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Les civils du Valenciennois dans la Grande Guerre 1914-1918

19 avril 2011

Prisonniers Russes

Extraits du livre de René Delame : "Valenciennes Occupation allemande 1914-1918. Faits de guerre et souvenirs" Hollande & Fils ed. 1933

 

PRISONNIERS DE GUERRE



1er mai 1915. - Mille prisonniers Russes arrivent et sont logés à la caserne Vincent. Ce sont des hommes bien bâtis, qui viennent travailler à la démolition des usines, réparer les routes et s'occuper des travaux des champs.
D'autres arrivent à Trith pour charger les minerais qui sont expédiés à Hambourg.
Ceux-là sont dans un état pitoyable, les uns avec des manteaux anglais, d'autres avec des képis français : ils font peine à voir.
Ces malheureux meurent de faim et demandent : " Pain! Pain! " Sur la route, les braves gens qui veulent partager avec eux sont brutalement repoussés par les Allemands. On mettait parfois avec intention, dans les bacs à ordures, devant les portes, des morceaux de pain sur le passage de ces malheureux prisonniers ; mais dès qu'ils voulaient s'en emparer, les soldats allemands les repoussaient avec brutalité.

Le 22 Juin 1915. - Nous arrivent 1.500 prisonniers, dont la plupart sont Russes. Ils viennent faire la moisson, et sont, comme tous ceux que nous avons vus, dans un état lamentable.

Le dimanche 27 juin 1915. - Nous arrivent 250 prisonniers venus de Havelburg. La dévouée Mme Besnard passa la matinée avec ces malheureux, qui étaient dans un état pitoyable. Ils étaient partis du camp le lundi, s'étaient arrêtés deux jours à Malmédy, pendant lesquels ils n'eurent pour toute nourriture qu'un peu de café et un morceau de pain. Ils seraient morts de faim si ce séjour s'était prolongé.
Dans ce camp, ils étaient environ 7.000 : Russes, Polonais, Belges, Anglais. Ils n'y étaient pas trop maltraités, mais souffraient de la faim, étant trop faibles pour travailler.
Rien ne peut décrire l'état de saleté dans lequel ils se trouvaient. Chemise usée, sans couleur, vêtements déchirés, souliers éculés, enfin la misère la plus complète.

Le mardi 9 novembre 1915. - M. Guérin étant de passage à Valenciennes, nous dit qu'il rentrait de Berlin où il était allé traiter avec le Gouvernement allemand l'échange de prisonniers. Il avait pu visiter cinq camps, et avait trouvé nos compatriotes en assez bon état, mais seulement lorsqu'ils recevaient des colis, car la nourriture était insuffisante. Le ravitaillement des Anglais était, par contre, très bien organisé, les prisonniers étant nourris par le régiment auquel ils appartenaient. Par contre, les pauvres Russes n'étant aidés de personne, étaient dans un état lamentable. M. Guérin avait pu faire changer quelques chefs, vraiment trop durs avec leurs prisonniers.

Janvier 1916 -ENFANTS DE FRANCE


Voici une petite histoire qui mérite d'être contée : elle est bien française dans sa courageuse simplicité.
Un groupe de prisonniers russes, hâves, décharnés, misérables, traversait les rues de Vieux-Condé au moment où les garçons entraient à l'école, ayant presque tous leur goûter en mains.
Les pauvres prisonniers mourant de faim, en voyant leurs tartines, ne purent s'empêcher d'exprimer leur fringale par le geste. Il n'en fallut pas davantage pour toucher le bon cœur des petits écoliers. D'un élan spontané, tous ceux qui avaient des tartines se précipitèrent et les donnèrent aux prisonniers, bien que ce fût défendu. Les soldats de l'escorte les chassèrent et, comme une nuée de moineaux effarouchés, ils disparurent dans la cour de l'école.

A peine y étaient-ils entrés qu'un sous-officier allemand y fit irruption et, d'une voix terrifiante, leur cria en mauvais français : " Qui a donné du bain aux prisonniers? Lefez la main, ceux-là iront en prison ".
Sans hésiter, tous levèrent la main.
L'Allemand, un peu déconcerté par cette généreuse unanimité, hésita, puis, d'une plus forte voix encore, reprit : " Ah! fous avez tous tonné du bain ; levez la main ceux qui promettent de ne plus en tonner aux Russes, les autres iront trois jours en prison ".
Pas une main ne se leva.
L'Allemand, cette fois, fut stupéfait, et leur infligea à tous trois jours de prison dans l'école. Calmes comme de vieux braves, sans baisser la tête ni les yeux, un petit sourire bien français au coin des lèvres, tous les écoliers croisaient les bras sans plus attendre, et firent leur punition sans murmurer!

PRISONNIERS RUSSES -1916


Le 4 mars 1916, j'assistai à un bien triste spectacle sur la place des Tramways.
Trois cents prisonniers Russes qui, depuis trois jours, étaient enfermés dans nos Académies, mourant littéralement de faim, attendaient le tramway pour aller travailler à la démolition des usines dans les environs. Immédiatement, sans se préoccuper des représailles, les commerçants et les personnes présentes donnèrent ce qu'ils pouvaient à ces malheureux affamés qui se battaient pour ramasser ce qu'on pouvait leur jeter. Heureusement, aucun incident ne se produisit, tandis que la veille, à Saint-Saulve, en face de la propriété de M. Ch. Dubois, une femme ayant donné au passage un morceau de pain à un pauvre prisonnier, fut sur-le-champ rouée de coups, à la grande indignation des passants, qui ne purent intervenir.
Le lendemain, voulant voir ce qui s'y passait, je pus entrer aux Académies. Ces misérables Russes attendaient avec patience leur pauvre pitance. La cour était transformée en cuisine ; une grande chaudière étant enterrée dans le sol, le tirage se faisait par une cheminée improvisée.
Afin de ne rien perdre, le cuisinier, à plat ventre, ramassait le fond de cette chaudière crasseuse.
Dans les salles des Académies, de la mauvaise paille leur servait de litière. Aussi, vivaient-ils dans une saleté repoussante.
Le Maire, M. Tauchon, fit, à la suite de ces scènes déplorables, une démarche auprès de la Commandature, afin de permettre à la population de remettre des vivres aux Russes affamés.
Une jeune femme, causant le russe, put leur parler, et ces malheureux décrivirent la situation lamentable dans laquelle ils vivaient, ayant été quatre jours sans manger avant l'arrivée à Valenciennes.
Mais le commandant ne se laissa pas convaincre, et rien ne fut changé à la situation.
Ces prisonniers Russes furent employés par les Allemands pour abattre les arbres dans la forêt de Raismes. Sur l'ordre de la Commandature, à partir du lundi 20 mars, à midi, les prisonniers civils en détention préventive au patronage Saint-Nicolas et à l'Hôtel de Ville furent nourris aux frais de la Ville.

PRISONNIERS RUSSES -1917


Le lundi 23 janvier 1917, les écoles du faubourg de Lille furent réquisitionnées, après avoir licencié les élèves, pour recevoir quatre cents prisonniers Russes. Ils arrivèrent par un temps glacial, dans un état lamentable, pour travailler au quai d'embarquement de Saint-Saulve et à la nouvelle voie raccorl1ant la ligne de Quiévrain à celle de Maubeuge, sans passer par la gare de Valenciennes : ils devraient ensuite coopérer à la destruction des usines.
A Saint-Saulve, les écoles furent également licenciées pour en recevoir deux cents ; en même temps, arrivaient au Poirier deux cents ouvriers civils pour extraire du gravier.
Les prisonniers Russes de Saint-Saulve, sans feu et sans nourriture, furent très particulièrement éprouvés. Ils ramassaient les pommes de terre pourries et les tiges de choux en bordure des champs, car ils mouraient littéralement de faim.
Voyant M. Grosjean, mari de l'institutrice, couper une betterave pour ses lapins, ils la lui demandèrent pour la manger crue. Ils étaient en haillons, et la plupart les pieds nus dans des sabots. Malgré leur mauvais état de santé, ils devaient marcher, car les soldats qui les escortaient les frappaient avec leur sabre.
Indignée, une dame ne put s'empêcher de leur dire : " Sales bêtes ". Son nom fut relevé, et elle fut punie sévèrement.
Dans l'impuissance où nous étions de les soulager, et ne pouvant les approcher, quelques personnes compatissantes jetaient du pain sur leur passage, lorsqu'ils se rendaient au travail. Ce fut alors des scènes terribles : ces hommes se battaient comme des sauvages pour ramasser ces quelques morceaux de pain.
Dans la nuit du 26 janvier 1917, quelques-uns, mourant de faim, escaladèrent le mur de l'école du faubourg de Lille où ils étaient enfermés, et se battirent avec le poste qui, ayant reçu du renfort, les fit rentrer à coups de crosses.
Partis mille de Russie, ils n'étaient plus, quelques semaines plus tard, que six cents.
A la suite de ces privations, six moururent à l'école de Saint-Saulve, au milieu de leurs camarades, sans recevoir aucun soin : deux des cadavres restèrent toute la journée du dimanche 28 janvier 1917 dans le couloir de l'école, exposés sans cercueil.
Les membres de la Croix-Rouge française ayant été avertis qu'à quatre heures avait lieu l'enterrement des deux Russes, se rendirent à l'Hôpital ; mais il fut impossible de trouver les corps, et ils durent rentrer chez eux.
Ces prisonniers étaient dans un état lamentable ; leurs vêtements étaient en lambeaux, ils les raccommodaient comme ils pouvaient avec des morceaux de couvertures retenus avec des ficelles, qui laissaient voir leurs membres à nu.
A Denain, le commandant défendit également que la population leur vînt en aide, prétextant, ce qui était faux, que le gouvernement russe avait laissé mourir de faim mille sept cents officiers allemands.
Tous les jours je voyais passer devant moi ces malheureux Russes, se soutenant les uns les autres, alors qu'ils revenaient de Trith où ils travaillaient au démontage des usines du Nord et de l'Est, ce qui leur faisait chaque jour plus de 15 kilomètres de chemin. A les voir, on se serait cru au temps le plus reculé de l'esclavage. Il est impossible de décrire ce groupe d'infortunés, encadré de soldats allemands, suivis de gendarmes chargés de faire un procès à quiconque leur parlerait ou leur porterait secours.
En sortant, je rencontrai justement un agent de police portant des feuilles où étaient inscrites les condamnations de la justice allemande, car pour ménager leurs hommes, nos agents étaient obligés de faire signer aux intéressés les jugements qui les concernaient.
Sur l'une de ces feuilles, je lus : " Mme Derrenbourg, femme Lemaire, est condamnée à cent marks d'amende pour avoir voulu donner de l'argent aux prisonniers Russes qui passaient. "
Sur une autre :
" Mme Bare, Célestine, est condamnée à cent cinquante marks d'amende pour avoir donné un morceau de pain aux prisonniers Russes qui passaient. ".

Le 13 février 1917, sur le pont Jacob, passait un groupe de prisonniers Russes, encadrés de soldats allemands. Les regardant passer, la jeune Dufont, âgée de seize ans, habitant le coron Miroux, mangeait un morceau de pain, Les prisonniers, affamés, regardaient avec convoitise cette " tartine " La jeune fille s'en aperçut et voulut la leur donner, mais le gendarme l'en empêcha, lui disant :
" Prison ".
Elle lui répondit : " Égal ", et la leur donna quand même.
Elle fut condamnée à trois semaines de prison. Que de braves enfants comme elle auraient droit à la reconnaissance française!
Chaque fois que je voyais passer ces malheureux, j'avais l'âme remplie de tristesse. Il se forma alors un Comité pour essayer de les soulager et leur venir en aide.
Tout ceci prouve bien la lâcheté et la morgue du Haut Commandement allemand, qui n'eut jamais osé traiter pareillement des prisonniers français, anglais ou américains, ceux-ci auraient pu se défendre et agir de représailles, tandis que les Russes étaient abandonnés de tous.

PRISONNIERS MASSACRES


Les prisonniers Russes qui démontaient les usines étaient de plus en plus malmenés ; c'est ainsi que le 9 mars 1917, l'un d'eux se rendant à l'usine du Nord et de l'Est, s'étant écarté de son groupe d'une dizaine de mètres pour prendre un morceau de pain, fut appréhendé par la sentinelle. Le malheureux se mit à genoux pour s'en excuser et, au moment où il relevait la tête, Je soldat le mit en joue et le tua à bout portant. Il fut transporté à l'hôpital sur une brouette, sans même être recouvert.

RAVITAILLEMENT DES PRISONNIERS


Le 15 mars 1917, nous voyions arriver de Belgique quatre cents ouvriers civils qui venaient démonter les usines. Par ironie, ils avaient mis leur chapeau haut de forme : ils furent dirigés sur Marly, encadrés de soldats allemands. En juin, la ville recevait pétitions sur pétitions venant de différentes communes, demandant à ce que l'on secourût les prisonniers Russes et Anglais, qui étaient dans un état lamentable et que l'on ne pouvait approcher. A Condé, M. Pureur réclamait pour cent cinquante Russes qui étaient dans la misère la plus complète ; à Denain, trois cents Anglais mouraient de faim. Un jour, une femme mangeait un morceau de pain sur sa porte : un Anglais se précipita et le lui prit des mains pour le dévorer. La sentinelle roua de coups cette femme et la mit en prison. A Raismes, quatre cent soixante-huit Anglais étaient également dans la plus grande détresse. Les habitants essayèrent par tous les moyens possibles, au risque d'être mis en prison, de soulager ces martyrs, ce qui fut très difficile et périlleux.

Le 26 juin 1917, arrivaient à Saint-Saulve, cent cinquante Anglais mourant littéralement de faim. Ils furent logés dans les écoles, les maisons voisines ayant été évacuées afin d'empêcher toute communication. Une femme qui voulut leur passer un paquet de cigarettes fut mise en prison pour vingt-huit jours. Tous faisaient peine à voir ; les Anglais, avec leurs vêtements en lambeaux, ne se laissaient pas abattre comme les Russes, et ils relevaient la tête avec fierté lorsqu'ils se rendaient au travail, encadrés de soldats allemands. Nous les admirions, mais nous étions très attristés de ne pouvoir leur venir en aide.
A Saint-Amand, le jeune Lartoir, âgé de treize ans, fut condamné à vingt et un jours de cellule, au pain et à l'eau, pour avoir donné une cigarette à un prisonnier. Il fut si malmené dans son cachot, qu'il rentra chez lui dans un état lamentable.


A la réunion du Comité régional du 19 août 1917, la question du ravitaillement des prisonniers prit une telle proportion, MM. Turbot et Branquart durent intervenir, tout en nous laissant une grande latitude pour leur venir en aide.
M. Turbot avoua que la question était vraiment très difficile à résoudre.
M. Pureur ajouta qu'à Condé, les prisonniers Russes et Anglais étaient couchés sur des copeaux ou sur des lits de fer, dont les ressorts les martyrisaient les côtes. Deux cents vingt-cinq d'entre eux étaient déjà morts ; trois ou quatre succombent chaque jour d'inanition. Nous sommes obligés de leur venir en aide, en leur faisant une soupe dont les gardiens profitent. Nous ne pouvons cependant pas laisser mourir de faim tous ces malheureux qui se sont battus pour nous.
" Hier, ajouta-t-il, je me trouvais à la gare de Condé où les Russes embarquaient des chevaux. A proximité, se trouvait un champ de choux-navets, sur lequel ils se jetèrent comme des affamés. "
M. Davaine dit qu'à Maulde, les malheureux prisonniers avaient la dysenterie et qu'il y avait parmi eux une très grande mortalité.
M. Turbot termina la réunion en disant qu'il y avait là en effet une question d'humanité, que le Comité de district s'en rapporterait à la probité des Maires, qui établiraient une comptabilité régulière.

AMÉLIORATIONS DU STATUT DES PRISONNIERS


Le 15 novembre 1917
, les officiers qui nous arrivaient du front d'Ypres, nous apprirent que le nombre des morts était effrayant des deux côtés, mais que leur succès sur les Italiens et la révolution russe, leur avait rendu le courage et la confiance qui commençaient, avouaient-ils, à s'ébranler.

En effet, nous remarquons que les prisonniers Russes étaient désormais mieux nourris, et qu'on leur procurait des vêtements : on semblait en un mot, ne plus les considérer comme des prisonniers de guerre.
Par contre, nous voyons passer en gare les malheureux prisonniers anglais, à peine vêtus par ce grand froid, et sans chaussures. Ils allaient, paraît-il, en Allemagne, un accord étant survenu entre les puissantes belligérantes pour que les prisonniers ne soient plus envoyés sur le front.
 
 


 

  •  A ces témoignages je peux rajouter celui de ma mère qui habitait "La Briquette" avec ses 3 soeurs et leur mère, mon grand-père ayant choisi de traverser les lignes en septembre 1914 pour rejoindre les troupes françaises ; en 1916 un des camps de prisonniers devait être voisin de leur maison, car elle racontait avoir été leur porter un peu de nourriture, ma grand'mère ayant été mise en joue à cette occasion par une sentinelle.


