rennes Ille-et-Vilaine
15 GABET Charles Cordemais Loire-Inférieure
15 GABET Emile Orléans Loiret
12 GADÈNE Augustin Saint-Etienne Loire
3 GALEY Fernand Naucelle Aveyron
3 GALEY Georges Naucelle Aveyron
3 GALEY Louise Naucelle Aveyron
6 GELEZ Jean-Baptiste Hères Hautes-Pyrénées
21 GERARD Clement Brive Corrèze
14 GERBER Antoine Rouen Seine-Inférieure
1 GIARD Lucy Veulettes Seine-Inférieure
19 GLINEUR Félix Sainte-Trie Dordogne
17 GLINEUR Félix Saint-Trié Dordogne
1 GOBRON Edouard Veigné Indre-et-Loire
1 GOBRON Edouard Veigné Indre-et-Loire
1 GOBRON Georgina Veigné Indre-et-Loire
19 GODEFROY Georges Nousty Basses-Pyrénées
10 GOUBERT Auguste Auzat Ariège
1 GOUBET Amélie Damgan Morbihan
1 GOUBET Gaston Damgan Morbihan
1 GOUBET Guy Damgan Morbihan
1 GOUBET Louis Damgan Morbihan
1 GOURTELSIVILI Vassile Saint-Marcel Aude
10 HARDY Louis Bordeaux Gironde
15 HARDY Louis Bordeaux Gironde
4 HARDY Louis Chalais Charente
11 HARDY Louis Chalais Charente
5 HARDY Louis Landiras Gironde
21 HAUDIN Calixte Brive Corrèze
9 HÉBERT Louis Montmartin-sur-Mer Manche
10 HELOUIN Léon Saint-Ouen-la-Rouerie Ille-et-Vilaine
16 HELOUIS Léon Versailles Seine-et-Oise
12 HÉLOUIS Léon Mans Sarthe
10 HENETZKO Berthe Pau Basses-Pyrénées
19 HERBAULT Virginie Langy Allier
19 HERBIN Florimond St-Germain-en-Laye Seine-et-Oise
15 HERDEWING Pierre Marseille Bouches-du-Rhône
6 HEUSDENS Félix Tessy-sur-Vire Manche
8 HEUSDENS Félix Tessy-sur-Vire Manche
12 HOHWEILLER Emile Saint-Etienne Loire
3 HOTMAN Léon Saint-Brieuc Côtes-du-Nord
13 HOURDEQUIN Andre Belleville-sur-Vie Vendée
4 HUARD Ernest Fleury-les-Aubrais Loiret
4 HUARD Fernand Fleury-les-Aubrais Loiret
4 HUART Aimée Fleury-les-Aubrais Loiret
4 HUART Camille Fleury-les-Aubrais Loiret
7 HUBERT Charles La Chapelle-en-Juger Manche
6 HUBIN Charles Percy Manche
1 HUYBERECHTE Jean-Baptiste Crozon Finistère
7 ISAÏE Jacques La Chapelle-en-Juger Manche
16 JACOBS-GIARD Claire Bessancourt Seine-et-Oise
4 JAGU Alfred Chalais Charente
11 JAGU Alfred Chalais Charente
6 JAQUAZ Félix La Motte-d'Aveillans Isère
10 JENNELLE Charles Paris Seine
13 JOBEZ Pierre Bruère Cher
1 JOBEZ Pierre Noulac Cher
13 JORION Clément Montceau-les-Mines Saône-et-Loire
1 JOYEZ Angelique La Flèche Sarthe
1 JOYEZ Joseph La Flèche Sarthe
14 LADRIÈRE Jules Châtellerault Vienne
9 LAGANE Pierre Quettreville Manche
10 LAINÉ Arthur Romagné Ille-et-Vilaine
19 LALOUX André Pontoise Seine-et-Oise
19 LALOUX Claire Pontoise Seine-et-Oise