  • Les prisonniers Russes ne disposaient, pour remercier ceux qui osaient leur venir en aide, que de menus objets de bois, réalisés au couteau à partir de morceaux de bois de petite taille. Ma famille a conservé ceux que ma mère et mes tantes ont reçus :

    oiseau

    crucifix_R__
      crucifix_V__
    Le verso porte la date : 1916 et le nom du prisonnier en cursives cyrilliques, qui pourrait être Костецкий Иван décédé le 29/03/1918 (seul le prénom est certain)

  • Un certain nombre de ces prisonniers sont inhumés au cimetière St Roch de Valenciennes entre le cimetière britannique et le carré français :
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    • Un monument est dédié à "CEUX QUI ONT DONNE LEUR VIE POUR LEURS AMIS 1914-1918" ; une plaque a été rajoutée en 2012
    P1010428

    P1460946

    • Il remplace un monument original, inauguré en 1927 avec participation du Metropolite Euloge et de l'Ataman Bogaewsky des Cosaques du Don, et dont on ne sait ce qu'il est devenu (détruit lors de la 2nde Guerre ?)
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    • Les 212 tombes du cimetière,  marquées "MORT POUR LA PATRIE"  de 3 Roumains et 207 Russes dont 3 sous-officiers, ainsi qu'1 Hongrois et 1 Serbe inhumés en 1943 (tombes 18bis et 36bis). (photos de l'auteur).

       tombes russes

    • Suit la liste selon les n°s de tombe : 17 d'entre eux n'ont pas de date de décès précise, l'un des soldats Roumains est inconnu. Les informations de la plaque tombale ont été recopiées à l'identique, j'y ai ajouté le nom en cyrillique tel que le donne le site russe mentionné plus bas. (photo sur demande)

    • A noter que 2 tombes ( la n°9 et la 204) portent strictement la même inscription : "MUSTEKISCH Joseph, SOLDAT RUSSE, 01/03/1917"
      Peut-être l'une des 2 contient-elle le corps du soldat qui figure seulement dans la liste russe "Круг Эмилий  : KRUG Emile 01.04.05 пленный" (captif)


    Nom Prénom ФИО Inscription Date de décès n° de tombe
    POLONSKI   Полонский SOLDAT RUSSE 1914-1918 1
    SIMACHER   Симахер SOLDAT RUSSE 1914-1918 2
    KOTOWITSCH Fr. Котович Фр. SOLDAT RUSSE 13/05/1916 3
    POLAKOW Gregori Полаков Григорий SOLDAT RUSSE 31/05/1916 4
    JAKOLOW Alexy Яколов Алексей SOLDAT RUSSE 25/03/1917 5
    SELEZNEOW Peter Селезнев Петр UTFFZ. RUSSE 1914-1918 6
    JAMENEKO Lymitri Яменеко Димиртий PRISONNIER GUERRE RUSSE 05/12/1916 7
    BARANZEWITSCH Semen Баранцевич Семен GEFR. RUSSE 14/03/1917 8
    MUSTEKISCH Josef Мустекич Иосиф SOLDAT RUSSE 01/03/1917 9
    SCHIPILOW Simon Шипилов Семен SOLDAT RUSSE 25/03/1917 10
    SIBIROW Iwan Сибиров Иван SOLDAT RUSSE 24/11/1917 11
    GLEISER Anton Глейцер Антон SOLDAT RUSSE 25/04/1917 12
    NAPORKA Theodor Напорка Федор SOLDAT RUSSE 09/05/1917 13
    ZIWINSKI Iwan Цивинский Иван SOLDAT RUSSE 09/05/1917 14
    KUSMENZUK Theodor Кузьменчук Федор SOLDAT RUSSE 1914-1918 15
    FOMENKO Pawel Фоменко Павел SOLDAT RUSSE 15/07/1918 16
    TOKOR Foma Токор Фома SOLDAT RUSSE 16/07/1918 17
    NAGORNY Alfanaey Нагорный Афанасий SOLDAT RUSSE 18/07/1918 18
    ANTIJ Ilija   HONGROIS 19/05/1943 18bis
    SIDOROW Dimitri Сидоров Дмитрий SOLDAT RUSSE 30/03/1917 19
    KALIMIN Iwan Калимин Иван SOLDAT RUSSE 26/03/1917 20
    GLODURAN Foror Глодуран Федор SOLDAT ROUMAIN 05/04/1917 21
    DERAWEZNIKO Nikolai Деревезнико Николай SOLDAT RUSSE 18/04/1917 22
    SILBER Leiba Сильбер Лейба SOLDAT RUSSE 17/04/1917 23
    DANILOW Daniel Данилов Даниил SOLDAT RUSSE 29/03/1917 24
    WJATSCHESLAW Anton Вячеслав Антон SOLDAT RUSSE 15/03/1917 25
    WJALKOW Iwan Вялков Иван SOLDAT RUSSE 23/03/1917 26
    BOZKAROW Wassili Бозкаров Василий SOLDAT RUSSE 23/03/1917 27
    MIESTALEWSKI Julian Месталевский Юлиан SOLDAT RUSSE 06/05/1917 28
    SARUBIN Iwan Зарубин Иван SOLDAT RUSSE 22/09/1917 29
    KARPIERKA Pieter Карперка Петр SOLDAT RUSSE 19/07/1918 30
    SELITZKI Feodor Селицкий Федор SOLDAT RUSSE 22/07/1918 31
    TSCHERNAUS Prokof Черноус Прокофий SOLDAT RUSSE 12/07/1917 32
    RISCHKOW Osig Рышков Осип SOLDAT RUSSE 06/04/1917 33
    KONOPLITZKI Timosei Коноплицкий Тимофей SOLDAT RUSSE 18/04/1917 34
    BULKA Cerasim Булка Герасим SOLDAT RUSSE 23/04/1917 35
    KIMTSCHIK Theodor Кимчик Федор SOLDAT RUSSE 29/04/1917 36
    VUJNOVIEU Mihajin   SERBE 13/02/1943 36bis
    KOTSCHERGIN Piotre Кочергин Петр SOLDAT RUSSE 08/05/1917 37
    SKOROCHODOW Iwan Скороходов Иван SOLDAT RUSSE 11/05/1917 38
    APTIKAJEM Chavafislam Артилажем Хавафислам SOLDAT RUSSE 19/03/1917 39
    SOSNOWOSKI Stanislaw Сосновский Станислав SOLDAT RUSSE 02/06/1917 40
    SCHLASIN Pawel Шлазин Павел SOLDAT RUSSE 02/06/1917 41
    TESCHELSKY Siegmund Тежельский Зигмунд SOLDAT RUSSE 03/06/1917 42
    LEBETJEW Nikolae Лебедев Николай SOLDAT RUSSE 17/04/1917 43
    BINECK Jan Бинек Ян SOLDAT RUSSE 26/02/1917 44
    TSCHURUM Karp Чурум Карп SOLDAT RUSSE 26/02/1917 45
    SUWAK Ludwig Сувак Людвиг UTFFZ. RUSSE 15/06/1917 46
    DOWSCHENKO Wassili Довженко Василий SOLDAT RUSSE 22/11/1917 47
    GERGELUK Peeter Гергелюк Петр SOLDAT RUSSE 29/04/1917 48
    KAIDA Trofim Кайда Трофим SOLDAT RUSSE 28/05/1917 49
    RISTOWSKI Vikenti Ристовский Викентий SOLDAT RUSSE 25/06/1917 50
    JASCHINSKY Josef Ящинский Иосиф SOLDAT RUSSE 14/05/1917 51
    BELAN Daniel Белан Даниил SOLDAT RUSSE 21/01/1918 52
    GORA Jurka Гора Юрка SOLDAT RUSSE 14/01/1918 53
    OLIFSENKO Iwan Олифсенко Иван SOLDAT RUSSE 04/01/1918 54
    KLEUFF Iwan Клюев Иван SOLDAT RUSSE 01/08/1917 55
    ROSIJEW Niken Росеев Никон SOLDAT RUSSE 09/02/1918 56
    BRUSCHIMIN Wassili Брушимин Василий SOLDAT RUSSE 25/08/1917 57
    KOSTEZKI Iwan Костецкий Иван SOLDAT RUSSE 29/03/1918 58
    POLTARAK Pjotz Полторак Петр SOLDAT RUSSE 13/12/1917 59
    CHANANOW Abdul Хананов Абдул SOLDAT RUSSE 12/03/1917 60
    SENTSCHENKO Nikita Сенченко Никита SOLDAT RUSSE 04/12/1917 61
    PASCHA Stephan Паша Степан SOLDAT RUSSE 09/03/1917 62
    SCHOLPOAKOW Michael Шолпоаков Михаил SOLDAT RUSSE 03/09/1917 63
    KRASSORA Semion Крассора Семен SOLDAT RUSSE 1914-1918 64
    NASAROW Wassili Назаров Василий SOLDAT RUSSE 27/09/1917 65
    PETROW Peter Петров Петр SOLDAT RUSSE 07/10/1917 66
    STRELNIKOW Wassili Стрельников Василий SOLDAT RUSSE 28/09/1917 67
    NELUBON Dimitri Нелюбон Дмитрий SOLDAT RUSSE 23/09/1917 68
    POPOW Michael Попов Михаил SOLDAT RUSSE 08/09/1917 69
    ALEXEJEW Luka Алексеев Лука SOLDAT RUSSE 25/09/1917 70
    BUJAKIN Wassili Бужакин Василий SOLDAT RUSSE 25/09/1917 71
    LOSCHKIN Gorde Лошкин Гордей SOLDAT RUSSE 24/09/1917 72
    DUNITSCHENKOW Nikolay Дунищенков Николай SOLDAT RUSSE 16/08/1917 73
    ANISKOWETZ Stephan Анисковец Степан SOLDAT RUSSE 30/06/1918 74
    RUKIN Stephan Рукин Степан SOLDAT RUSSE 16/05/1918 75
    PETROW Melashwai Петров Мелашвай SOLDAT RUSSE 04/04/1918 76
    TOLSTIAKOW Sergey Толстиков Сергей SOLDAT RUSSE 06/04/1918 77
    BUDAL   Будал SOLDAT RUSSE 1914-1918 78
    SCHEWTSCHENKE   Шевченко SOLDAT RUSSE 1914-1918 79
    DAMLJUK Nikolai Дамлюк Николай SOLDAT RUSSE 06/05/1918 80
    MANTSCHENKOW Stephan Манченков Степан SOLDAT RUSSE 30/05/1918 81
    JEGEROW Simon Егеров Семен SOLDAT RUSSE 09/10/1917 82
    SCHINKARENKO Jakob Шинкаренко Яков SOLDAT RUSSE 01/10/1917 83
    BASCHLIKOW Miron Башлыков Мирон SOLDAT RUSSE 28/09/1917 84
    SCHMATOW Feodor Шматов Федор SOLDAT RUSSE 01/10/1917 85
    TOLKATSCHOW Jakob Толкачев Яков SOLDAT RUSSE 10/09/1917 86
    MASUR Pawel Мазур Павел SOLDAT RUSSE 10/09/1917 87
    TSCHNIKOW Gregory Чников Григорий SOLDAT RUSSE 22/11/1917 88
    CHOMTSCHUK Hold Хомчук Мефодий SOLDAT RUSSE 08/09/1917 89
    KASPAROWISTH Joh Каспарович Иоганн SOLDAT RUSSE 28/11/1917 90
    KAMINSKI Vikenti Каминский Викентий SOLDAT RUSSE 05/02/1918 91
    DOLGALOW   Долгалов SOLDAT RUSSE 13/10/1917 92
    POMOTUCHIN Wassili Помотухин Василий SOLDAT RUSSE 09/10/1917 93
    LJURTSCHIK Damian Люрчик Демьян SOLDAT RUSSE 29/04/1918 94
    SOLOTUCHIN Teodor Золотухин Федор SOLDAT RUSSE 06/10/1917 95
    SCHPIRJUCK Iwan Шпирюк Иван SOLDAT RUSSE 02/06/1918 96
    SCHTSCHEPAHJAK   Щепаняк SOLDAT RUSSE 1914-1918 97
    DANILOW Dimitri Данилов Дмитрий SOLDAT RUSSE 09/03/1918 98
    SAPRUN Peter Сапрун Петр SOLDAT RUSSE 24/06/1918 99
    SEREDA Efim Середа Ефим SOLDAT RUSSE 22/03/1918 100
    GADOLOW Sergey Гадолов Сергей SOLDAT RUSSE 22/09/1917 101
    SACHAROW Jakob Сахаров Яков SOLDAT RUSSE 21/09/1917 102
    ANTIPENKO Dimitri Антипенко Дмитрий SOLDAT RUSSE 08/09/1917 103
    MALZEW Ossig Мальцев Осип SOLDAT RUSSE 05/09/1917 104
    GAWLOWSKY Peter Гавловский Петр SOLDAT RUSSE 14/09/1917 105
    ROMANOW Konstantin Романов Константин SOLDAT RUSSE 10/09/1917 106
    GUSSEW Demjam Гусев Демьян SOLDAT RUSSE 1914-1918 107
    BOGDANOW Dimitri Богданов Дмитрий SOLDAT RUSSE 19/10/1917 108
    ZYMBAL Tifano Цымбал Тимофей SOLDAT RUSSE 03/05/1917 109
    DAGEL Edouard Дагел Эдуард SOLDAT RUSSE 23/04/1917 110
    GRIGORIEW Nikolai Григорьев Николай SOLDAT RUSSE 27/05/1917 111
    GORDEJENKO Toma Гордеенко Фома SOLDAT RUSSE 29/04/1917 112
    IWANOW   Иванов SOLDAT RUSSE 1914-1918 113
    TRATSCHOW Wassili Трачов Василий SOLDAT RUSSE 04/05/1917 114
    KOSLOW Daniel Козлов Даниил SOLDAT RUSSE 01/05/1917 115
    ANDREEW Jedokin Андреев Евдоким SOLDAT RUSSE 16/10/1917 116
    DAYKON Nikolai Дайкон Николай SOLDAT RUSSE 02/05/1917 117
    KOSTSCHEJEW Prokofi Кощеев Прокофий SOLDAT RUSSE 14/10/1917 118
    ANDRJUSCHENKO   Андрющенко SOLDAT RUSSE 11/11/1917 119
    IWANOW Iwan Иванов Иван SOLDAT RUSSE 10/09/1917 120
    KOLESNIK Afanasi Колесник Афанасий SOLDAT RUSSE 05/09/1917 121
    WOROCHOBOW Iwan Ворохобов Иван SOLDAT RUSSE 15/11/1917 122
    PRATOSENKO Afanasi Пратосенко Афанасий SOLDAT RUSSE 02/05/1917 123
    MAJERENKO Iwan Мажеренко Иван SOLDAT RUSSE 15/09/1917 124
    ALIKIN Moisef Аликин Моисей SOLDAT RUSSE 30/10/1917 125
    MARUSSOW   Марусов SOLDAT RUSSE 08/11/1917 126
    SOLDAT INCONNU     ROUMAIN 08/11/1917 127
    BORMUTOW Peter Бормутов Петр SOLDAT RUSSE 1914-1918 128
    JEWTUSCHENKO Teodor Евтушенко Федор SOLDAT RUSSE 21/04/1917 129
    MACIKAWITSCH   Масикавич SOLDAT RUSSE 1914-1918 130
    LOKIN   Локин SOLDAT RUSSE 1914-1918 131
    BROWENKO Iwan Бровенко Иван SOLDAT RUSSE 02/06/1917 132
    PIROSCHKOW Iwan Пирожков Иван SOLDAT RUSSE 1914-1918 133
    FOMENKO Stephan Фоменко Степан SOLDAT RUSSE 1914-1918 134
    SCHESTER Iwan Шестер Иван SOLDAT RUSSE 19/05/1917 135
    DJAKOW Iwan Дьяков Иван SOLDAT RUSSE 23/04/1917 136
    MAKEWITSCH Jakob Макевич Яков SOLDAT RUSSE 29/05/1917 137
    SLONOW   Слонов SOLDAT RUSSE 29/05/1917 138
    IWANOW   Иванов SOLDAT RUSSE 29/05/1917 139
    KERELENKO Moissi Кириленко Моисей SOLDAT RUSSE 30/05/1917 140
    KURBATOW Sergei Курбатов Сергей SOLDAT RUSSE 26/04/1917 141
    POPENKO Abraham Попенко Абраам SOLDAT RUSSE 27/04/1917 142
    RUBIN Luka Рубин Лука SOLDAT RUSSE 27/05/1917 143
    PIENKO Trofim Пиенко Трофим SOLDAT RUSSE 30/04/1917 144
    MEDWEDOW Arefi Медведов Арефий SOLDAT RUSSE 21/05/1917 145
    TROFFINOW Timofe Трофинов Тимофей SOLDAT RUSSE 17/05/1917 146
    SSITNIK Iwan Сытник Иван SOLDAT RUSSE 22/04/1917 147
    DORAKOW Pietr Дораков Петр SOLDAT RUSSE 05/03/1917 148
    SKORIK Toma Скорик Фома SOLDAT RUSSE 16/03/1917 149
    PASCHELN Michay   SOLDAT ROUMAIN 19/03/1917 150
    ZATYSCHOW Rogin Затышов Родион SOLDAT RUSSE 18/03/1917 151
    HOLOBIN Sergei Холобин Сергей SOLDAT RUSSE 30/08/1917 152
    KOSTOLOMOW Iwan Костоломов Иван SOLDAT RUSSE 16/03/1917 153
    JAKONENKO Michael Яконенко Михаил SOLDAT RUSSE 09/03/1917 154
    BESTUSCHOW Iwan Бестужев Иван SOLDAT RUSSE 03/08/1917 155
    RATSCHOWSKI Konstantin Ратчовский Константин GEFR. RUSSE 04/03/1917 156
    PEREGRINOW Andrey Перегринов Андрей SOLDAT RUSSE 1914-1918 157
    PESSENKO Theodor Пессенко Фекдор SOLDAT RUSSE 23/05/1917 158
    IAGODIN Fedoro Ягодин Федор SOLDAT RUSSE 20/05/1917 159
    JUDIN Sergei Юдин Сергей SOLDAT RUSSE 1914-1918 160
    MAMAJEW Trofim Мамаев Трофим SOLDAT RUSSE 25/05/1917 161
    SWASKO Iwan Сваско Иван SOLDAT RUSSE 24/05/1917 162
    POPOW Iwan Попов Иван SOLDAT RUSSE 08/06/1917 163
    DEMJANOW Michaib Демьянов Михаил UTFFZ. RUSSE 11/06/1917 164
    MASTENKO Maxim Мастенко Максим SOLDAT RUSSE 06/06/1917 165
    LEPINO Neita Лепино Нейта SOLDAT RUSSE 05/06/1917 166
    SEROW Trofim Серов Трофим SOLDAT RUSSE 05/06/1917 167
    DELGIN Ingor Делгин Егор SOLDAT RUSSE 16/06/1917 168
    SMAGIN Iwan Смагин Иван SOLDAT RUSSE 16/06/1917 169
    TYRLOW Konstantin Тырлов Константин SOLDAT RUSSE 16/06/1917 170
    SOLOMKA Kirill Соломка Кирилл SOLDAT RUSSE 28/07/1917 171
    TURKIN Konstantin Туркин Константин SOLDAT RUSSE 29/07/1917 172
    KARPUNIN Friedrich Карпунин Фридрих SOLDAT RUSSE 22/03/1917 173
    SISOJEW Alex Сысоев Алекс SOLDAT RUSSE 22/03/1917 174
    KUJASEW Michael Кужасев Михаил SOLDAT RUSSE 18/06/1917 175
    GOLOWKA Peter Головка Петр SOLDAT RUSSE 18/06/1917 176
    TASCHKINOW David Ташкинов Давид SOLDAT RUSSE 20/06/1917 177
    KAZANZOW Stephan Казанцов Степан SOLDAT RUSSE 21/06/1917 178
    NIESTIEROW Iwan Нестеров Иван SOLDAT RUSSE 23/06/1917 179
    ISCHTYKOW Simon Иштыков Семен SOLDAT RUSSE 30/07/1917 180
    TURKIN Kulma Туркин Кузьма SOLDAT RUSSE 12/08/1917 181
    LEONTJEW Stefan Леонтьев Степан SOLDAT RUSSE 31/03/1917 182
    TSCHERNOLICHOW Natrofan Чернолихов Митрофан SOLDAT RUSSE 01/04/1917 183
    SMIRNOW Nikolei Смирнов Николай SOLDAT RUSSE 01/04/1917 184
    KOLITSCHROW Iwan Колышров Иван SOLDAT RUSSE 03/04/1917 185
    KROPATIOW Iwan Кропатев Иван SOLDAT RUSSE 12/04/1917 186
    KOHWELIS Stanislaus Кохвелис Станислав SOLDAT RUSSE 22/07/1917 187
    GOSTJEW Nikitri Гостев Никита SOLDAT RUSSE 23/07/1917 188
    MEMSER Raphaël Мемцер Рафаил SOLDAT RUSSE 28/07/1917 189
    MALAMUSCHOW Feodor Маламушов Федор SOLDAT RUSSE 27/08/1917 190
    OSTROWSKI Anton Островский Антон SOLDAT RUSSE 04/08/1917 191
    MOSKONZEW Iwan Москонцев Иван SOLDAT RUSSE 06/08/1917 192
    BOGATELOFF Iwan Богателов Иван SOLDAT RUSSE 09/08/1917 193
    FILIPKIN Dimitri Филипкин Дмитрий SOLDAT RUSSE 16/08/1917 194
    ISAKOW Timofe Исаков Тимофей SOLDAT RUSSE 17/08/1917 195
    ROMANOSKY Thomas Романовский Фома SOLDAT RUSSE 19/08/1917 196
    PODMARILOW J Подмарилов Я. SOLDAT RUSSE 02/07/1917 197
    SCHMUT Iwan Шмут Иван SOLDAT RUSSE 06/07/1917 198
    TEMTSCHUK Philipp Темчук Филипп SOLDAT RUSSE 06/07/1917 199
    INOSIENZOW Michael Иноземцев Михаил SOLDAT RUSSE 08/07/1917 200
    ILOUCHIN Iwan Илюхин Иван SOLDAT RUSSE 08/07/1917 201
    ROBROW Leon Робров Леон SOLDAT RUSSE 21/07/1917 202
    KARASIWITSCH Franz Карасивич Франц SOLDAT RUSSE 20/07/1917 203
    MUSTEKISCH Joseph Мустекич Иосиф SOLDAT RUSSE 01/03/1917 204
    SSANNASENKO Gregori Санасенко Григорий SOLDAT RUSSE 01/03/1917 205
    MINDOROSC Willi Миндороц Уильям SOLDAT RUSSE 03/03/1917 206
    SERELNAKOW Jakob Серельняков Яков SOLDAT RUSSE 11/04/1917 207
    SCHOLTUNOW Luka Шолтунов Лука SOLDAT RUSSE 12/04/1917 208
    FUROW Mark Фуров Марк SOLDAT RUSSE 06/04/1917 209
    BERENATZKI Jacob Березнатский Яков SOLDAT RUSSE 01/08/1917 210

 

 Le site  в 1914-1918 гг., военнопленных Русского  regroupe les noms de soldats et prisonniers Russes inhumés en France.
Rechercher Валансьен pour Valenciennes (208 occurences) et Фраснуа (1 occurence, un inconnu) pour Frasnoy. La dernière mise à jour de ce site date du 11/04/2012.

 

  •        De très nombreux noms à consonance russe apparaissent dans les registres de décès de Condé-sur-l'Escaut, notamment en 1917.  La transcription souvent phonétique rend très difficile la localisation de leurs tombes, si tant est qu'elles aient été conservées.
  •       5 soldats russes sont inhumés au cimetière militaire allemand "Deutscher Soldatenfriedhof" de Frasnoy (Nord-France) ; leur croix (latine) en béton se distingue aisément des croix en fer des Allemands (et des quelques stèles juives), il s'agit des mêmes croix que celles du carré russe du cimetière St-Roch de Valenciennes, où ces 5 hommes devraient se trouver.

    2020-02-05_174340 2020-02-05_174358 2020-02-05_174418 2020-02-05_174432 2020-02-05_174457
    FIRJEW Pawel
    Soldat Russe
    2-11-1917
    SOMELECKIN Iwan
    Soldat Russe
    21-5-1917
    MELNIKOW Iwan
    Soldat Russe
    20-2-1918
    SPIRANSKI Nicolaï
    Soldat Russe
    Le 28.03.1917
    DORESPIHEFF Batag
    Soldat Russe
    23-4-1918
  • De nombreux Russes sont portés décédés dans les actes d'état-civils de la vile de Denain en 1917 (la Kommandantur gérant les inscriptions qui n'apparaisent plus ensuite). Parmi ceux-ci, à titre d'exemple Pawel SSYTSCHOW(sic), peut-être СЫЩЕВ Павел de Самсоново, les retranscriptions en cyrilliques restant hasardeuses, dont l'acte a été également transcrit à Trith-St-Léger où il est décédé.

    SSYTSCHOW Pawel 19170314 Denain


     
  •  Sur la photo ci-dessous, extraite d'une carte postale montant une partie du cimetière allemand de Valenciennes durant la guerre (coll. perso.), on distingue quelques noms  sur la tombe située derrière celle du Français Marcel DORIZON,
    Boris GOD??, ?(Pa)?wel RASPOPOW, ??isch GA??, William ??, Iwan ??, qualifiés chacun de "russ. K.G." (Russische KriegsGefangene : prisonnier de guerre russe).

    Tombes St Roch

 

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5 avril 2011

Bombardements de Pâques 1917

 

Précédent : 1916 Valenciennes et l'aviation Suivant : 1918

 

Avril 1917

 

 

     Le Vendredi Saint, 6 avril, par un beau soleil de printemps, à 8 h. 20 du matin, nous fûmes heureux de voir à l'horizon six avions français ou anglais, à une très grande hauteur. Imprudemment, nous les regardions, malgré les obus allemands qui éclataient autour de nous.

     Mais la leçon qui nous fut donnée ce jour-là nous obligea à prendre des précautions. Les aviateurs commencèrent à lancer quelques bombes sur le champ d'aviation, puis firent le tour de la ville, pendant qu'un avion allemand tâchait de les attirer vers la terre. Malheureusement, une de ces bombes allemandes retomba, rue de l 'Hôpital-de-Siège, causant d'énormes dégâts dans le quartier, tuant quatre personnes et en blessant huit autres.

Furent tuées:

  • Mme Célina Jorieux, veuve Clément, âgée de 72 ans.
    • Son acte de décès, dressé le même jour donne les renseignements suivants :
      "Célina JOLIO, Ménagère, née à Valenciennes le 8/06/1845, y domiciliée, fille de feu Pierre Simon Joseph Jolio et de feue Catherine Charlotte QUENTIN, veuve de Louis CLEMENT, est décédée à 8h rue de l'Hopital de Siège"
      [NDR]
  • Mathilde Billoir, 8 ans, eut les entrailles perforées.
    • Son acte de décès, dressé le même jour donne les renseignements suivants :
      "Alfreda Mathilde BILLOIRE, née à Valenciennes le 6/6/1919, fille de Alfred BILLOIRE Usinier, et de Augustine DUPONT, Ménagère, domiciliés à Valenciennes, est décédée à 8h rue de l'Hopital de Siège"[NDR]
  • Mme François, qui avait une affection cardiaque, tomba morte de frayeur.
    • Son acte de décès, dressé le même jour donne les renseignements suivants :
      "Maria DUVANT, Rentière, née à Valenciennes le 24/11/1853, fille de feu François Joseph DUVANT et de feue Joséphine BUSSIN
      , épouse de Désiré FRANCOIS, est décédée à 8h rue de l'Hopital de Siège"[NDR]
  • Un militaire qui se trouvait à proximité fut également tué.
    • Peut-être le caporal Allemand Michael WAGNER, du 1er régiment d'artillerie de campagne Bavaroise, transporté à l'Ambulance du Collège de Jeunes Filles Boulevard Pater (voir ce sujet).[NDR]

 

Furent blessés:

  • Gillot Polycarpe, 74 ans, blessé très grièvement aux jambes.
    • Celui-ci, né le 25/09/1843 à Orsinval, décédera à l'Hospice de l'Hotel-Dieu le 13 avril à 19h.[NDR]
  • Julia Clément, 16 ans, blessée aux jambes.
  • Mme Denecquevart, 60 ans, blessée aux bras.
  • Ernest Rolle, 40 ans, blessé aux bras.
  • Laure Renversé, 28 ans, blessée aux bras.

     Le général en chef de la Croix-Rouge logeait chez M. Chamfort : la maison fut criblée de projectiles. Dans le quartier, il ne restait plus de vitres, et la Commandanture donna l'ordre à la Ville de remettre des carreaux.

     La Gazette des Arennes du 15 mai fait référence à cette journée dans sa rubrique régionale. Journal édité et rédigé par l'occupant, l'article ne manque pas  d' "enfoncer le clou" de la responsabilité.

1917-300 0604

      A la séance du 9 avril 1917, M. le Maire exprima le regret que les premières victimes des obus tombés rue de l'Hôpital-de-Siège aient été enterrées si hâtivement, sur l'initiative de l'autorité allemande, et sans que la Municipalité en fût prévenue. Celle-ci, ainsi que le Conseil municipal, n'aurait pas manqué d 'y assister, conformément à la coutume en cas de deuil public.

    Le même jour, à 3 h. 1/2 de l'après-midi, la commune de Bruay [-sur-Escaut] demandait la voiture d'ambulance pour transporter sept personnes blessées dans les mêmes conditions.

C'étaient:

  • Dupire Léonie, 11 ans.
    • Son acte de décès, dressé à Valenciennes le 9 avril, indique :
      "Léonte Joséphine DUPIRE, née à Bruay sur Escaut le 25/08/1906, décédée à 19h à l'Hospice de l'Hotel-Dieu" [NDR]
  • Desmontiers Raymonde, 4 ans.
    • On trouve un acte de décès au nom de "Honorine Heugénie DESMOUTIEZ, née à Anzin le 6/10/1912, domiciliée à Bruay, décédée le 8/04/1917 à 16h à l'Hospice de l'Hotel-Dieu ." [NDR]
  • Renaux Robert, 15 ans.
  • Grenelle Louis, 11 ans.
  • Desmontiers Jeanne, 20 ans.
  • Desmontiers Louise, 20 ans.
    • Décédée à l'Hospice de l'Hotel-Dieu de Valenciennes le 12 avril 1917 à 18h. (acte dressé au nom de DESMOUTIEZ Louise) [NDR]
  • Valencourt Auguste, 9 ans.
  • Les deux premiers moururent, et l'on dut amputer du pied droit le jeune Grenelle.

     M. le Maire proposa d'adresser un témoignage ému de vive sympathie à toutes ces victimes de la guerre, notamment à celles de Valenciennes; surtout que, suivant de graves présomptions, devenues depuis certitudes, ces malheureux tombaient le plus souvent frappés par des projectiles allemands.

Extrait du livre de René Delame : "Valenciennes Occupation allemande 1914-1918. Faits de guerre et souvenirs" Hollande & Fils ed. 1933

Voir également :  Bombardements de Mai 1917

 La Gazette des Ardennes du 15 mai 1917 citée plus haut fait état d'un bombardement le Lundi 23 avril 1917

1917-300 2304

 

CARIGAND Arthur Jules, décédé le 20/05/1917 à l'Hôtel-Dieu de Valenciennes. Journalier, né le 6 avril 1875 à Valenciennes, époux de Julia BRASSART. ( 42 ans donc, et il n'existe pas de Carigand Félix)

 

Le 30/09/1917 la Gazette des Ardennes signale deux frères blessés à Valenciennes : BLAS Maurice et Daniel

 

GDA 1917-592

 

     BLAS Maurice, né en 1903, ce qui peut correspondre avec le précédent, décède de ses blessures lors du raid du 27 mai 1918 (acte 308, registre des décès à Valenciennes, cote AD59 : 3 E 5784).  Il y a peu de chance de retrouver la trace d'un blessé pour obtenir confirmation, toujours est-il qu'il a été déclaré récemment "Mort pour la France" (



Le 15/12/1917, la même gazette liste les victimes d'un bombardement survenu le 6 décembre 1917

 

1917-721 1215

  • Deux tués figurant dans les registres d'état-civil :
    • FOUCART Jules Léon, forgeron, né le 20/12/1872 à Bruay, décédé au chemin de Halage,
    • GUIDEZ Amélie Adélaïde, marchande foraine, né le 13/05/1898, décédée à la gare de Valenciennes
  • Trois blessés : STEEMECKERS Stéphanie, 17 ans, CACHEUX Léonie, 16 ans et VANDENBERGE André, 15 ans.

 

 

 

Précédent : 1916 Valenciennes et l'aviation Suivant : 1918

 

 

 

25 mars 2011

N'oubliez pas l'avion 56

 

Valenciennes et l'aviation (1)


Samedi 25 septembre 1915 : Nouvelle émotion qui dans l'histoire de notre aviation mérite une page spéciale.


Par un temps gris et pluvieux, avec des nuages qui couraient très bas, nous vîmes sortir tout-à-coup parmi les obus, au dessus de la fosse à charbon de la Bleuse-Borne, un avion monté par trois officiers français. Il portait le numéro 56, numéro qui est demeuré gravé dans notre mémoire, et que l'on pouvait lire car il volait très bas, à 30 ou 40 mètres à peine et l'on entendait parfaitement les aviateurs criant aux personnes qui agitaient leur mouchoir: " Mais cachez-vous donc! "
Une bombe manqua le pont du chemin de fer et tomba dans le canal. Continuant son vol, l'aviateur en lança une seconde sur le dépôt des machines. Malheureusement, un mécanicien qui était rentré la veille de permission, reçut en se sauvant la bombe en pleine poitrine, il fut tué net, mais le projectile en tombant sur le côté n'éclata pas, sans quoi les dégâts eussent été considérables.
 
L'avion passant au-dessus de la gare, reçut une véritable salve ; les soldats tirant avec leurs fusils, et les officiers avec leurs revolvers, mais les aviateurs ripostèrent avec leur mitrailleuse, lancèrent une quatrième bombe sur l'usine des fers-à-cheval, où se trouvait un dépôt de munitions. Hélas, cette fois encore le but fut manqué.
Des jeunes recrues [allemandes] qui faisaient l'exercice dans le marais de l'Epaix, croyant que cet avion était allemand criaient et dansaient. Mais en entendant l'explosion, tous se sauvèrent, sans même penser à tirer. Avant de nous quitter l'avion passa sur la ville, frôlant les toits avec une audacieuse ironie, et disparut dans les nuages. Un tel courage nous rendit rêveurs, et tous nous souhaitions qu'une telle prouesse fut récompensée.


Aussi, répétons-nous encore aux pouvoirs publics: " N'oubliez pas l'avion 56 ".


Naturellement, ces exploits de nos aviateurs attirèrent sur la population de nombreuses représailles : nombre de fois après les visites, tous les permis de circulation étaient retirés, et nous étions obhgés de rentrer chez nous avant la tombée du jour.

Extrait du livre de René Delame : "Valenciennes Occupation allemande 1914-1918. Faits de guerre et souvenirs" Hollande & Fils ed. 1933

 

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12 février 2011

LEHARLE Georges

 


ARRESTATION DE L'INGÉNIEUR LEHARLE
SON PROCÈS, SA CONDAMNATION



Le 1er Mai 1915, M. Leharle, qui, nous l'avons vu avait pris une si grande part à la fuite des évadés de Maubeuge et de leur commandant, était informé par une personne de Quiévrechain, que les Allemands, ayant eu connaissance du dépôt de fusils, provenant, on le sait de la colonne du commandant Charlier, allaient faire une perquisition le lendemain. Pendant la nuit, M. Leharle, aidé du personnel de la surveillance de la mine, voulut placer les armes dans une autre cachette; on ramassa fusils et baïonnettes, et on alla les jeter dans le puits n° 2, qui était alors en fonçage et rempli d'eau.

Mais les Allemands eurent connaissance de ce fait; le lendemain, ils arrêtaient M. Leharle, puis quelques jours après l'Ingénieur du fond, ainsi que tout le personnel de surveillance, qui avait coopéré à la cachette des fusils.
L'instruction ne fut pas longue; les Allemands ayant en mains plus de preuves qu'il n'en fallait que les armes avaient été cachées dans le puits n° 2, ce qui força M. Leharle à avouer avoir commandé ce travail.
Il faut ajouter qu'à ce moment, il avait été placardé sur les murs de la commune, un avis du commandant de la région, disant que toute personne qui serait connue comme détenant des armes serait fusillée.

Me Douay, avocat, conseiller municipal de Valenciennes, fut autorisé à le défendre devant le Conseil de Guerre, qui se réunit le 15 mai 1915 dans l'après-midi à notre Hôtel-de-Ville. Malgré une brillante et ferme plaidoirie, l'Ingénieur Leharle fut condamné à la peine de mort. Celui-ci qui avait fait preuve d'un très grand courage et d'un caractère admirable, avait tenu à réclamer pour lui seul toute la responsabilité de la cachette de ces armes.
Pendant l'audience, il fit preuve d'un très grand sang-froid, et ses réparties impressionnèrent profondément ses juges, par exemple la suivante:

Au cours de la séance, le juge d'instruction au Conseil de guerre dit en allemand à l'interprète de rappeler à M. Leharle qui regardait par la fenêtre ce qui se passait sur la place d'Armes, qu'il devait prêter attention à ce qui se passait, puisqu'il s'agissait, disait le juge, de sa tête.

M. Leharle qui connaît la langue allemande, sans attendre la traduction répondit: "Mais Monsieur, puisqu'il s'agit de ma tête comme vous le dites, permettez-moi de profiter encore une fois des rayons du soleil. "
Aussitôt que sa condamnation lui fut signifiée, M. Leharle eut le courage de dire simplement: " Je remercie mes juges de la correction dont ils ont fait preuve vis-à-vis de moi et je m'incline devant leur décision. "

Le président du Conseil de guerre, un officier de uhlans qui jusque là s'était montré d'une raideur comme savent en avoir les Allemands s'est alors, pour employer l'expression de M. Leharle "dégelé ".
- Comment Monsieur, vous nous remerciez. dit-il à M. Leharle. Et ce dernier de répliquer:
- Je ne vous remercie pas précisément de m'avoir condamné à la peine de mort, je répète que je vous remercie de votre correction et que je m'incline devant votre décision.

Me Douay lui fit signer un recours en grâce que signa égale. ment le Conseil de guerre qui devait être envoyé à l'empereurd'Allemagne. Quelques semaines plus tard on apprenait que la peine était commuée en quinze ans de travaux forcés.

A la séance du 15 juin 1915, M. Tauchon, maire de Valenciennes, exprime toute sa joie de savoir que M. Leharle avait vu sa peine changée en quinze années de détention dans une maison de correction.
Il rappela aussi que M. Leharle fut très crâne, et qu'il a donné une preuve admirable du véritable caractère français, impassible devant la mort.
Il adressa ensuite ses félicitations à M. Douay secrétaire du Conseil et avocat, qui avait aidé M. Leharle dans la préparation de sa défense.
Le Conseil tout entier s'associa aux paroles exprimées par M. le Maire.

M. Leharle fut emmené en Allemagne et soumis pendant assez longtemps à un régime abominable.
Il fut incarcéré pendant un certain temps au milieu de prisonniers de droit commun, puis envoyé à Werders, où on le fit travailler à des effets militaires.
Un jour, le commandant Charlier en permission chez des parents à Melun, rencontra une dame quêteuse, qui lui raconta la scène poignante à laquelle elle venait d'assister.

Il s'agissait d'une lettre arrivée d'Allemagne. Les parents d'un prisonnier reconnaissant l'écriture de leur fils, qu'ils croyaient mort depuis un an, la mère sanglotait, le père retenant ses larmes avait dit :
"Je ne veux pas qu'on pleure, je suis content de mon fils;"

Le Commandant qui n'avait jamais cité le nom de Leharle, pour ne pas le compromettre, s'empressa dès qu'il apprit ce fait de courir chez les parents de M. Leharle, pour leur donner connaissance de la belle conduite de leur fils, et leur conseilla d'en informer le Gouvernement français.
Au moment où un arrangement intervint entre la France ·et l'Allemagne au sujet du sort des prisonniers politiques, la situation de M. Leharle fut un peu adoucie; il put échanger quelques lettres avec sa famille et même avec l'ingénieur qui était resté à Quiévrechain, et à qui il avait confié le soin de veiller aux intérêts de la compagnie et du personnel pendant sa captivité.

L'armistice vint heureusement le délivrer, et immédiatement après le Gouvernement français lui accordait la Croix de Chevalier de la Légion d'Honneur, récompense bien méritée!

Extrait du livre de René Delame : "Valenciennes Occupation allemande 1914-1918. Faits de guerre et souvenirs" (Hollande & Fils ed. 1933)

 

  • LEHARLE Georges Charles Eugène
    Né le 22 Janvier 1871 à  Dammarie les Lys (Seine-et-Marne)
    Diplomé de l'Ecole Nationale Supérieure des Mines.
    Soldat au 72°RI
    Ingénieur en Chef aux Mines de Crespin (Nord)
    Nommé Chevalier de la Légion d'Honneur par décret du 4 Février 1921
    Décédé le 30 Janvier 1954

 

 

11 février 2011

Le Colonel CHARLIER

Cet extrait du livre de René Delame : "Valenciennes Occupation allemande 1914-1918. Faits de guerre et souvenirs" (Hollande & Fils ed. 1933) traite principalement d'un militaire, mais il met en évidence les premiers actes de résistance de civils qui seraient incompréhensibles  sans les rattacher aux faits qui les ont motivés :

 

L'ODYSSÉE DU COLONEL CHARLIER.
Extrait des notes du colonel Charlier, aujourd'hui déposées au Musée de la guerre.