19 LALOUX Elisabeth Pontoise Seine-et-Oise
19 LALOUX Jacques Pontoise Seine-et-Oise
3 LAMBERT Alina Saint-Nicolas-d'Aliermont Seine-Inférieure
3 LAMBERT Gustave Saint-Nicolas-d'Aliermont Seine-Inférieure
1 LAMBERT Suzanne La Chapelle-Erbrée Ille-et-Vilaine
19 LAMOTTE Christian Royan Charente-Inférieure
19 LAMOTTE Marie Royan Charente-Inférieure
10 LAMPAERT Albert Gan Basses-Pyrénées
14 LANCEL Marcel Aiguefonde Tarn
20 LANCELLE Félix Châlus Haute-Vienne
1 LANCERAUX Léon Challuy Nièvre
4 LANCERAUX Léon Nice Alpes-Maritimes
8 LANCEREAUX Léon Villars Alpes-Maritimes
6 LAROOZE Omer Pont-du-Casse Lot-et-Garonne
6 LASSALLE Paule Niort Deux-Sèvres
9 LAUSMAN Alphonse Saint-Urcisse Tarn
19 LEBEL Jeanne Royan Charente-Inférieure
10 LEBON Fernand La Bastide-du-Salat Ariège
19 LECHEF Alphonse Rouen Seine-Inférieure
1 LÉCHÉVIN Georgina Landivisiau Finistère
7 LECLERCQ Francois Pionnat Creuse
10 LECOMTE Alexandre Vic-Bigorre Hautes-Pyrénées
16 LECOMTE Louise Versailles Seine-et-Oise
17 LÉCU Achille Mareuil-sur-Lay Vendée
16 LEDENT Henri Billom Puy-de-Dôme
9 LEDIN Henri Gavray Manche
14 LEDUC Auguste Riom Puy-de-Dôme
8 LEDUC Palmyre Huisnes Manche
6 LEDUC Victor Lurcy-Levy Allier
13 LEFAUX Auguste Fleury-les-Aubrais Loiret
13 LEFAUX Auguste Fleury-les-Aubrais Loiret
13 LEFAUX Eugène Fleury-les-Aubrais Loiret
13 LEFAUX Hippolyte Fleury-les-Aubrais Loiret
13 LEFAUX Jules Fleury-les-Aubrais Loiret
13 LEFAUX Léon Fleury-les-Aubrais Loiret
19 LEFÈVRE Auguste Commentry Allier
19 LEFÈVRE François Montluçon Allier
16 LEFÈVRE François Versailles Seine-et-Oise
6 LEGAY Germain Levroux Indre
10 LEHUT Anicet La Chapelle-Saint-Laurent Deux-Sèvres
13 LELEU Jules Blancafort Cher
19 LELIM Jules Guiche Basses-Pyrénées
10 LEMAIRE Hubert Betchat Ariège
19 LEMAIRE Louise Rouen Seine-Inférieure
1 LEMAIRE Louise Saint-Jacques Calvados
14 LENGRAND Henri Rouen Seine-Inférieure
16 LENNE Cécile Saint-Cloud Seine-et-Oise
11 LEPOPE Edouard Saint-Simeux Charente
16 LERAT Marie Montgeron Seine-et-Oise
16 LERNOND Alphonse Versailles Seine-et-Oise
19 LERNOUD Alphonse Montluçon Allier
19 LERNOUD Alphonse Montluçon Allier
14 LEROY Elie Saint-Étienne Loire
14 LESCOT Philippe Saint-Étienne Loire
18 LESPÈCE Jeanne Tours Indre-et-Loire
10 LEVERO Camille Paris Seine
1 LICOT Louis Saint-Senier-sous-Avranche Manche
13 LIONET Louis Saint-Etienne Loire
16 MAILLARD Julia Bessancourt Seine-et-Oise
1 MAIQUET Elise Xaintrailles Lot-et-Garonne