 

Le commandant Charlier, officier colonial, était sur le point de rejoindre son poste au Congo quand la guerre éclata. Il obtint une lettre de mobilisation pour servir en France et fut envoyé à Maubeuge où il fut chargé de l'arsenal de Falize situé à deux kilomètres en dehors des murailles de la ville, admirablement placé en temps de paix, mais très exposé en temps de guerre, aussi fut-il complètement détruit le 30 août au début du bombardement.
Le dimanche 6 septembre, la situation devenait critique, les convois de munitions revenaient tous sans avoir été déchargés et le colonel recevait le dimanche matin de la Réserve généra1e une note disant de ne plus envoyer de munitions.

Il apprenait que le matin à 6 heures, ordre avait été donné de brûler les étendards. Un avion allemand avait survolé la ville lançant un message qui sommait la ville de se rendre. Toutes communications étant coupées, le colonel, alors commandant Charlier, se rendit auprès de son chef direct, le colonel Duchesne, Commandant d'artillerie pour lui demander des ordres.

La route était battue par le bombardement et il trouva les ponts-levis fermés. Enfin ayant fait le tour de la ville, la sentinelle de la porte de Mons lui apprit que la population civile avait été évacuée et que nul ne pouvait entrer dans Maubeuge. Il rencontra enfin le colonel Duchesne qui fut surpris de le voir, le croyant au courant de la mise en vigueur de la nouvelle organisation et le mit à la disposition du commandant Caillot qui lui commanda de faire sauter l'arsenal de Falise à l'heure qui lui serait fixée par son nouveau chef. Cet ordre fut exécuté à 7 heures du soir.
Quand le colonel Charlier arriva à Hautmont, vers la fin de l'après-midi du 6 septembre, il y trouva les divers services évacués de Maubeuge, des détachements y venaient cantonner donnant l'impression qu'il s'agissait d'un plan bien arrêté.

Aucun ordre ne parvenait plus à Hautmont, on ne savait ce qui se passait, les bruits les plus contradictoires circulant. L'arrivée successive des troupes faisait penser qu'il se préparait une vigoureuse percée.
Le lendemain matin, lundi 7 septembre, il tut étonné de ne pas avoir reçu d'instructions pendant la nuit.
La ville présentait le spectacle d'une confusion indescriptible, trente à quarante mille individus, soldats, civils, hommes, femmes, enfants, voitures, grouillant à l'aventure tourbillonnaient dans la ville. L'atmosphère de débâcle et de catastrophe pesait sur cette foule, on croisait des hommes las, à bout de ressort, courbés sous la fatalité, d'autres, moins exténués et plus vigoureux, frémissaient de tout leur être à la perspective d'une captivité, se demandant comment sortir du filet dont on sentait les mailles se resserrer de minutes en minutes.
Cette foule toute entière était irrémédiablement condamnée à la captivité, personne ne sachant ce qui se passait à Maubeuge. Le commandant Charlier finit par franchir cette cohue pour rejoindre le commandant Caillot qui considérait comme tous, ce spectacle, atterré et le cœur serré. Il lui demanda des ordres, le Ct Caillot n'en avait pas et ne savait que faire. Aussi alla-t-il au fort du Bourdiau pensant y l'en contrer le Gouverneur, mais Il ne put le joindre, non plus que le général Peyrecave, commandant la section de Hautmont.

La conviction du Ct Charlier devenait de plus eu plus nette, devant le désordre croissant, Maubeuge était incapable de réagir, ce n'était plus qu'un moribond, dont l'agonie touchait à son terme.
Sur un des côtés de la place de Hautmont, un petit groupe d'hommes d'environ deux cents, était rassemblé en ordre avec les officiers, auprès de quelques véhicules chargés la veille.

C'était tout ce qui restait du parc d'artillerie. A sa vue une délégation de quelques sous-officiers et de quelques hommes vint à sa rencontre et lui dit :
- Mon Commandant, nous sommes chargés par nos camarades de vous dire que nous vous suivrons partout ou vous voudrez nous conduire.
Il ne put que leur répondre, très ému de leur démarche :
- Mes pauvres amis, je suis touché de votre confiance, puisque vous voulez venir avec moi, nous essaierons de passer, je ne sais d'ailleurs pas comment. Mais je dois vous avertir qu'avant que nous ayons fait quatre kilomètres nous serons probablement tous tués, aussi je ne force personne à me suivre, je ne veux que des volontaires.
A quoi l'un d'eux répondit :
- Ça vaudra mieux que d'être prisonnier! Et aucun ne quitta les rangs.
Il fit alors distribuer des cartouches et des armes nouveau modèle, puis alla à la recherche du Ct Caillot qu'il ne put rencontrer.

Le temps pressait, les minutes étaient précieuses, aussi la petite troupe se mit en route sur Neuf-Mesnil dominant la cuvette de Hautmont entre 8 heures et 9 heures du matin, le lundi 7 septembre, elle comptait un effectif de 300 hommes.
Le Commandant envoya des bicyclistes en reconnaissance et alla seul sur la route de La Longueville voir l'aspect de la région qu'il ne connaissait pas. A quelques kilomètres de là, il trouva le bois des Hoyaux et rencontra quelques artilleurs revenant sur Hautmont et qui étaient exténués. Le capitaine Parasol qui les commandait, était grièvement blessé ayant rencontré l'ennemi près de la forêt de Mormal, il ne tarda pas à mourir, et ses hommes suivirent le Ct Charlier.
Au fur et à mesure qu'ils approchaient de Feignies, ils rencontraient de plus en plus d'isolés. Ils y arrivèrent vers midi. La petite troupe put alors se ravitailler, car elle n'avait rien pris depuis vingt-quatre heures. Le Commandant mit un peu d'ordre dans les nouveaux éléments recrutés en cours de route.

La chaleur était écrasante, à la sortie du village il rencontra un détachement de soixante-sept fantassins du 145e conduits par deux sergents qui se trouvaient séparés de leur bataillon par suite de la destruction d'un pont que l'on avait fait sauter.
Les hommes confirmèrent que le drapeau blanc avait été hissé sur Maubeuge et que la sonnerie " Cessez le feu " avait retenti. Il leur fit les mêmes recommandations qu'à ses hommes et après s'être concertés revinrent cinq minutes après, lui dire simplement: " Nous partons avec vous ".

La moitié de ces fantassins prit la tête du détachement, l'antre moitié marcha derrière la colonne. Le Ct Charlier se dirigea ainsi vers le bois de la Lasnière ayant comme objectif Lille, mais avant de partir tous regardaient Maubeuge les larmes dans les yeux.

C'est bien sur cette petite troupe que les uhlans tiraient lorsque je [René Delame, l'auteur] fus arrêté et fouillé à Tasnières-sur-Hon avec M. Gravis et l'infirmière Cheval. Peut-être notre présence a-t-elle fait diversion et a-t-elle permis au Ct Charlier de franchir la route avec ses hommes pendant que l'officier examinait mes papiers.
L'intention du Ct Charlier était de gagner le plus rapidement possible un couvert afin de dissimuler sa marche en se dirigeant sur Malplaquet que les renseignements des cyclistes représentaient comme le plus faiblement défendu et ensuite profiter de la nuit pour avancer le plus rapidement possible sur Lille à marches forcées.

En sortant de Feignies il trouva un grand nombre d'hommes isolés parmi lesquels le capitaine Magniers, Ingénieur des Tabacs, dont la conduite pendant le siège du fort des Sarts, avait été héroïque : Il réorganisait sa troupe en vue d'une troisième tentative.
Parti de Hautmont à deux heures du matin avec trois cents hommes, le détachement en comptait plus de douze cents à deux heures de l'après-midi sans compter la batterie Magniers, dont l'itinéraire différa au sortir du bois de la Lasnière.

Afin d'alléger une colonne aussi nombreuse le Commandant fit détruire tout le matériel, camions, voitures, chevaux, projecteurs, qui alourdissaient la marche.
Elle s'enfonça dans le bois sans rencontrer d'obstacles jusqu'à la lisière Nord où elle se heurta à une résistance allemande. Le détachement riposta avec intensité ce qui inquiéta le Commandant vu son faible approvisionnement de munitions. Il n'y eut heureusement qu'un tué. Les Allemands ayant cru à une grosse attaque, vu l'intensité de la riposte, s'étaient prudemment repliés. C'est à la suite de cette escarmouche que le groupe Magniers se sépara du précédent. Un cuisinier, nommé Gras, qui connaissait le pays, demanda au Commandant la permission de se mettre en civil afin de se renseigner sur les positions allemandes.

Pendant que le Commandant était occupé à mettre un peu de cohésion dans sa colonne et à l'encadrer, il fut accosté par un paysan à la face réjouie, un gros panier d'œufs sous le bras qui l'interpella joyeusement:
- Mon Commandant, voulez-vous des œufs ?
C'était le cuisinier Gras, de retour de Malplaquet, où il avait été vendre des œufs au poste allemand. Leur situation étant repérée, un canonnier vint dire au Commandant :
- Pourquoi passer par Malplaquet, je puis vous conduire à Lille sans qu'on nous voie. Je connais le chemin des bois, nous pouvons passer.
Le Commandant se décida pour cette solution et la colonne se mit en marche sous la conduite de son guide, marchant à travers bois.

Elle avait marché longtemps quand la nuit vint. A la clarté de la lune, elle entra dans une ferme pour se ravitailler. Après avoir marché toute la nuit, on aperçut enfin les lumières indiquant une agglomération. Le guide déclara qu'il ne connaissait plus le pays; la petite troupe se trouvait en Belgique, à Bougnies.
Le Ct Charlier y alla seul, revolver en main et frappa au hasard à la première porte ne sachant qui allait lui ouvrir.
Un homme parut, il lui demanda s'il y avait encore des Allemands dans le pays. Il lui répondit que depuis quelques jours il n 'y en avait plus et lui apprit où il se trouvait. Mais vous êtes Français lui dit-il; il lui répondit qu'en effet il était Français et avait avec lui une colonne voulant gagner Lille et ne connaissant ni le pays ni la route.
Il passa aussitôt un veston et dit :

- Je vais vous conduire jusqu'à Dour et là vous trouverez un autre guide. Il prit la tête de la colonne et ainsi, toute la nuit, cheminant au travers des troupes allemandes, de nouveaux guides les conduisirent, au péril de leur vie à Baisieux où ils arrivèrent à trois heures du matin. Voulant faire dormir ses hommes afin de continuer la nuit suivante sur Lille, le Commandant lui demanda de les conduire dans un bois ou dans une carrière.

- J'ai votre affaire dit le guide, je vais vous conduire à la mine où je travaille.

C'est ainsi qu'une heure plus tard, le mardi 8 septembre, vers quatre heures du matin, le Commandant venait demander à M. Leharle, Ingénieur en chef des mines de Crespin, à Quiévrechain, des vivres et l 'hospitalité pour sa troupe. Sans s'inquiéter du danger qu'il courait il les fit entrer dans le carreau de la fosse N° 2 assez vaste, entouré de murs où il était possible de les cacher. Les batteries de fours à coke étant arrêtées, il installa tout ce monde sous les voûtes de ces batteries.
M. Leharle annonça au Commandant que Lille était aux mains des Allemands. Le dernier espoir du Commandant s'évanouissait. Après Valenciennes, où il avait espéré trouver l'armée française, il fallait maintenant renoncer à Lille.

-Vous ne pouvez passer, dit M. Leharle, avant quelques heures vous allez être cernés de tous côtés et avoir devant vous des forces supérieures, il ne vous reste qu'un moyen de vous en tirer, d'ici· deux heures vos hommes auront eu la soupe et je vais rassembler des vêtements de mineurs, vous me donnez tout votre équipement armes et munitions, je cache le tout. Vous déguisez vos hommes en mineurs, ils disparaissent et vous les retrouvez à Dunkerque.

Le Commandant remercia M. Leharle de sa proposition, qui n'était pas sans un gros danger pour lui, ayant déjà dans son personnel quelques soldats anglais, il était familiarisé avec l'idée d'être fusillé un jour ou l'autre.
Le Commandant alla jeter un coup d'œil sur ses hommes qui s'étaient écroulés sous la fatigue et dormaient, sac au dos, à l'endroit même, où dans l'obscurité le hasard les avait placés. Lui-même s'étendit, ayant à ses côtés les lieutenants Gohon et Audoyer. Après avoir dormi une heure environ, vers 6 heures du matin il alla retrouver l'Ingénieur Leharle qui lui confirma les conversations de la veille lui disant que les Allemands envahissaient la région.

Le détachement avait un aspect lamentable et paraissait considérablement réduit, il manquait trois officiers et trois cent hommes, toute l'arrière-garde qu'il avait abandonnée chez le garde champêtre de Dours, le capitaine Charpentier, épuisé, ne pouvant plus marcher.

Voyant l'état de fatigue de ses hommes, après mûre réflexion le Ct Charlier estima que le plus sage était de se rallier à l'idée de M. Leharle. Il réunit ses hommes et leur dit qu'il avait espéré les ramener en armes à Lille, à l'armée française, mais que les renseignements qu'il venait de recueillir lui laissaient peu d'espoir, il allait ramasser fusils, équipements, effets, livrets militaires et leur distribuer des vêtements de mineurs, qu'ils se rendraient ensuite individuellement, le plus rapidement possible sans se grouper leur donnant rendez-vous à Dunkerque.

La plupart de ces hommes étant du Nord, connaissaient la région. Transformés en mineurs ils n'avaient, ni l'air emprunté, ni dépaysés.

Toutes ces opérations se déroulaient avec le concours de M. Leharle ( Nous dirons plus loin ce qu'eut à souffrir le bon patriote qu'était l'ingénieur Leharle, pour avoir agi en bon Français), quand arriva à la mine un garçonnet demandant à parler au Commandant. Un millier d'hommes, disait-il, étaient à quatre kilomètres de là, ayant appris la présence d'un Commandant à Quiévrechain, demandaient à se joindre à lui.

Pensant qu 'il s'agissait de son arrière-garde, il se fit guider par ce garçonnet, et alla les rejoindre.
Il rencontra le Lieutenant Darvogne de la territoriale et deux jeunes officiers, il était 9 heures du matin. Il avait fait une bonne partie du trajet, et n'avait plus guère qu'un kilomètre et demi à faire pour les rejoindre, lorsque tout à coup, à un coude de la route, éclatait une vive fusillade, et il vit à moins d'un kilomètre, des voitures de tramway qui traversaient la route, et d'où descendaient des Allemands, tirant sur le détachement qu'il voulait rejoindre.

  • Je[René Delame, l'auteur] me fais un devoir, dans cette affaire, de signaler la belle conduite des employés du tramway et un plaisir de. reproduire le rapport que me fit son dévoué directeur, M. Guillaume.

 

NOS TRAMWAYS ET LA GUERRE
( Extrait des notes de M. Guillaume, directeur des Chemins de fer Economiques du Nord, Réseau de Valenciennes.)


Dès le premier jour de la mobilisation le service dut être fortement réduit sur chacune des quatre lignes composant le réseau de Valenciennes, par suite du départ d'un grand nombre d'agents mobilisés.
Sur la ligne de Saint-Amand à Hellemmes, le service resta à peu près normal.

Pendant les premiers jours, les trains servirent surtout pour les hommes qui se rendaient à la destination de leur ordre d'appel. La région de Valenciennes fut envahie le 25 août 1914. par une armée allemande, qui, partie de Bruxelles dans la direction de Tournai, descendait vers le sud et cherchait à envelopper l'armée anglaise qui s'étaient établie suivant une ligne Biache-Mons-Condé.

Des troupes allemandes sillonnaient toute la région comprisr entre Lille, Valenciennes et Maubeuge.
Sur les lignes de Saint-Amand à Hellemmes et du réseau de Valenciennes, les trains qui avaient été réquisitionnés par l'autorité militaire française pour le transport des troupes, furent attaqués par des uhlans, à Planard (ligne de St-Amand à Hellemmes), et à Blanc-Misseron (réseau de Valenciennes).

Ils purent échapper en forçant la vitesse, après avoir été criblés de balles. Malheureusement sur la ligne de Saint-Amand à Hellemmes, le chauffeur, Payen Constant, eut un genou broyé d'un coup de feu qui lui fut tiré à bout portant par un uhlan qui galopait à côté de la locomotive.
Le service dut être complètement interrompu sur la ligne de Saint-Amand à Hellemmes et sur le réseau de Valenciennes.

Les Allemands ne continuèrent pas à occuper complètement la région desservie par la ligne de Saint-Amand à Hellemmes, ils restèrent sur la rive droite de la Scarpe.
Après quelques jours d'occupation, ils donnèrent l'ordre à la Compagnie de reprendre le service sur le réseau de Valenciennes, dans une certaine limite d'heures, avec l'obligation de transporter gratuitement les militaires allemands de tous grades.

Cependant comme les chemins de fer avaient cessé tout service, on réorganisa clandestinement celui de la ligne de Saint-Amand à Hellemmes qui constituait alors le seul moyen de communication entre Valenciennes et Lille, afin de faciliter le départ de tous les hommes mobilisables non encore convoqués qui restaient dans la région de Valenciennes, ainsi qu'un certain nombre de militaires évadés de Maubeuge qui s'étaient réfugiés dans nos environs.

Un incident, survenu le 12 septembre, mérite d'être signalé:
Vers 8 heures du matin, le colonel Kintzel, commandant de place de Valenciennes, réquisitionne trois trains électriques pour conduire des troupes à Blanc-Misseron afin de capturer un groupe d'environ cent cinquante soldats français, artilleurs et fantassins, qui, évadés de Maubeuge, cherchaient à gagner Lille en suivant la frontière franco-belge. Le watman Bronsart de service sur la ligne de Blanc-Misseron avait vu ces soldats aux Quatre Pavés de Blanc-Misseron et avait causé avec le lieutenant d'artillerie, commandant du groupe, auquel il avait fourni des indications sur la route qu'il était préférable de suivre.

Ces soldats français venaient de détruire trois automobiles et leurs occupants, chargées de soldats allemands, que le Commandant de Valenciennes avait lancées à leur poursuite.
Revenant vers Valenciennes. Bronsart rencontra vers Onnaing les trois tramways chargés de troupes conduits par ses collègues Wannepain, Lenoir et Van Overvelde, et devina aussitôt la mission confiée à ces troupes. Pour retarder leur arrivée à Blanc-Misseron il arrêta son train, bloqua ses freins et mit brusquement sa manivelle de commande à fond de parallèle. Il provoqua ainsi un appel considérable de courant et fit déclancher les appareils automatiques de la sous-station.

Les quatre trains restèrent en détresse faute de courant. Les collègues de Bronsart comprenant la manœuvre, l'imitèrent et chaque fois que le courant était remis démarrèrent ensemble avec les freins serrés pour provoquer un nouveau déclanchement à la sous-station. Cette manœuvre ayant été répétée plusieurs fois, il en résulta un long retard dans l'arrivée des trains à Blanc-Misseron, ce qui avait permis aux soldats français de prendre une grande avance et de s'échapper. Les watmans conduisant les trains de troupes furent menacés d'être fusillés. Heureusement pour eux, les Allemands ne purent établir qu'ils avaient provoqué ces interruptions de courant, sans quoi la menace eut été mise à exécution immédiatement.

Les Allemands ne s'aperçurent que tardivement du départ des hommes de la région par le tramway de Valenciennes-Saint-Amand-Hellemmes. Pour enrayer l'exode, le 21 septembre à. 11 heures, le Commandant interdit à la compagnie tout service et convoqua le personnel à son bureau. Après lui avoir fait des menaces pour avoir fait fonctionner la ligne de Saint-Amand à Hellemmes sans son autorisation, il voulut retenir prisonniers, tous les employés, mais il ne donna pas suite à cette menace.

Le service de Saint-Amand à Hellemmes permit à plus de 15.000 hommes mobilisables de gagner Lille et Dunkerque. L'invasion s'étant étendue vers le nord, ce service fut supprimé, et tout le matériel roulant enlevé.
Après de nombreuses démarches, les Allemands consentirent cependant à laisser la compagnie reprendre un service réduit sur une partie du réseau de Valenciennes, mais après quelques alternatives d'arrêt et de remise en marche, tout service public fut interdit à partir du 15 mai 1915, mais les trains continuèrent à circuler uniquement pour les besoins de l'armée d'occupation.

  • Nous reprenons maintenant la suite de l'odyssée du colonel Charlier.

Après avoir assisté à l'échauffourée des Allemands venus en tramway pour barrer la route aux évadés de Maubeuge, le Commandant vit le détachement français disparaître derrière le village de Blanc-Misseron. Dans l 'impossibilité de le rejoindre il retourna en hâte à la mine pour s'y déguiser en mineur et revenir prendre des renseignements sur le second détachement, qui continuant sa route, arriva assez à temps pour sauter dans le dernier train partant de Péruwelz ; le mécanicien ayant arrêté sa machine pour leur laisser le temps de monter.
Comme il venait de se promener seul et en uniforme pendant une heure dans la région, malgré son déguisement il ne voulut pas exposer plus longtemps M. Leharle qui lui avait donné les vêtements d'un maître porion plus maigre que lui.

Les effets des soldats français furent brûlés dans les fourneaux à coke qui, bien qu'arrêtés depuis le 28 juillet 1914, contenaient encore du coke en ignition. Les armes furent dissimulées en plusieurs endroits du carreau de la fosse.
Après avoir remercié M. Leharle, à qui il laissa son sabre et son revolver, il disparut dans les champs comme un vieux chemineau. Ne connaissant pas le pays, il erra un moment et vit une plaque indiquant "Onnaing : 4 kilomètres."
Ce fut un trait de lumière et un rappel de souvenir.

Le capitaine Carpentier lui avait dit un jour: " Si le hasard vous amène du côté d'Onnaing, allez de ma part trouver le curé de l'endroit, c'est un de mes amis, homme débrouillard, il trouvera bien le moyen de vous aider." Le hasard l'amenait justement à côté d'Onnaing. Toute la nuit, conduit par des guides successifs et par des chemins qu'il ignorait, il erra, et finit par trouver le presbytère.
Un laïc ouvrit l'air soupçonneux et rébarbatif.

-Je viens chercher, dit le Commandant, le curé pour un de mes parents qui est gravement malade à Dours.
Le regard du portier devint de plus en plus soupçonneux.
- Le curé n'est pas là, répondit-il, s'apprêtant à fermer la porte.
- Eh bien! Je l'attendrai, répondit le Commandant.

Après un quart d'heure, la porte grinça, le brave curé à la figure ouverte et joviale le pria d'entrer dans son bureau.
- Vous venez me chercher pour un malade, dit le curé en l'examinant et sur sa réponse négative ajouta:
- N'êtes-vous pas le chef du détachement qui est arrivé cette nuit à la mine?
Le Commandant fit signe que oui.

- Vite donnez-moi votre bague et votre alliance, elles vous trahiraient ainsi que votre portefeuille et filez, il y a des perquisitions dans le village. Je vais vous conduire par le jardin à un dédale de ruelles conduisant à la campagne.
Arrivés au sortir de ces ruelles le curé lui dit :
- Disparaissez dans les champs, et quand il n 'y aura plus de danger je viendrai dire mon bréviaire sur la route. Quand vous m'apercevrez, suivez-moi à distance et vous reviendrez chez moi.

Le Commandant avait aperçu, en venant à Onnaing une briqueterie déserte, et il s'étendit et se dissimula sous les paillassons. Comme depuis une dizaine de jours il n'avait pu se reposer, il ne tarda pas à s'endormir.
La route était pavée, il entendit résonner le pas des chevaux d'une patrouille allemande.
Ne voyant personne, il risqua un œil et quitta sa cachette en apercevant le curé qui inlassablement lisait son bréviaire. Conformément à ses conseils il se dirigea vers lui dans la direction de la ruelle où le curé l'attendit et le fit entrer chez lui disant:
-Il n'y a plus de danger, les Allemands sont partis et on nous préviendra s'ils reviennent. Vous allez manger et passer la nuit ici, je vais vous montrer votre chambre.

Le Commandant se récria disant qu'il était indésirable.
- Vous êtes fatigué répondit-il. Je vous donnerai un guide demain au point du jour quand vous aurez dormi et il ajouta avec simplicité:
- Ma peau vaut la vôtre, et si vous êtes fusillé je le serai avec vous. Je vous montrerai d'ailleurs une surprise tout à l'heure, quand vous aurez vu votre chambre.
Puis le curé lui donna quelques renseignements sur les Allemands, dont les tramways venaient de retourner à Valenciennes, abandonnant la poursuite semblait-il.

Après lui avoir montré sa chambre le curé ouvrant la chambre voisine lui dit :
- Regardez.
Quelle ne fut pas la stupéfaction du commandant Charlier, de voir étendu sur lit, blanc comme un mort, avec une soutane et des vêtements de prêtre à côté de lui, le capitaine Charpentier qu'il avait abandonné à Dours la nuit précédente. Après s'y être reposé un peu il avait trouvé un voiturier qui, malgré les interdictions de circuler l'avait amené de nuit à Onnaing, où le curé le soignait comme un confrère de passage.

Le curé garda quelque temps le capitaine Charpentier, dont la santé nécessitait de grands ménagements, et celui-ci put vers la fin de septembre repasser les lignes et reprendre du service pendant toute la durée de la guerre. Le lendemain, 9 septembre 1914, au point du jour, n'ayant pas eu le courage de refuser le repos et la cordiale hospitalité qu'avait offerte si crânement l'abbé Lequin, le commandant Charlier continua sa route vers Lille accompagné d'un guide qui devait lui faire traverser la forêt de Raismes.

La veille un détachement allemand y était venu pour couper la route à une troupe française. Le Commandant continua donc sa route sur le Rosult où le curé d'Onnaing l'avait envoyé chez un de ses amis horloger qui devait lui fournir des renseignements sur la région, Ce dernier l'adressa au curé du village voisin, qui l'envoya chez les parents de sa bonne à Bouvines.

C'est chemin faisant que le Commandant apprit par des travailleurs des champs qui prenaient leur repas, qu'on le croyait mort. L'un d'eux, parlant du détachement de Quiévrechain qui s'était caché dans la mine, racontait que tous les hommes avaient pu s'échapper sauf le Commandant qui avait été surpris et fusillé ce matin!
Quand il quitta Bouvines, le 10 septembre dans la matinée, tous les gens du pays étaient convaincus que Lille était occupée par les Allemands, aussi ne fut-il pas peu surpris en arrivant à 4 kilomètres d'entendre des cyclistes annonçant les journaux français : tout réconforté il se hâta de se diriger vers la ville.

Son premier soin fut de se rendre à la Préfecture, pour informer le préfet de la chute de Maubeuge. Le Préfet vint aussitôt à lui, disant :
-Je vous attendais.
Le Commandant lui raconta la capture de Maubeuge, avec 4 généraux, 400 officiers, 40.000 hommes et 400 canons.
En effet, le 7 septembre, le Préfet avait connu le nom du Commandant Charlier par sa troupe qui avait pû prendre le dernier train à Camelle. ce qui avait permis à ses soldats de rentrer en armes à Dunkerque, la nuit suivante.
Pendant que le préfet, M. Trépont, racontait les brutalités qu'il avait subies de la part des Allemands pendant leur pré-occupation, un agent de renseignements entra précipitamment, disant au Préfet: "Un corps d'armée descend sur Lille, il est actuellement à Menin" C'était cet agent qui avait procuré au détachement des lieutenants Darvogne, Morin et Binoche, le moyen de s'embarquer à la gare de Camelle.

Le Préfet envoya le Commandant prendre un train à Hazebrouck, mais la gare était déjà fermée, il lui fallut donc pour· suivre cette longue route à pied. Le hasard le fit rencontrer son camarade Thiéry, qu'il avait laissé dans le bois de La Lanière. M. Thiéry, chef de l'arsenal de Maubeuge était repassé par Valenciennes, où il avait appris pourquoi les Allemands les avaient poursuivis avec si peu de vigueur: C'est qu'ils expédiaient en hâte, des renforts sur la Marne. De Valenciennes, étaient seulement partis deux forts détachements d'hommes, car l'on n'osait trop dégarnir cette ville importante.

Le commandant Charlier, et le lieutenant Thiéry poursuivaient leur route, lorsqu'ils aperçurent qu'un train se formait à Saint-André. Ils s'approchèrent, et trouvèrent sur le quai trois cents mineurs, qui s'écrièrent: "Voilà le Commandant. "

Ce lui fut une grande joie de retrouver ses hommes qui, fidèles au rendez-vous rejoignaient Dunkerque.
Le Commandant ressemblait à un véritable mendiant avec les vêtements usés, salis par la poussière des longues routes. Il apprit donc que le train se dirigeait sur le Crotoy, et donna à un employé un mot pour sa femme et ses enfants, qui s'y trouvaient. Il arriva à Dunkerque le 11 septembre, et reprit son service.

  • Après l'armistice, l'abbé Lequin, curé d'Onnaing, reçut la Croix de Guerre pour sa conduite pleine de dignité et de dévouement pendant l'occupation. Comme félicitations après un si courageux exploit, le commandant Charlier fut accusé, six ans après, de capitulation et d'abandon de poste. Aussi, écrivit-il de Bucarest, où il apprit par les journaux cette triste accusation, une énergique protestation.

 

  • Le journal "Le Petit Parisien" rend compte du procès devant le 2e conseil de guerre qui a débuté le 12 avril : le général Fournier, gouverneur de Maubeuge en 1914, comparait devant le 2° conseil de guerre, présidé par le général de Maistre.  Aux côtés du général prendront place cinq officiers qui commandaient les forts de la place et qui sont inculpés de capitulation et d'abandon de poste.
    •  le 27/04/1920 :
      La reddition de
      Maubeuge
      La lenteur des débats a dépassé toute prévision. Au début, on avait espéré pouvoir commencer, pour cette sixième audience, le défilé des témoins, et quelques-uns avaient été convoqués à cet effet.

      (..... .....)

      C'est maintenant l'interrogatoire du colonel Charlier.

      Sans attendre les questions du président il proteste vivement contre l'inculpation d'abandon de poste devant l'ennemi.

      C'est peut-être, dit-il, le qualificatif juridique de mon acte mais dans le bon sens populaire, cela s'appelle une évasion.

           C'est, en effet, une évasion que, le 7 septembre, le colonel alors commandant, convaincu que lui et ses hommes allaient être faits prisonniers, entreprit, à travers les lignes ennemies, avec tant de bonheur et d'habileté, qu'il réussit à conduire toute sa troupe à Dunkerque.

  • L'attaque de Maubeuge et de ses forts

    Maubeuge 1914

 

  • Le fort (devenu arsenal) et la redoute de Falise en 1844

Arsenal_et_Redoute_de_falize___AD59_

(extrait du cadastre disponible sur le site des Archives Départementales du Nord)

 

  • L'itinéraire de Rousies à St André-lez-Lille

itin_raireitin_raire_noms

Soit près de 120 Km
 

 

  • La fosse de Quiévrechain ( le puits N°2 était alors en fonçage)

    qui_vrechain_Mine

 

 

 

  • CHARLIER Achille Philadelphe
    né le 28 Décembre 1872 à Chauny (Aisne)

    Elève de l'école Polytechnique 1892-1894
    Sous-Lieutenant élève de l'école d'application de l'Artillerie et du Génie 1894-1896
    Lieutenant en 2d au 1er régiment d'Artillerie de Marine 1896-1897 puis à Madagascar (Colonie en guerre) jusqu'en 1900. Il y passe Lieutenant en 1er puis Capitaine en 2nd.
    En poste ensuite au 2nd Régiment d'Artillerie de Marine puis à la Fonderie de Ruelle  du 1er juin 1900 jusqu'en 1903
    -1905 à 1907: Service des constructions d'artillerie en Cochinchine.
    -1907 à 1908: 3e Régiment d'Artillerie Coloniale à Toulon.
    -1908 à 1914: Congo, hors-cadre.
    Fait Fonction de chef du cabinet militaire du gouverneur général de l'Afrique Equatoriale Française (A.E.F)
    Promu chef d'escadron le 23 décembre 1912
    En congé en métropole à l'été 1914 choisit d'être affecté au parc d'artillerie de Maubeuge

    Colonel commandant le 3° Régiment d'Artillerie Coloniale en  1921

    Chevalier de la Légion d'Honneur par arrêté du 11 Juillet 1899
    Officier le 13 Juillet 1915
    Commandeur par arrêté du 15 Mars 1921
    Croix de Guerre 1914-1918
    Officier de l'Ordre Royal de Léopold de Belgique

    Décédé à Paris le 27 Janvier 1956
    Inhumé au cimetière du Père-Lachaise

    • Une photo montrant le Colonel lors du conseil de guerre sur la capitulation de Maubeuge, qui s'est tenu en avril 1920 :

      LaCroix19200421_photo("La Croix" du 21/04/1920 source Gallica)

       

 

 

 


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27 janvier 2011

LEGRAND Henri, BEAUVOIS Nicolas, THUILLIEZ Pierre-Joseph

 

HENRI LEGRAND
(07/02/1885-18/02/1918)

 

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Nous pensions la question des pigeons terminée, quand le 5 février 1918, la Commandanture faisait afficher l'avis suivant :

" En vertu du jugement du Conseil de guerre de la Commandanture d'Etape 148, du 3 janvier 1918,
l'ouvrier français Huret a été condamné à mort pour avoir fait lâcher un pigeon voyageur avec des nouvelles destinées à l'armée française, au lieu de le remettre à l'autorité allemande avec le parachute et les accessoires trouvés en même temps.
" De plus, le journalier Vandenberg a été condamné à 5 ans de prison pour ne pas avoir averti l'autorité allemande de l'intention de lâcher ce pigeon voyageur avec des nouvelles. "


Quelques jours plus tard, le 25 février, la Commandanture informait la Municipalité de la triple exécution suivante :

Avis


" Les civils de nationalité française, fusillés le 23 de ce mois, à 7 h 15 du matin, selon la loi martiale, pour espionnage :
Legrand Henri, né le 7 février 1885, à Quesnoy-sur-Deûle, professeur, en dernier lieu à Bruay-sur-Escaut ;
Beauvais Nicolas, né le 4 juin 1864, à Rieux, tisserand, demeurant à Rieux  ; 
Thuillez Pierre-Joseph, né le 1er novembre 1870, à Carnières, employé communal, demeurant à Rieux,

   ont été inhumés le même jour au cimetière Saint-Roch, Legrand fosse 66, Beauvais fosse 65, et Thuilliez fosse 64. "

 



NDR : J'ai retranscrit les informations telles que rédigées, n'ayant pas connaissance à ce moment de l'affiche en question, or l'arrière-petit-fils du second fusillé m'avertit que son aïeul se nomme en réalité

BEAUVOIS Nicolas

né le 4 juin 1854 à Rieux (en Cambrésis). Cette information m'a permis de retrouver le dossier d'attribution de la Légion d'Honneur à M. Beauvois, fait Chevalier en 1924, où figurent les circonstances de son décès :

Beauvois_Nicolas_Leonore_FRDAFAN83_OL0159007v003_L

Sa fiche sur le site Mémoire des Hommes :

BEAUVOIS MDH

Voici le récit de l'arrestation de Nicolas Beauvois :

         Aimée BEAUVOIS, fille de Nicolas Beauvois avait trouvé en travaillant dans les champs un panier attaché à un parachute. Celui-ci renfermait un pigeon voyageur avec un questionnaire demendant des renseignements sur les positions des troupes allemandes et l'état de la population.

       Son père, Nicolas BEAUVOIS et le garde champêtre Pierre-Joseph THUILLEZ collaborèrent avec le maire Edouard BOUDAILLEZ à l'envoi des renseignements demandés par le grand quartier général basé à Provins.

Malheureusement l'affaire s'ébruité et ils furent dénoncés.

Nicolas BEAUVOIS et Pierre-Joseph THUILLIEZ furent condamnés à mort et fusillés.
Aimée BEAUVOIS échappa à la mort mais elle fut emprisonnée et torturée. Sa santé en fut profondément altérée et cette épreuve la marqua toute sa vie.
Edouard BOUDAILLIEZ fut déporté et condamné à 10 ans de prison.

A la libération ils furent cités à l'ordre de l'armée et reçurent la croix de guerre.

Document transmis par un petit-fils de N.Beauvois

 

JO 19190620 BEAUVOIS Nicolas

JO 19190620 BEAUVOIS Aimée
Citations de Nicolas BEAUVOIS et de sa fille Aimée
au JO du 20/06/1919, ordre du 8 mars 1919.

 

Récit fait par Aimée BEAUVOIS, décorée de la croix de guerre avec palme :

       Agée de 25 ans, lisseuse de mon état, je fus enrôlée de force par les Allemands. Le 20 octobre 1917, étant occupée aux champs, je trouvai, dans un panier attaché à un parachute un pigeon porteur d'un questionnaire. Je le rapportais à la maison. Là mon père et son ami le garde pierre-Joseph THUILLIEZ, donnèrent tous les renseignements qu'ils pouvaient fournir.
     Malheureusement l'affaire s'ébruita. Mon père et son ami furent arrêtés et fusillés le 23 février 1918.
     Arrêtée également, je fus condamnée à six mois de prison et eus à subir mille tortures physiques et morales.

Document transmis par un petit-fils de N.Beauvois

 

 Nicolas BEAUVOIS et Pierre Joseph THUILLIEZ reposent maintenant au Cimetière de Rieux en Cambrésis.


 

De même :

THUILL(I)EZ Pierre-Joseph Henri

a été décoré de la Légion d'honneur à titre posthumeIl est à noter que la table décennale de Carnières fait état de "Pierre Jh Henri THIEULLEZ né le 2/11/1870", le nom ayant pris l'orthographe actuelle le 27 Janvier 1891. ( Cf Mention marginale de l'acte de naissance)

Les services extraordinaires rendus pour l'obtention de la Légion d'Honneur sont ainsi énoncés :

     "Espionnage par pigeons-voyageurs pour le compte ds armées alliées. N'a pas hésité à lâcher un pigeon trouvé en pays occupé après avoir rempli et signé la fiche de renseignements demandés.
      " Arrêté par les Allemands fut condamné à mort et fusillé à Valenciennes le 23/02/1918"

Avis favorable, Lille le 15 avril 1924
Le Préfet du Nord

 

JO 19190620 THUILLIEZ Pierre Joseph
Citations de THUILLIEZ Pierre Joseph
au JO du 20/06/1919,

 

 Pierre Joseph THUILLIEZ et Nicolas BEAUVOIS reposent maintenant au Cimetière de Rieux en Cambrésis.