13 MALAKUIN Emile Mirepoix Haute-Garonne
4 MALIET Charles Champniers Charente
11 MALIET Charles Champniers Charente
10 MANEZ Jules La Chapelle-Saint-Laurent Deux-Sèvres
3 MARC Yvonne Yport Seine-Inférieure
3 MARCHAL Lucien Liré Maine-et-Loire
3 MARCHAL Lucienne Liré Maine-et-Loire
3 MARCHAL Marie Lire Maine-et-Loire
10 MARCHAND Gontran Paris Seine
10 MARIÉ Raoul Paris Seine
4 MARIEZ Marcel Nevers Nièvre
1 MARIEZ Marcel Roanne Loire
19 MARLIER Edmond Saint-Etienne Loire
19 MARQUER Pierre Argenteuil Seine-et-Oise
10 MARTENOIS Alphonse Paris Seine
19 MARTIN Emile Bordeaux Gironde
19 MARTIN Emilie Bordeaux Gironde
10 MARTINOIS Jules Paris Seine
8 MASSÉ Georges Saint-Etienne Loire
9 MAZURE Léon Gavray Manche
4 MENLENHOF Raymond Chalais Charente
14 MERESSE Henri Saint-Étienne Loire
10 MÉRIAUX Barthélémy Arthon-en-retz Loire-Inférieure
5 MERLIN Henri Meulan Seine-et-Oise
11 MEULENHOFF Raymond Chalais Charente
9 MEULIEZ-PIÉRARD Léon Niort Deux-Sèvres
11 MEUNIER Félix La Rochelle Charente-Inférieure
6 MICHOTTE Emile Tessy-sur-Vire Manche
8 MIHOTTE Emile Tessy-sur-Vire Manche
12 MONIER Joseph Cazes-Mondenard Tarn-et-Garonne
5 MONNERAY Julien Landiras Gironde
1 MONNEREY Julien Aubie-Espessas Gironde
15 MONNIER Clément Trignac Loire-Inférieure
20 MONNIER Paul Versailles Seine-et-Oise
1 MONORY Blanche Vierzon Cher
1 MONORY Jacques Vierzon Cher
1 MONORY Robert Vierzon Cher
10 MOREAU Jean-Baptiste Paris Seine
10 MOREL Maxime Saint-Ouen-la-Rouerie Ille-et-Vilaine
6 MORELLE Désiré Le Mesnil-Villeman Manche
1 MOROSOFF Michel Loire
16 MOULIN Paul Tigy Loiret
19 MOYSAN Paul Saint-Etienne Loire
11 NACHES Auguste Saint-Amant-de-Graves Charente
10 NAMIN Gontran Paris Seine
15 NAMUR Florent Trignac Loire-Inférieure
18 NÈVE Louis Aurillac Cantal
1 NOCENT Edouard Valençay Indre
1 NOCENT Emélie Valençay Indre
1 NOCENT Germaine Valençay Indre
13 PAIN Mariette Senozan Saône-et-Loire
1 PANIEN Cunégonde Limoges Haute-Vienne
20 PATIN Alphonse Captains Gironde
11 PATRIS Felix Gond-Pontouvre Charente
20 PAUL Auguste Sainte-Feyre Creuse
9 PAULET Emile Cérences Manche
9 PAULET Sébastien Cérences Manche
9 PAVOT Alcide Saint-Merd-de-Lapleau Corrèze
3 PAVOT Desirée Saint-Nicolas-d'Aliermont Seine-Inférieure
3 PAYEN Léonie Terrasson Dordogne
9 PELEZ Charles Sainte-Orse Dordogne
9 PÉRANT Léon Cérences Manche
9 PÉRONNE Emile Saint-Merd-de-Lapleau Corrèze
1 PERRIN René Maillé Vendée
1 PÉTOUX Blanche La Montagne Loire-Inférieure