 

 

Revenons à Henri LEGRAND :
Le contenu du message, très détaillé, ne laissait planer aucun doute sur la "communication avec l'ennemi", et les renseignements personnels ont trop facilement permis de retrouver leur auteur :

          Conformément à votre demande de renseignements et tenant compte de vos recommandations au point de vue de la précision des notes à vous fournir, un trio d'amis français s’est mis à I'œuvre et vous envoie les documents exacts ci-dessous.
          Du 24 au 27 mars sont passés à Valenciennes par routes venant de la direction de Cambrai 50 000 soldats (Infanterie, Artillerie) se dirigeant vers Mons et Tournai avec canons de tous calibres: 77, 80, 120, obusiers de 24 et nombreux mortiers. Sur la ligne venant du Cambrésis, du 22 au 25, il est passé de nombreux trains se dirigeant vers Mons, matériel et soldats. Pendant ces mêmes dates, nuit et jour, il est passé venant de Valenciennes se dirigeant sur Saint-Amand, 105 trains (Infanterie, Artillerie, munitions, voitures de ravitaillement, matériel du génie, 92 canons de 77 et 8 gros canons d’artillerie lourde). Il y a actuellement dans la ville d’Anzin un dépôt de 600 chevaux, 2 colonnes de boulangerie avec fours en maçonnerie, 12 colonnes formant 250 autos venant du front de la Somme. En outre : 5° et 6° Compagnies du 127° d’Infanterie, 2° et 3° Compagnies du 93° d’Infanterie, 2 Compagnies du 86° d’Infanterie, une école d'artillerie, de T.S.F. et de téléphone, 1 compagnie du 261° pionniers, 2 batteries d’artillerie lourde, 2 colonnes de munitions. Cette ville est prévenue de préparer des logements pour un Etat-Major général très important. Le 86° régiment du Génie d’Hambourg est réparti entre Bruay, Beuvrages, et Aubry. Beuvrages a en outre une section de mitrailleuses et un dépôt de chevaux. Bruay a 3 batteries du 45° Régiment d’Artillerie légère (de 77 mm.), Petite Forêt, Denain et Hérin ont de l’Infanterie (sections de mitrailleuses) et autres troupes. A Fresnes et à Condé, les 132° et 134° Régiments d’Infanterie et autres régiments sont en voie de reformation. Ils exécutent chaque jour des exercices à la grenade. A Flesquières, près de Cambrai, il est établi une forte ligne de tranchées. Derrière cette ligne le terrain est libre jusqu’à Valenciennes. Un dépôt de munitions se trouve aux forges de Denain, au Bessemer.
         A Anzin, l’établissement de l’Escaut-et-Meuse fait la réparation des canons. A Valenciennes de nombreuses réunions d’officiers supérieurs au nombre de 100 dont 30 Généraux (Allemands, Autrichiens, Turcs, Bulgares) se tiennent au nouveau Musée et prennent leurs repas à l'Hôtel du Commerce. Chaque matin ils vont en auto à Vendegies-sur-Ecaillon, Monchaux, Somain-sur-Ecaillon, où de grands exercices d’Artillerie ont lieu. Valenciennes est occupée par de nombreuses ambulances établies dans les grandes maisons de la ville.
         Nous avons la sensation que nos ennemis veulent parer ou préparer une offensive importante vers l’extrême ouest, côté Nord. Toutes les troupes en repos sont en général mal nourries. La population de notre région endure vaillamment les souffrances de toutes natures. Elle est calme, confiante et escompte une délivrance prochaine. Il serait encourageant pour tous si vous pouviez de temps à autre nous semer par la voie des airs vos journaux intitulés « La Voix du Pays » qui relateraient l’exacte vérité sur notre situation militaire.


Vivent notre chère France et ses Alliés.


Brigadier retraité
Rue de Millam à Watten (Nord) 
L'oncle de Paul et de Jeanne 
1er avril 1917

 

 

René Delame continue :
Je fus d'autant plus attristé de cette exécution que Henri Legrand avait été mon voisin de cellule pendant les dix-sept jours que je passai à la prison Saint-Jean. J'avais obtenu qu'il vînt chaque jour dans ma cellule, pour m'aider à faire le ménage que nous prolongions le plus longtemps possible, sous la surveillance de la sentinelle.
Il put cependant me dire qu'il fut instituteur à Bapaume, et avait été recueilli, lors de son évacuation, par M. Hélart, qui l'avait fait entrer comme professeur à l'école primaire de Valenciennes, où il avait fait venir sa femme, qui était également institutrice à l'école communale de Bruay.
Naturellement, il me raconta les motifs de son arrestation : le 30 mars 1917, il avait trouvé six pigeons voyageurs près de la fosse Thiers, porteurs d'un questionnaire auquel il avait répondu, après avoir pris les renseignements auprès de trois de ses amis.
Le 1er avril, il relâchait ses précieux pigeons messagers, ayant signé la réponse au questionnaire, ce qui fut sa perte, un pigeon ayant été capturé près de Landrecies par les Allemands.
Après avoir ouvert une enquête auprès de cent trente-neuf familles portant le nom de Legrand, l'autorité allemande le découvrit à Bruay, et il fut arrêté un mois plus tard, alors qu'il terminait son cours à Valenciennes.
Au début de sa captivité, enfermé dans un cachot, les Allemands le traitèrent très durement, pour le faire parler ; mais ils y renoncèrent, Legrand ayant supporté cette terrible épreuve avec une grande énergie. Il me dit : " Nous étions trois qui avions rédigé la note, nous avions juré que quoi qu'il arrive, nous ne nous vendrions pas. " Sans jamais vouloir me les nommer, il me répétait chaque matin : " Dites aux amis de ne pas avoir peur, je ne mangerai jamais le morceau. "
Il tint parole ; aussi ai-je conservé pour lui toute mon admiration pour son courage, sa discrétion et sa résignation.
Chaque dimanche, sa femme venait à la prison, essayant de le voir ; seule, sa petite fille, mignonne blonde, était autorisée à monter dans sa cellule, le poste allemand lui refusant impitoyablement d'embrasser son mari.
MM. Baron et Golder ayant réussi à me faire passer quelques tablettes de chocolat, je les conservais précieusement et les remettais à Legrand qui, le dimanche, les offrait à sa fille ; celle-ci, joyeuse, demandait innocemment à son père " où étaient ses élèves et quand il recommencerait la classe "
Au bout de dix minutes, la sentinelle venait reprendre l'enfant, qui s'était à plusieurs reprises jetée dans les bras de son père. Mais la double porte se refermait, et j'entendais un sanglot, auquel je m'associais.
Quoique le rassurant, et lui donnant espoir (bien que pensant son cas très grave) je lui passai une Imitation que j'avais emportée dans ma cellule, et lui recommandai d'en lire quelques passages.
Le lendemain, il me fit cette réflexion : " Il y a de bien belles choses dans ce livre, jamais on ne m'a appris cela. "
Après ma libération, ayant une très grande estime pour mon voisin d'infortune, je ne cessai de m'intéresser à lui, espérant toujours qu'il ne serait pas condamné à mort. Il tint parole, et " ne mangea pas le morceau " , mourant en brave, sans forfanterie, pour la France.
Aussi, ne puis-je que féliciter le Comité, présidé par M. Jean Saint-Quentin, qui prit l'initiative d'ériger un monument à ce glorieux instituteur qui, devant la mort, sut garder son secret.
Cette œuvre, admirablement exécutée par Desruelles, représente bien Legrand tel que je l'ai connu, debout, dans une attitude ferme et résignée, attendant la mort.
L'inauguration en eut lieu le dimanche 22 juillet 1928, sous la présidence de M. Hudelo, préfet du Nord.
Je ne puis mieux faire que de reproduire un extrait du discours que prononça M. Jean Saint-Quentin, adjoint, en remettant le monument à la Ville.

Extrait du livre de René Delame : "Valenciennes Occupation allemande 1914-1918. Faits de guerre et souvenirs" Hollande & Fils ed. 1933


  • Extrait de la dernière lettre de Henri LEGRAND à son épouse :

    (...)      
    Embrasse bien mes parents pour moi.
    Oui que mes parents bien aimés sachent qu'ils ont occupé une large place dans les dernières heures de ma vie.
    Console-les bien, montre-toi bien affectueuse envers eux, je suis heureux qu'ils puissent reporter l'amour qu'ils me témoignent vers notre fille Claude qui j'en suis persuadée saura leur rendre.
    Embrasse également tes parents pour moi, ils ont toujours été si bon pour moi.
    Je passe cette dernière nuit avec deux condamnés à mort de Rieux, mes amis Beauvois le tisseur et Thuilliez le garde-champêtre, nous saurons tous trois mourir en braves.

    Document transmis par un petit-fils de N.Beauvois

     

  • Document que publia le Petit Valenciennois, dans son numéro du 28 juillet 1928

DISCOURS DE M. JEAN SAINT QUENTIN

Mesdames, Messieurs,

Le 30 mars 1917, à dix heures et demie du matin, un aéroplane français vint survoler le territoire de la commune de Vicq, et lâcha six pigeons attachés par des corsets à un petit parachute et un sachet contenant des instructions.
Le tout fut ramassé par M. Achille Coupin, électricien à la Compagnie des Mines d'Anzin, demeurant à Bruay-sur-Escaut, et fut déposé par lui chez M. Henri Legrand, professeur à l'Ecole primaire supérieure de Bapaume, évacué à Bruay depuis le 17 octobre 1916, professeur intérimaire à l'Ecole primaire supérieure de Valenciennes.
Tous deux se rendirent chez M. Mathieu Hélard, maire de Bruay-sur-Escaut, et lui demandèrent si, par sa situation, il pouvait fournir les renseignements désirés.
Des démarches furent immédiatement tentées par lui auprès des personnes dignes de confiance, notamment M. le docteur Tauchon, maire de Valenciennes.
Dans la nuit du 30 mars, MM. Legrand, Coupin et Hélard résumèrent de concert les renseignements recueillis. La transcription fut faite à la main en six exemplaires, dont quatre copiés par Henri Legrand, et deux par Mme Henri Legrand. Les pigeons furent relâchés le 1er avril, à cinq heures du matin. Le document confié aux pigeons se terminait par ces mots :
La population de notre région endure vaillamment les souffrances de toute nature. Elle est très calme, très confiante, et escompte une délivrance prochaine.
Il serait encourageant pour tous si vous pouviez de temps à autre amener par la voie des airs vos journaux intitulés La Voix du Pays qui relateraient l'exacte vérité sur notre situation militaire. Vivent notre chère France et ses alliés.
Et en forme de signature, ce fut certes une imprudence : Brigadier retraité, rue de Millam à Watten (Nord), l'oncle de Paul et de Jeanne, 1er avril matin.
Pour authentiquer sa missive, Henri Legrand avait signé sa condamnation à mort.
A la façon des soldats de la Révolution, au moment d'envoyer le document, un pacte d 'honneur avait été conclu entre ces trois braves, s'engageant dans le cas où l'un serait arrêté, à ne jamais faiblir et à supporter seul le courroux de l'ennemi.
Un des pigeons tomba à Landrecies dans les mains des Allemands.
En mai, Henri Legrand terminait son cours à l'Ecole professionnelle, lorsque deux officiers allemands se présentèrent et lui imposèrent la dictée du document. Il eut aussitôt l'impression qu'il était perdu. Il le dit à M. Adde, son directeur. Aux conseils de fuite qui lui étaient donnés, il refusa de se conformer, dans l'intérêt des siens.
En juin, il était arrêté définitivement en sortant de classe, et conduit à la prison du patronage Saint-Nicolas. Une minutieuse instruction commença aussitôt.
Son premier interrogatoire devant un Conseil de Guerre eut lieu le 23 janvier 1918.
Avec force d'âme, il entendit requérir contre lui, sans frémir, dit-il, la peine de mort.
Aucune décision ne fut prise à cette audience.
Un deuxième Conseil de Guerre se réunit le 18 février, et cette fois, le condamna à mort pour crime de haute trahison et participation à un acte d'espionnage. A chaque audience, il fut assisté d'office en des plaidoiries que, pour l'honneur de la défense, il qualifie d'énergiques.
Son système était habile, la preuve n'était pas faite. Une enquête avait été menée sur cent trente-neuf familles du nom de Legrand. Une expertise en écriture apportait son incertitude complémentaire : à tous les arguments il avait trouvé une réplique plausible et péremptoire, le doute aurait dû lui bénéficier. Mais, malgré une protestation d'une logique serrée, la peine fut confirmée le 19 février.
Sa grâce, au moins, aurait dû aboutir ; présentée le 20 février, elle fut refusée, et il fut fusillé le 23 février 1918, par un matin brumeux, sur le champ de tir, et sans que personne de ceux qui n'avaient cessé de l'entourer de leur vigilance affectueuse eût été avisé.
Contre lui, comme le Lillois Jacquet et ses amis, s'étaient dressées les rancunes de l'occupant qui ne pardonnait pas la haine ou l'ironie dont il se sentait entouré par l'occupé, avec la rage peut-être de sentir s'approcher l'effondrement de son entreprise sinistre.
Legrand avait tenu sa parole d'homme, accompli son devoir de citoyen et de soldat non mobilisé, donné un exemple de Français et ajouté un nouveau titre à la gloire des instituteurs.
Imaginons, au cours de cette détention qui dura huit mois et d'une procédure remplie d'alternatives d'espoirs et de déceptions, cette volonté constamment tendue pour vaincre le mauvais sort, pour donner à son argumentation la force persuasive pour conserver le silence sur la vérité qu'il détenait et qui aurait livré, dans une minute d'inobservation, ses collaborateurs.
Un de ses codétenus qui, tous les matins, s'entretenait avec lui, nous a rapporté son admiration pour son courage, sa discrétion et sa résignation.
Il se savait condamné, et attendait la mort froidement, la mort solitaire du condamné, sans entraînement ni apparat, si différente! de celle du soldat, avec la dignité stoïque qu'il avait enseignée à des enfants.
Dans une guerre qui devenait chaque jour plus méthodique, lui, que les conseils de révision avaient écarté, pour sa plus grande tristesse, il voulait quand même, serviteur et fils de serviteur de la France, prendre part à la lutte : il voulait servir.
L'occasion s'était offerte, et désormais, il avait le strict devoir de se taire, la bouche serrée, comme quiconque au cours de cette vaste captivité qu'est l'occupation, devait craindre que le propos le plus anodin ne puisse permettre les inductions de l'ennemi.
De ce silence nécessaire à l'amitié et à la patrie, ce monument est le symbole.
Il synthétise aussi la résistance de toute une région, la nôtre, pendant les années abominables. Sous la faim, sous la pression, sous l'abus de la force, une population de femmes, d'enfants, de non-armés, enragés par une occupation abhorrée et sans fin, a conservé jour après jour, le sang-froid, la vaillance et le sourire souvent, et toujours la confiance et l'espoir, s'ingéniant à pratiquer la guerre avec les seules armes à sa disposition, celles auxquelles ont recouru tous les opprimés pour secouer le joug, recouvrer leur liberté et leur indépendance.
Legrand est mort en se proclamant innocent, et il l'était en vérité du point de vue de la conscience humaine ; c'est le fait de la guerre qui a créé son crime, c'est la guerre seule qui, dans sa déformation monstrueuse, a renversé la parole venue du fond des siècles, et que Legrand enseignait à ses élèves :

" Aimez-vous les uns les autres. "

 

 

  • Le 16 Septembre 1919 a lieu une cérémonie à Bruay sur Escaut où il enseignait, avant rapatriement de sa dépouille à Watten

Mardi 16 Septembre 1919 Bruay sur Escaut b

 

  • Le monument de Valenciennes, place des Acacias, œuvre de Félix-Alexandre Desruelles, né en 1865 à Valenciennes et décédé en 1943 à La Flèche :

monument

On peut y lire en bas à droite "Se dévouer pour la Patrie "

  • Lors de la guerre suivante, soldats Allemands posant  sur le monument :

monument2

 

  • Ebauche taille réduite de la statue, exposée à Valenciennes pour les journées du patrimoine 2014 :

    Ebauche

  • Dans une communication du 23 NOVEMBRE 1998,   M. Raymond DURUT ajoute

La police militaire allemande agit avec son efficacité habituelle : 150 LEGRAND et parmi eux Henri sont interrogés, le 10 avril il doit recopier, sous surveillance policière, le message délictueux. Il le fait sans manifester d’émotion apparente. Deux jours après il est arrêté et incarcéré. Il a refusé de fuir pour ne pas exposer sa famille. Interrogé il se défend habilement, mais refuse la libération qui lui est offerte contre renseignements et dénonciations. Il réussit à faire passer en fraude des lettres à sa famille dans lesquelles il fait part de sa détermination.

En janvier 1917 il comparait devant un conseil de guerre, et se défend pied à pied, n’avouant rien. Il affirme ne pas connaître la région où il a été évacué, ne pas y avoir d’amis. Le plan des tranchées creusées près de Marcoing lui est particulièrement reproché : le document accusateur a été rédigé 5 mois après son départ de cette région. La similitude des écritures est, dit-il, sans signification : ses fonctions d’enseignant faisaient connaître son écriture par plus de 400 personnes qui pouvaient l’imiter.

Malgré ses dénégations, l’accusé est condamné à mort. Il est fusillé le 23 février 1918, ayant conservé jusqu’au bout sa courageuse attitude.
Son corps sera exhumé au lendemain de la guerre. On trouve dans son portefeuille une ultime lettre dans laquelle il renouvelle son affection pour les siens et affirme avec force son innocence : il voulait disculper sa famille si cette lettre était lue par les occupants.
Il repose depuis le 16 septembre 1919 à Watten.

 

  •  Citation de Henri LEGRAND au JO du 20/06/1919

    JO 19190620 LEGRAND Henri

  • Le 24 Octobre 1919, le Journal officiel publie une liste de "citoyens Français qui se sont particulièrement distingués au cours des hostilités. On y trouve page 11797 sa citation :
    "Le Gouvernement porte à la connaissance du pays la belle conduite de :" :

    JO 19191024 LEGRAND Henri




  • Henri Ferdinand Joseph LEGRAND né le 7 Février 1885 à Quesnoy sur Deule (Nord) est fait Chevalier de la Légion d'Honneur à titre posthume le 15 avril 1924 :

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"M. Legrand ayant trouvé des pigeons voyageurs dans la plaine de Bruay-Thiers, remplit les questionnaires qu'il trouva sur ces volatiles indiquant les mouvements de troupes, le commandement des unités allemandes, etc. Les pigeons furent lâchés le 18 avril 1917 au matin, mais l'un d'eux fut abattu et quelque temps après, au moyen d'expertise d'écriture, il fut découvert que l'auteur des renseignements était M. Legrand. Celui-ci fut arrêté aussitôt et, après 11 mois de cellule, passa devant le Conseil de Guerre allemand qui siégeait à Valeniennes. Condamné à mort, il fut fusillé en cette ville, le 19 Février 1918."

 

  • Henri LEGRAND a été fusillé au champ de tir du Rôleur,  il n'est cependant pas indiqué dans l'acte de décès dressé le 26 février qu'il a été fusillé, seulement "décédé" sur ordre de la commandanture signé de Von Witzendorf Major et Commandant. Il en est de même pour ses compagnons BEAUVOIS Nicolas et THUILLIEZ Pierre-Joseph. Rien à la lecture de l'acte ne laisse deviner qu'il s'agit d'une exécution.