3 PHILBERT Suzanne Saint-Nicolas-d'Aliermont Seine-Inférieure
3 PICARD Désiré Saint-Brieuc Côtes-du-Nord
15 PICHOTTE Michel Marseille Bouches-du-Rhône
14 PIERRONNE Augustin Grazac-Falgade Tarn
1 PILLION Fernande Lyon Rhône
1 PLATARET Jacqueline Cosne Nièvre
1 PLATARET Jacques Cosne Nièvre
1 PLATARET Jeanne Cosne Nièvre
1 PLATARET Yvonne Cosne Nièvre
5 PLUMECOQ Maurice Saint-Etienne Loire
18 POIVRE Fernand Lourdes Hautes-Pyrénées
1 POIX Abel Ingrandes Maine-et-Loire
1 POIX Aubert Ingrandes Maine-et-Loire
1 POIX Philomène Ingrandes Maine-et-Loire
10 POMMIER Jean Paris Seine
4 PONTIGNAC Victor Saint-Georges-de-Chesné Ille-et-Vilaine
17 PORTAIL Louise Clermont-Ferrand Puy-de-Dôme
20 POTIER Gustave Cromac Haute-Vienne
6 POUILLAUDE Julien Levroux Indre
7 POURCELET Joseph La Chapelle-en-Juger Manche
16 PRÉTO Eugène Tigy Loiret
15 PRÉVOST Adolphe Parthenay Deux-Sèvres
1 PRUDHON Philippe Huisseau-sur-Cosson Loir-et-Cher
20 QUAREZ-CUVELIER Maria Angers Maine-et-Loire
7 QUENIAUX Paul La Chapelle-en-Juger Manche
9 QUENIAUX Paul La Chapelle-en-Juger Manche
4 QUENNOY Fernand Champniers Charente
15 QUENOY Fernand Champniers Charente
11 RANDOUR Jules Orléans Loiret
16 RAUCHE Philippe Illiers Eure-et-Loir
15 RAVIART Emile Ruelle Charente
9 REMY Camille Niort Deux-Sèvres
9 REMY Marthe Niort Deux-Sèvres
10 RENAUD Armande Paris Seine
10 RENAUD Pierre Paris Seine
21 REPPES Emmanuel Orléans Loiret
11 RICHEZ Adeline Coux Charente-Inférieure
19 RICHEZ Alfred Langy Allier
1 RIGAL Henriette Damgan Morbihan
15 ROBIN Philippe Beauvais Oise
1 ROCHE Denise Châteauroux Indre
1 ROCHE René Châteauroux Indre
1 ROCHE Suzanne Châteauroux Indre
5 ROGUIN Valentine Bourges Cher
16 ROLAND Jules Vayres Haute-Vienne
1 ROMANOFF lnorès Saint-Marcel Aude
10 ROMIGNON Joseph Saint-Denis-d`Orques Sarthe
10 ROSEAU Léon Aressy Basses-Pyrénées
1 ROSEAU Octavie Saint-Valery-en-Caux Seine-Inférieure
19 ROSELLE Alphonsine Pontoise Seine-et-Oise
19 ROSELLE Gilbert Pontoise Seine-et-Oise
19 ROSELLE Henri Pontoise Seine-et-Oise
19 ROSELLE Henri Pontoise Seine-et-Oise
15 ROUCOUX Lucien Ruffec Charente
1 RUFFIN Cecilia Limoges Haute-Vienne
5 RUFFIN Charles Ardentes Indre
16 RYNDERS Jules Cognac Haute-Vienne
9 SAGNIEZ Emile Quettreville Manche
16 SARTEL Charles Ecouen Seine-et-Oise
15 SARTIEAUX René Barbezieux Charente
15 SAUVAGE Oscar Ouroux Nièvre
9 SAUVAGE Oscar Quettreville Manche
13 SEIGNEUR Henri Saint-Amand Cher
10 SEMPER Paul Paris Seine
10 SEMPER Reine Paris Seine
8 SERVOISE Henri Saint-Etienne Loire
1 SÉTAN René Quincé Maine-et-Loire
15 SEVREZ Jean-Baptiste Rougnac Charente
1 SIGARD Blanche Château-Landon Seine-et-Marne
1 SIX Louis Damgan Morbihan
15 SIZAIRE Raymond Campbon Loire-Inférieure
19 SULLIERS Léon Guiche Basses-Pyrénées
1 TAQUET Elise Brionne Eure
1 TAQUET Ernestine Brionne Eure
1 TAQUET Gustave Brionne Eure
1 TAQUET Hortense Brionne Eure
15 TAVERNE Arthur Trignac Loire-Inférieure
1 THIERY Marie-Louise Belleville Rhône
1 THIERY Marie-Louise Belleville Rhône
1 THIERY Maurice Belleville Rhône
1 THIERY Paul Belleville Rhône
16 THORELLE Léon Rouy Nièvre
10 THUET Emilien Paris Seine
19 TILMONT Eugène Bègles Gironde
10 TOPHIN Eloi Paris Seine
10 TOURILLE Arthur Romagné Ille-et-Vilaine
1 TRÉANT Marguerite Saint-Martin-Eglise Seine-Inférieure
7 TRIBOUT Abel La Chapelle-en-Juger Manche
5 TRICOT Louise Versailles Seine-et-Oise
16 TROINIÉ Louis Illiers Eure-et-Loir
1 UGUEN Aline Kerlouan Finistère
1 UGUEN Gisèle Kerlouan Finistère
4 URBIN Henri Chalais Charente
15 URBIN Henri Chalais Charente
1 UYTTERHAYHE Jean Mesnil-Héruyan Manche
15 VALIN Emile Gacé Orne
18 VANDAN Jeanne Tours Indre-et-Loire
15 VANDERQUILLE Fernand Cordemais Loire-Inférieure
3 VASSYLILCA Lounine Naucelle Aveyron
13 VÉRON Ernest et Jeanne Fleury-les-Aubrais Loiret
13 VÉRON Jeanne Fleury-les-Aubrais Loiret
17 VEROTRAETE Gustave Saint-Pons Hérault
3 VERVERS Lucie Dieppe Seine-Inférieure
19 VICOT Achille Arronnes Allier
16 VIEZE DE Adolphe Saint-Etienne Loire
16 VIVARC Olivier Billom Puy-de-Dôme
9 WATECAMP Jules Saint-Urcisse Tarn
1 WIBAUX Jeanne Veulettes Seine-Inférieure

 

   

Départements Evacués
reçus
Charente 36
Seine-Inférieure 31
Manche 30
Loire 29
Seine 29
Seine-et-Oise 26
Gironde 22
Loiret 20
Loire-Inférieure 17
Rhône 17
Deux-Sèvres 16
Cher 15
Nièvre 15
Ille-et-Vilaine 14
Allier 13
Côtes-du-Nord 12
Haute-Vienne 10
Indre 10
Indre-et-Loire 10
Maine-et-Loire 10
Basses-Pyrénées 9
Calvados 8
Corrèze 8
Sarthe 7
Ariège 6
Dordogne 6
Morbihan 6
Puy-de-Dôme 6
Tarn 6
Charente-Inférieure 5
Eure-et-Loir 5
Saône-et-Loire 5
Vendée 5
Aude 4
Aveyron 4
Bouches-du-Rhône 4
Eure 4
Finistère 4
Hérault 4
Hautes-Pyrénées 4
Lot-et-Garonne 4
Creuse 3
Haute-Garonne 3
Alpes-Maritimes 2
Mayenne 2
Oise 2
Seine-et-Marne 2
Côte-d'Or 1
Cantal 1
Isère 1
Landes 1
Loir-et-Cher 1
Orne 1
Pyrénées-Orientales 1
Tarn-et-Garonne 1
Vienne 1

 

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