  • Le lieu est le même que pour CANONNE Alfred,  COTTEAU Edouard,  HERBAUX Victor,  fusillés le 16 octobre 1917 pour espionnage.

voir la page du blog qui leur est dédié

 

  • C'est au même endroit que le 28 Août 1944 les nazis fusilleront avant de s'enfuir 21 civils dont les noms figurent sur le monument à l'entrée de l'ancien champ de tir (Bacquet François, Charon Isidore, Cuvelier Pierre, Denys Damien, Farineau Arthur, Farineau Léon, Farineau Arthur fils, Farineau-Deker Clémence, Fabry Gilles, Gontier Jean, Kulpa Charles, Kulpa-Krass Madeleine, Krupa Jean, Lecocq Laurent, Lutas Jean, Millot Albert, Perrin Louis, Perrin Denis, Persiaux César, Pichon Albert, Riquoir Louis.)

Roleur
(photo de l'auteur)


.

  • Le 10 février 1924 le Journal Officiel publie le décret lui attribuant de la Médaille de la Reconnaissance Française de 1ere classe (vermeil) :

  • Le même journal publie le décret attribuant de la Médaille de la Reconnaissance Française de 2ème classe (argent) à son épouse :

 

 


 


     Si je n'ai encore rien trouvé de très précis sur le maire, M. Edouard BOUDAILLIEZ, j'ai  retrouvé dans le dossier de la Légion d'Honneur de son prédécesseur,  Auguste Henri DISLAIRE, officier d'académie, Croix de guerre, né le 9 Janvier 1876 à Rieux, y décédé le 27 juillet 1921, les "Détails sur les services extraordinaires" :

     "Est resté à son poste au moment de l'invasion. A organisé un service de renseignements pour les alliés pendant l'occupation. Dénoncé il fut condamné à 10 ans de travaux forcés et accomplit 39 mois de cellule à Reimbach [sic pour Rheinbach au sud de Cologne].
    " Décédé le 27 juillet 1921 des suites des mauvais traitements subis."

          Lille le 22/2/1924, le Préfet du Nord.


Voir également sur ce blog

 

      Le 14/07/1919, le Journal Officiel de la République Française publie l'une des liste de citations "Le Gouvernement porte à la connaissance du pays la belle conduite de :"
On y trouve page 7305 celles des deux maires de Rieux :

Dislaire_Boudailliez_BC

 

 

 

 

 

 

26 janvier 2011

ORCHIES (Nord)

 

LA DESTRUCTION D'ORCHIES
(Septembre 1914)

 

Valenciennes ayant été occupée par les Allemands le 25 août 1914, et n'ayant plus aucune communication avec le reste du pays, nous ignorions complètement les événements tragiques qui se déroulaient autour de nous. Ce sont les Allemands qui se chargèrent de nous annoncer leurs tristes exploits.
Le dimanche 20 septembre, les troupes françaises ayant quitté Orchies, deux autos allemandes y entrèrent pour reconnaître les cinquante-cinq blessés qui se trouvaient à l'hôpital, et prendre les mesures nécessaires pour les emmener en captivité.
Mais le mardi 22 septembre, les troupes françaises vinrent de nouveau occuper la ville. Le lendemain, le détachement Sontag se trouva aux prises avec l'ennemi et les coups de feu éclatent sur les lignes des avant-postes à la lisière sud d'Orchies.
J'avais été surpris de voir partir du lycée de Jeunes Filles de Valenciennes, converti en hôpital, des infirmiers en tenue, avec revolver au côté.
A 10 heures 1/2, un convoi venant chercher à Orchies les blessés, se composant de sept autos allemandes, accompagnées d'une auto mitrailleuse, fut aperçu par le poste fourni par la première compagnie du 6° chasseurs. La route a été barrée, et la sentinelle est placée assez loin en avant. Ajoutons qu'aucune de ces voitures allemandes n'arbore le drapeau de la Croix-Rouge, seules les insignes étaient peintes sur le côté.
Le major qui se trouvait dans la première voiture, apercevant la sentinelle française descend précipitamment, revolver en main, et la tue à bout portant.
Le poste riposte, mettant hors d'usage trois automobiles, tuant six de leurs occupants, pendant que les autres rebroussaient chemin vers Saint-Amand, racontant naturellement que des Français francs-tireurs ont tiré sur les infirmiers.
Le major est découvert, caché dans un fossé par un peloton du 6° chasseurs accouru au premier coup de feu. Le capitaine de Chérisey vérifie le revolver de son prisonnier, et constate que plusieurs cartouches ont été tirées.
Quoique armés, il est à supposer que les Allemands ignoraient la présence des troupes françaises à Orchies, et croyaient en prendre possession comme de Saint-Amand et de Valenciennes, sans coup férir.

Le détachement qui arrivait tranquillement en automobile, avait probablement pour ordre d'occuper la Mairie, d'arrêter la municipalité, de lui imposer une contribution, et de préparer le cantonnement. Mais la réception qui leur fut faite par les avant-postes, leur fit au contraire se rendre compte que la ville était occupée par des troupes de toutes armes.
Comme il fallait s'y attendre, les Allemands revinrent en force, le lendemain, à sept heures du matin, au milieu d'un épais brouillard, ce qui leur permit de s'approcher des avant-postes, dont ils avaient reconnu l'emplacement. Une mitrailleuse allemande ouvrit tout à coup le feu, à une courte distance, dans la direction des faubourgs d'Orchies, qui, vraisemblablement devaient être occupés par les nôtres.
Ce tir au hasard n'eut produit nul effet si le chef du premier bataillon, commandant Gardechaux qui s'était porté sur la ligne des avant-postes pour essayer, malgré le brouillard de reconnaître lui-même les positions de l'ennemi, n'en était revenu bientôt atteint d'une balle et hors de combat.
Le commandement du bataillon passa aussitôt au capitaine Duchennoy de la 4° compagnie, qui donna l'ordre de se porter en avant, et de s'y maintenir à tout prix.
Le brouillard se dissipa vers 9 heures, et l'on put se rendre compte que de gros détachements ennemis suivaient l'un la route de Saint-Amand, l'autre la voie ferrée de Somain à Orchies.
Le lieutenant-colonel Boucheseiche, commandant le 6° chasseurs, accouru en automobile, vint se rendre compte de la situation.
Il fit alors canonner vers 10 heures les positions ennemies, par la 4° batterie Dansac, qui avait été placée près de la garé d'Orchies, ayant en soutien un peloton du 6° chasseurs.
Un excellent repérage fait par le lieutenant Caullery, permit à la batterie d'atteindre à 3.000 mètres un important détachement ennemi à proximité de la forêt de Marchiennes, cinquante-six tués restent sur le terrain.
Mais l'infanterie ennemie supérieure en nombre, ayant reçu l'ordre de prendre Orchies, obligea les compagnies françaises qui occupaient les faubourgs à se replier découvrant ainsi l'artillerie Dansac qui, se trouvant elle-même dans une position critique, se vit dans l'obligation de se reporter en arrière d'Orchies, sur la route de Pont-à-Marcq.
Le général Plantey, qui, à Douai est tenu au courant de la marche du combat envoie par un cycliste l'ordre de reprendre Orchies, annonçant l'arrivée de renforts.
En effet, vers 14 heures, arrivent, par la route de Coutiches, plusieurs autos mitrailleuses anglaises, et la 41° batterie, qui, moins rapide se montra sur la route d'Orchies.
Le général Plantey fait partir de Raches, deux compagnies du 3° bataillon du 6°, lesquelles seront deux heures plus tard rendues à Orchies.

Les renforts encouragent le 1er bataillon, et les mitrailleuses anglaises qui prennent l'ennemi de flanc, balayent la route de Saint-Amand. Le 1er bataillon contre-attaque alors Orchies, dont la lisière est toujours tenue par la brave compagnie de Marguerie. Et avant que les deux compagnies et la batterie de renfort soient arrivées, la ville est reprise.
A 6 heures du soir, l'ennemi l'a entièrement évacuée, et se retire sur Saint-Amand.
Mais le lieutenant-colonel Boucheseiche veut poursuivre ce succès et couper la retraite de l'ennemi vers Saint-Amand en le rejoignant vers l'est.
La 3e compagnie placée dans le faubourg ouest qui est maintenant dégagé reçoit l'ordre de déborder la gauche allemande, et le peloton du 6e chasseur devra se rabattre sur ces derrières.
Malheureusement la nuit tombe, les troupes sont fatiguées par ce combat d'une journée, le mouvement est effectué avec lenteur et l'ennemi peut échapper à ce mouvement enveloppant, après avoir incendié cinq maisons à la sortie de la ville.
Le combat est terminé, les renforts qui arrivent n'ont plus qu'à retourner à Douai et à Raches. L'ennemi laisse quarante tués, trois blessés, onze prisonniers. Du côté français, il y eut également quelques tués, trente blessés, qui sont évacués sur Pont-à-Marcq et sur Lille.
Hélas! nous n'avons pas joui longtemps des suites de cette victoire. Le soir-même, alors que les Allemands se retirent sur Saint-Amand, les Français se replient sur Douai où ils sont rappelés d'urgence : Orchies est donc évacué en même temps par les vainqueurs et les vaincus.
La journée du 24 s'est donc terminée par deux succès, puisque les Allemands ont été rejetés d'Orchies et arrêtés devant Douai.
Le départ des troupes françaises après une journée d'angoisse, cause parmi la population d'Orchies une panique épouvantable. Le Maire réunissant tous les habitants leur conseille de prendre immédiatement la fuite ce que beaucoup firent sans même rentrer chez eux. Les Pères jésuites Lavigne et Cardon qui se trouvaient en ce moment dans la ville et qui avaient suivi le mouvement, reviennent sur leurs pas en auto pour enterrer les morts ; déjà le Père Ignace était à l'œuvre quand un cycliste arriva leur disant de fuir car les Allemands arrivaient.

Le 25 septembre, fut pour Orchies une journée mémorable, rappelant celles tragiquement célèbres de Louvain et de Dinant.
Je me trouvais ce matin à l'Hôtel de Commerce pour le service de la ville, quand un officier me dit : " Nous allons incendier Orchies."
En effet, la compagnie des pionniers, sous les ordres du major Dittel partit de Valenciennes en tramway pour Saint-Amand et de là à Orchies, avec le matériel incendiaire. Dans chaque maison ils brisaient les fenêtres, projetaient de l'essence dans les chambres, et jetaient ensuite des pastilles noires qui s'enflammaient ainsi que des grenades et communiquaient le feu à la maison entière.

Bientôt, Orchies ne fut plus qu'un immense brasier, et quand le lendemain le Père Lavigne revint, la ville était encore en flammes.
Le soir même, je revis, par hasard, l'officier qui avait assisté à ces terribles représailles ; il me dit cyniquement : " Orchies est rayée sur la carte de France, la ville est complètement détruite."
Malheureusement, pendant la nuit des cadavres étaient mutilés, on ne sut jamais par qui. Aussi, les Allemands purent-ils dire que leurs blessés avaient été achevés sans pitié,
Nous dûmes nous rendre à l'évidence quand le commandant de place, major von Mehring fit afficher en gros caractères, sur papier rouge, l'avis suivant sur les murs de notre ville:

affiche01

AVIS

        J'ai été malheureusement forcé d'appliquer les mesures les plus sévères édictées par les lois de la guerre contre la ville d'Orchies, En celle localité furent attaqués et tués des médecins, des membres du personnel médical et assassinés une vingtaine de soldats allemands. Les pires atrocités furent commises d'une manière incroyable (oreilles coupées, yeux arrachés et autres bestialités du même genre).
        J'ai en conséquence fait détruire complètement la ville. Orchies, autrefois ville de 5000 habitants, n'existe plus : Maisons, Hôtel de Ville, Eglise, ont disparu, et il n'y a plus d'habitants,

Le Commandant de la Place
MAJOR VON MEHRING

Valenciennes le 27 Septembre 1914,

 

Au moment où la colonne Sonntag avait quitté Orchies, le canon tonnait sans interruption dans la direction de Cambrai, indiquant d'importants engagements et l'approche imminente de l'ennemi.
L'occupation d'Orchies s'imposa donc à l'attention du général Plantey, car il était de toute nécessité de garder ce point important, où se maintenait la liaison entre les troupes opérant à Douai, et celles qui venaient d'arriver à Tournai.
La colonne Sonntag quitta donc Douai le matin du 27 septembre en direction d'Orchies. Elle comprenait les 2° et 3° bataillons du 8°, la 42° batterie, et deux escadrons de spahis. Cavalerie et artillerie s'y rendirent par voie de terre, l'infanterie par voie ferrée. Le train qui les transportait dut aborder Orchies, en faisant un large détour par Seclin et Templeuve, probablement pour faire croire à l'ennemi que les troupes arrivaient en nombre.
La colonne Sonntag se trouva donc pour la troisième fois devant Orchies. Comme on avait signalé à tort la présence de l'ennemi dans cette ville, la marche fut prudente.

La vue qui s'offrait dès qu'on y pénétra, ne saurait être oubliée. Il n'existait plus que des murs noircis, disparaissant au milieu d'une épaisse fumée bleuâtre ; l'âcre odeur de l'incendie prenait à la gorge ; silencieux les soldats regardaient ce triste spectacle. C'est ainsi que le commandant Maufait, qui faisait partie de la colonne put adresser cette phrase à l'un de ses sous-officiers, M. Verschaeve :
" Vous voyez, Monsieur le professeur de droit, voilà comme on respecte le droit des gens." Celui-ci qui séjourna près d'Orchies du 27 au 30 septembre, put ainsi recueillir des témoignages intéressants sur cette tragique exécution. Bientôt cependant, la colonne Sonntag dut battre en retraite, les Allemands marchant en force considérable sur Lille. Quelques heures plus tard, comme quelques maisons avaient été épargnées près de la gare, les habitants revinrent peu à peu, et le Père Lavigne qui était demeuré, se multipliait pour leur venir en aide.
Cette fois, les Allemands étaient bien les maîtres de la ville, et le 24 octobre, le commandant de la place, colonel Priess pouvait afficher la proclamation suivante :

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PROCLAMATION

"A partir d'aujourd'hui, le citoyen Joseph Carpentier est nommé Maire de la ville d'Orchies.
"Le Maire est tenu de rétablir et maintenir l'ordre dans la commune.
"Trois habitants assureront le service de la police dans la, commune, ils seront porteurs d'un brassard et les habitants devront strictement suivre leurs ordres.
"Tout individu, rôdant ou fouillant parmi les débris des maisons abandonnées sera arrêté, et remis aux autorités militaires.
"Le commandant compte que la population aidera le Maire à rétablir l'ordre le plus vite possible."

Le Commandant de Valenciennes
PRIESS             
Lieutenant-Colonel      

Valenciennes, le 24 Octobre 1914

 

 

 

Comme nous manquions de pommes de terre pour nourrir notre population, j'obtins de la Commandature l'autorisation de me rendre à Orchies afin d'en faire d'importants achats.
Il n'y a pas d'expression assez forte pour exprimer la sensation que j'éprouvais en voyant cette ville morte avec ses murs calcinés. Le spectacle était terrifiant.
Ce qu'il y a de plus curieux, c'est que le commandant de Valenciennes avait prié M. Tauchon de désigner un Maire à Orchies ; l'autorité allemande avait donc désigné M. Carpentier, mais on apprit dans une visite que fit l'un de nous à M. Trépont, Préfet du Nord, que celui-ci avait déjà désigné de son côté un autre habitant d'Orchies, M. Leroux. C'est naturellement M.Carpentier, nommé par les Allemands qui exerça les fonctions pendant la durée de la guerre.

Le jeudi 5 novembre, le commandant Priess m'envoya à Orchies accompagné cette fois d'un gendarme pour y rechercher un prisonnier civil qui était blessé.
Tristement impressionné cette fois encore par ce lugubre spectacle, je ne pus m'empêcher de présenter au Maire toutes mes condoléances. Cependant, la Supérieure de la Croix-Rouge, à qui je fus présenté, m'encouragea de son mieux sous l'œil défiant du gendarme qui surveillait chacun de nos gestes.
M'étant ensuite entretenu avec le Maire au sujet des pommes de terre, qui étaient abandonnées dans les champs, je pus jeter cette fois les bases d'un marché avantageux pour notre ville.
Aussi dus-je retourner à Orchies le 5 décembre suivant pour ratifier un marché de 21.000 kilogs.
Je m'efforçai ensuite d'encourager le Maire, alors fort embarrassé, car la Commandanture de Douai lui réclamait la totalité de ses impositions, bien que la ville fut complètement détruite.
Je lui donnai donc le conseil d'expliquer la triste situation dans laquelle il se trouvait, et d'attendre tranquillement les événements.
Mais les événements les plus graves s'étaient succédés sans trêve, et le drame d'Orchies nous paraissait déjà bien lointain, quand le vendredi, 17 septembre 1915, à la sortie du Conseil, je reçus la visite du Père Lavigne. S'occupant avec le plus grand zèle de la triste situation des 3.600 habitants d'Orchies qui étaient revenus peu à peu, il venait me supplier de lui
venir en aide, car il ne pouvait plus se rendre à Douai, qui était dans la ligne de feu, ni à Tournai, qui aussi lui était interdit. Il me demanda donc de faire rattacher la ville d'Orchies à la C. R. B. de Lille, ou plutôt de Valenciennes, les communications devant être plus faciles. Je me rendis donc avec lui à la Chambre de Commerce, où le directeur, M. Branquart, me répondit qu'il ne pouvait sans ordres, rien changer à la répartition des denrées.
De là, j'allais chez le lieutenant Neuerbourg au bureau américain, où je fis chercher le délégué Richardson, fort dévoué à notre cause. Le pauvre Père lui dépeignit la situation critique dans laquelle se trouvaient les habitants. Mais le nom d'Orchies était un véritable épouvantail pour les Allemands, aussi le lieutenant Neuerbourg lui répondit-il, qu'il ne pouvait lui donner satisfaction.
Mais M. Richardson intervenant alors rassura le Père Lavigne lui disant que les habitants d'Orchies ne mourraient pas de faim, proposant même de s'y rendre afin de calmer l'angoisse de la population, mais le lieutenant Neuerbourg l'arrêta lui disant qu'il n'en avait pas le droit.
Cette demande ne fut cependant pas inutile, car à la suite de cette entrevue, il fut décidé que Douai veillerait sur les habitants d'Orchies, et qu'une démarche serait faite auprès du Comité central à Bruxelles, pour obtenir un don spécial pour cette ville si éprouvée.
En attendant, je promis de lui envoyer, si je trouvais des chevaux, 1.000 kilogs de riz.
Déjeunant ce jour-là chez M. le Doyen Jansoone. Je priai le Père Lavigne de m'y accompagner. Ce déjeuner fut vraiment plein d'intérêt, car le Père Lavigne ayant fait le récit émouvant du drame d'Orchies dont il avait été le témoin oculaire.

Aujourd'hui, [1933] sur ces ruines, une ville nouvelle est rebâtie, et M. le président du Conseil, Poincaré, tint à venir lui-même, [le 24/07/1927] féliciter la population de son énergie et remettre à la ville la Croix de Guerre, récompense bien méritée.

 

 Orchies1  Orchies2  Orchies3   

Extrait du livre de René Delame : "Valenciennes Occupation allemande 1914-1918. Faits de guerre et souvenirs" Hollande & Fils ed. 1933
 

  • Extrait de la liste des personnalités réclamées après guerre (  Liste des personnes désignées par les Puissances alliées pour être livrées par l'Allemagne en exécution des articles 228 à 230 du traité de Versailles et du protocole du 28 juin 1919 )

MehringDittel

 

  • Dans cette liste apparaissent les noms de victimes :
    • PICQUET Germaine,
    • M. et Mme BAILLEUL.
  •   L'Historique du 6° Régiment d'Infanterie Territoriale pour cette période permet de suivre les principaux mouvements :
    Historique  (Merci à H.T. et lien vers son blog 73RI -273 RI et 6RIT)
  • Le monument aux morts d'Orchies comporte deux plaques rappelant les combats et l'incendie, ainsi que des noms de victimes de celui-ci :
      • BAILLEUL Charles
      • DECAMACE Pauline
      • LECUTIER Augustine 78 ans
      • ROSSIGNOL Stephanie 81 ans
      • PICQUET Germaine 21 ans

     

    OrchiesMaM 

    Orchies plaque2

    orchies plaque1

     

  • En 2004 parait dans le revue PEVELE de la Fondation de Pévèle (leur site) un article de M. Alain PAYELLE qui apporte des précisions sur le déclencheur de la répression allemande :

          Début septembre 1914, une colonne allemande quitta Valenciennes en direction de la mer afin de couper l'accès des ports du Nord aux Britanniques, manœuvre que réitérera Hitler 26 ans plus tard, mais avec succès cette fois. Cette armée traversa St-Amand et prit la route de Lille via Orchies. Comme toute armée, celle-ci a ses informateurs, qui l'attendent à hauteur de l'"Alène d'Or", à Millonfosse pour l'avertir qu'ils ont vu des tireurs isolés embusqués à l'entrée d'Orchies, au lieu-dit "Le Lapin". Le commandant de cette colonne arrêta aussitôt ses hommes et envoya une escouade de Uhlans (cavaliers armés d'une lance à l'origine). D'après nos sources, leur nombre varie de 6 à 10. Ils auraient effectivement essuyé quelques coups de feu à hauteur des moulins se trouvant au Lapin, mais sans dommage. Ils continuèrent leur route jusqu'à la Grand-Place; ils restèrent un moment en observation, tout en étant calmes et repérèrent un café, plus exactement un hôtel à l'enseigne du "Lion d'Or" Ils attachèrent leurs chevaux aux anneaux destinés à cet usage et entrèrent demander de l'eau pour ceux-ci. Là, d'après nos sources, se trouvaient des évacués, fuyant l'avance teutonne. Ils furent surpris et décontenancés par cette subite apparition. Pris de colère, ils sortirent aussitôt, décidés à poursuivre leur fuite en avant. Une fois dehors, ils virent les chevaux attachés. Animés par la fureur d'être rattrapés dans leur retraite par leurs poursuivants et pour les ralentir, ils tranchèrent les licols des équidés et les firent partir au galop. Voyant cela, nos Uhlans sortirent du bistrot et menacèrent ces insurgés qui, se voyant pris, jugèrent immédiatement que l'attaque serait pour eux la meilleure défense.
Armés des couteaux qui venaient de sectionner les licols des chevaux, ils se jetèrent sur les envahisseurs et les égorgèrent, les laissant sur place devant quelques témoins alertés par les cris des Germains et venus aux renseignements.
Les auteurs de ce guet-apens prirent la fuite avec armes et bagages, sans demander leur reste. On ne sut jamais qui ils étaient ni d'où ils venaient ...

On a dit, ou plutôt les Allemands ont dit, qu'ils auraient défiguré ces soldats, qu'ils les auraient même émasculés. Saura­-t-on jamais la vérité? Cet épisode certainement le plus douloureux de l'histoire de la ville m'a été conté, à peu de choses près, dans les mêmes termes par sept anciens d'Orchies, aujourd'hui disparus, me faisant promettre de n'en parler qu'après leur dis­parition et sans dévoiler leur identité. Peut-être se jugeaient-ils coupables, quelque part, d'avoir assisté (pour trois d'entre eux) au massacre, sans être intervenus. Mais le pouvait-il? Certainement pas! La suite, tout le monde la connaît : représailles terribles et incendie de la ville. Cet acte odieux s'abattit sur Orchies et sa population, qui n'étaient en rien responsables de ce regrettable incident.




 

Comme de coutume, un tel fait ne reste pas dans l'ombre, et les organes de propagande s'en sont emparés.
 

  • On trouve dans la publication en 1915 de la monographie publié par Hachette : "Les Allemands destructeurs de cathédrales et de trésors du passé", en annotation au paragraphe concernant Senlis : "ces incendies partout allumés dans une ville qui n'a, en tout cas, pas fait elle-même un geste d'agression" cette remarque :

 

      En bien des endroits, les Allemands ont agi de même.
Le journal de Bâle, Basler Nachrichten, du 17 novembre publie la proclamation suivante :

    "Malheureusement j'ai été forcé d'employer les mesures les plus rigoureuses des lois martiales contre la Ville d'Orchies. Dans cette localité furent commises les plus terribles atrocités. En en tirant les conséquences j'ai détruit toute la ville.
L'ancienne ville d'Orchies, ville de 5.000 habitants, n'existe plus. Les maisons, l'Hôtel de Ville et l'église sont anéantis.
Valenciennes, septembre 1914.
Le commandant de la place, Major von Mehring. "

Pour expliquer cet acte de vandalisme, la feuille bâloise cite un épisode des guerres napoléoniennes, d'après l'almanach «Rheinlandischer Hausfreund» (l'Ami de la maison du pays rhénan). En février 1807, lorsque l'armée française et une grande partie des troupes fédérales étaient en Pologne et en Prusse, un détachement des chasseurs badois se trouvait dans la ville de Hersfeld, en Hesse.

Un officier français vint à être tué par la population. L'empereur ordonna de piller la ville et la réduire en cendres. Cependant sur l'intervention des commandants Français à Cassel et Hersfeld, la punition fut adoucie. Quatre maisons seulement devaient être incendiées, mais l'ordre de pillage subsistait. Les habitants en furent désolés, cela se comprend. Le commandant de la place les exhorta, au lieu de perdre leur temps en plaintes inutiles, à rassembler leurs biens les plus précieux. Enfin vint le moment terrible, annoncé par le tambour.

Le commandant exposa alors aux troupes la situation malheureuse de la population et ajouta : « Soldats, la permission du pillage commence : qui en a l'envie, qu'il sorte des rangs. »

Pas un homme ne sortit.
Entre le procédé français et le procédé allemand, il y a une certaine différence.

 

  •  En 1915, les éditions Berger-Levrault publièrent "Les violations des lois de la guerre par l'Allemagne" par le Ministère des Affaires Étrangères


    On y trouve sous le n°44 un extrait du carnet du soldat Bissinger Heinrich, du régiment de pionniers bavarois, relatant les crimes des troupes allemandes à Orchies et à Valenciennes, accompagné d'un fac simile de la page du carnet.


    « 25. August. Um 10 Uhr Abmarsch nach Orchies, angekommen um 4 Uhr. Durchsuchen der Häuser. Sämtliche Civilpersonen  werden verhaftet. Eine Frau wurde erschossen, weil sie auf « Halt »
    Rufen nicht hielt, sondèrn ausreissen wollte. Hierauf Verbrennen der ganzen Ortsschaft. Um 7h Abmarsch 1 von der brennenden Ortschaft Orchies nach Valentiennes...
    « 26 August. Morgends Abmarsch 9 Uhr nach dem Osteingang von Valentiennes, zur Besetzung der Stadt um Flüchtlinge einzuhalten. Aile mânnlichen Personen von 18-48 Jahren werden verhaftet und nach Deutschland befördert. »


    « 25 août. A dix heures, départ pour Orchies ; arrivée à quatre heures. On fouille les maisons. Tous les civils sont arrêtés. Une femme fut passée par les armes parce qu'elle ne s'arrêta pas au commandement de "halte !", mais voulut fuir. Sur quoi, incendie de toute la localité. A sept heures, départ d'Orchies en flammes pour Valenciennes.

    « 26 août. Départ à neuf heures du matin vers l'entrée est de Valenciennes pour occuper la ville et retenir les fugitifs. Tous les habitants mâles de 18 à 48 ans sont arrêtés et expédiés en Allemagne.

  •  En 1927 la Revue d'histoire de la guerre mondiale  (disponible sur Gallica) tente de démêler les fils de l'Histoire.

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25 janvier 2011

RAISMES-VICOIGNE (Nord) fin août 1914

 

Les excations de RAISMES-VICOIGNE : 1.- Les civils fusillés
(25 août 1914)

 (A suivre : les militaires)

 

La ville est cernée de tous côtés. Les Allemands arrivent à Raismes par le bois et la rue du Marais, à 7h.1/2 du matin. En passant devant la maison de M. Paul Piérard, qui se tenait à la fenêtre du premier étage, un officier le mit en joue. Il se retira précipitamment ; à peine était-elle refermée qu'une balle, traversa le châssis, à l'endroit où il se trouvait, et fait explosion dans la poutre du plafond (Plusieurs morceaux de cette balle ont été retrouvés et conservés).

Sur la place les troupes se divisèrent en trois groupes.

La population d'abord trompée, et croyant à l'arrivée des Anglais se porte joyeusement au devant d'eux, puis, après s'être rendu compte de la méprise, se terre dans les maisons. A l'angle de la rue des Maraicaux un détachement assez important se dirige vers la rue de Valenciennes, où passent encore quelques retardataires du 27° territorial et du 127°.

Une courte escarmouche coûte la vie à deux Français. L'un nommé Pierre Menet, du 81° régiment d'infanterie territoriale, tué sur le coup, et l'autre, Jules Baconnet, mort quelques jours après de ses blessures. Quatre autres sont blessés, les pertes des Allemands qui parurent plus fortes, ne purent être exactement dénombrées, car ils emportèrent leurs morts et leurs blessés.

Pendant ce temps, le reste de la troupe se dirigeait vers la Grand'place en tiraillant dans la rue, sans doute pour intimider les habitants. Sur la place, une centaine d'hommes rangés sur trois rangs mirent genoux en terre en face de l'auberge de la Clef d'Or, et firent feu pendant quelques minutes sur cette auberge, et sur les maisons voisines, qui furent criblées de balles. Après quoi, ils procédèrent au pillage de ces habitations et des magasins de la place, jetant dans la rue ce qu'ils ne pouvaient emporter.

Un espion aurait informé les Allemands que des officiers français étaient dans cette auberge : Ce fut le prétexte de cette fusillade, ils y avaient en effet séjourné, mais venaient de partir.

Une forte portion de l'avant-garde allemande, environ une compagnie, avait, dès l'arrivée sur la place, bifurqué vers Vicoigne où des Uhlans, envoyés en éclaireurs, par la rue longeant la brasserie Sorlin, avaient rencontré quelque résistance.

Il se trouvait en effet, à l'angle de la route de Saint-Amand et de la rue de l'Abbaye, dans la propriété de M. Maurice, un petit groupe de cavaliers du 7° [escadron du 14e régiment] de hussards, qui tua six Allemands, et eut lui-même cinq tués. Les deux autres purent s'échapper, non sans peine, car l'un d'eux passa une demie journée dans un aqueduc, sur la route, ayant de l'eau jusqu'au cou, et dissimulé dans les herbes. Quelques Uhlans fatigués firent la sieste sur l'aqueduc où se trouvait caché ce héros. Ces deux hommes étaient: Gustave Rondeau, originaire de l'Eure, et Louis Duez, de Boulogne-sur-Seine, tous deux purent regagner les lignes françaises.

Les hussards avaient utilisé, pour barrer le passage, un arbre récemment abattu et placé à quelque distance. Les Allemands accusèrent ensuite les habitants d'avoir aidé les soldats à le traîner sur la route. Saisissant alors quelques-uns d'entre eux, sans aucun procès, après les avoir promenés dans la rue du hameau, ils les fusillèrent contre le mur d'une grange touchant à l'abreuvoir. Les malheureux se jetaient à leurs genoux, en protestant de leur innocence, mais ce fut en vain.
Il fut interdit de les relever, et ces tristes victimes restèrent deux jours sans sépulture, pendant que les débris calcinés de la grange incendiée recouvraient leurs corps. Ils furent ensuite enterrés tout habillés, dans le parc de M. Maurice, et les morts allemands à peu de distance.

Noms des fusillés de Vicoigne :

  • Jean·Baptiste BOUR, 29 ans ;
  • Eugène DEMORY, 28 ans ;
  • Odile BAILLY, 23 ans ;
  • Jules BRUNO, 20 ans ;
  • Auguste COUDEUR, 53 ans ;
  • Henri CUVELIER, 36 ans ;
  • Henri COUDOUX, 35 ans ;
  • Joseph LAJOUCKERE, 18 ans ;
  • Achille COLLET, 33 ans.

Les Allemands plantèrent une croix de bois sur la tombe de leurs compatriotes, et forcèrent les habitants de la commune d'y apporter chaque jour des fleurs.

Fous de terreur, car leur chef avait été tué, les Allemands brûlèrent une douzaine de maisons, et tuèrent à bout portant un vieillard

  • Juvénal EVRARD, âgé de 81 ans,

    qui, prenant les Allemands pour des Anglais, s'avançaient au-devant d'eux, un drapeau tricolore à la main ! Les Allemands pénétrèrent ensuite dans le château de M. Maurice.

Après l'avoir pillé de fond en comble, ils y burent et mangèrent jusqu'à trois heures de l'après-midi, et y mirent ensuite le feu.

Tandis que ces faits se déroulaient à Vicoigne, le gros des troupes défilait dans Raismes, et à un certain moment, fit halte pour déjeuner. Pendant cette halte, dix habitants furent arrêtés encore, sous prétexte qu'un coup de feu aurait été tiré, qui, en tout cas, n'avait blessé personne.

Après un jugement très sommaire, trois d'entre eux furent exécutés dans un champ au bout du Marais, non sans avoir été traînés à travers le village, roués de coups, brûlés avec les cigares de leurs conducteurs. Les autres otages après avoir été forcés d'assister à cette sauvage exécution furent traînés et brutalisés quelque temps, puis relâchés (1).

Ces crimes contraires au droit des gens, furent commis par la 7° compagnie du régiment de grenadiers Poméraniens n° 9.
Le défilé des troupes dura une grande partie de la journée. On estime qu'un corps d'armée environ passa par Raismes.

Les exécutions de Vicoigne furent ordonnées par von Bismarck, petit-fils du fameux Chancelier, qui prit lui-même un des cadavres et le jeta dans l'abreuvoir. Il figura après guerre sur la liste des coupables réclamés par les alliés.

Habitants exécutés rue du Marais :

  • Charles RUFFIN ;
  • Léon CLOET ;
  • Leon LANDUYT.

Noms des personnes prises comme otages dès le début de la matinée, et relâchées après une longue souffrance de plusieurs heures:

  • Léon HALLEY ;
  • François BIREMBEAUX ;
  • LAMBIN, instituteur ;
  • LEROY, cabaretier ;
  • Elie NEVE, employé, pris à Vicoigne ;
  • Gustave LABBE, ouvrier ;
  • Gustave GRAVAIS et son fils ;
  • Joseph COASNE ;
  • MARET.

Extrait du livre de René Delame : "Valenciennes Occupation allemande 1914-1918. Faits de guerre et souvenirs" Hollande & Fils ed. 1933

 

  • Les lieux :

61200848

 

La rue des Maraicaux est aujourd'hui la rue Gustave Delory
La rue du Marais (actuellement rue Léopold Dussart) se situe un peu avant dans la progression des Allemands vers Raismes depuis Bruay.

 

  • L'emplacement où les civils ont été exécutés :

P1020057

P1020061

  •  Ce site traite du monument et de sa construction .
  • Une carte postale d'époque :

Vicoigne(BMV)

  • La tombe du cimetière "du Prussien"

P1060149

P1060150

  • Les fusillés de la rue du Marais figurent sur le monument dans l'église de Raismes :

eglisederaismes


eglisederaismes2

 

  • Comparaison des noms provenant des différentes sources :
    Récit de Delame Plaque de Vicoigne Carte Postale Cimetière du Prussien N° d'acte de décès. 1914 Raismes
    BOUR Jean·B.te BOUR Jean·B.te BOUR Jean·B.te BOURG Jean·B.te

    136

    DEMORY Eugène DELORY Eugène DEMORY Eugène DEMORY Eugène 137
    BAILLY Odile BAILLY Odile BAILLY Odile BALLY Odile  138
    BRUNO Jules BRUNEAU Jules BRUNO Jules BRUNEAU Jules  134
    COUDEUR Auguste COUDEUR Auguste COUDEUR Auguste COUDEUR Augustin  133
    CUVELIER Henri CUVELIER Henri CUVELIER Henri CUVELIER Henri  135
    COUDOUX Henri COUDOUX Henri COUDOUX Henri COUDOUX Henri  129
    LAJOUCKERE Joseph LAJONCHERE Joseph LAJOUCHERE Joseph LAJONCHERE Joseph  132
    COLLET Achille COLLET Achille COLLET Achille COLLET Achille  131
                     
    EVRARD Juvénal EVRARD Juvénal     EVRARD Juvénal  130
                     
        VAN DE MAELE Pierre VAN DE MAELE Jean VAN DE MAELE Pierre  139
                     
                Eglise de Raismes  
    RUFFIN Charles RUFFIN Charles     RUFFIN Charles  127
    CLOET Léon CLOET J.Baptiste     CLOË J. B.te  126
    LANDUYT Léon LANDUYT Norbert     LANDUYT Norbert  125

     J'ai vérifié ci-dessus les décès des civils : tous ont un acte de décès à l'Etat-civil de Raismes.

 

 

  • Extrait de la liste des personnalités réclamées après guerre ( Liste des personnes désignées par les Puissances alliées pour être livrées par l'Allemagne en exécution des articles 228 à 230 du traité de Versailles et du protocole du 28 juin 1919 )

Bismarck

 

  • Extrait du New York Times du 8  octobre 1919

NYT_Oct_8_1919

  • Extrait de "Current History" publié en 1920 par le New York Times (vol 11):

currenthistoryfo11newyuoft_0246

 

  •  Revue commerciale du Levant, 1922.

    RCL 1922

  • L'Excelsior 1919

    Excelsior 1919


  •  Mémoires du préfet du Nord Félix Trépont (1863-1949)

    Mémoires Trépont
    (source)

 (A suivre : les militaires)

 

24 janvier 2011

BREUCQ Elie

ESTREUX
25 Aout 1914


A Estreux, où ils [les Allemands] firent leur entrée à 5h1/2 du matin, ils marchaient sur deux files, tenant le milieu de la chaussée. Surpris par l'arrivée des troupes, le sieur Elie Breucq, impotent, pouvant à peine se traîner, âgé de 65 ans,ne put gagner assez vite le côté de la rue. Immédiatement, un sous-officier du 36° de ligne tire son revolver et le tue d'une balle dans le dos ; le vieillard tombe foudroyé, et son cadavre est jeté sur le côté.

Ce récit est extrait du livre de René Delame : "Valenciennes Occupation allemande 1914-1918. Faits de guerre et souvenirs" Hollande & Fils ed. 1933

  • Le nom d'Elie BREUCQ, né en 1849, figure sur le monument aux morts d'Estreux :
   

P1330761 P1330763

    
23 janvier 2011

DESORMEAUX Barthélémy

VICQ ( Nord)

Le 1er décembre 1914 DESORMEAUX Barthélémy agé de 15 ans est tué "par une balle allemande". Son nom figure au dos du monument aux morts de Vicq, sans autre information.

P1010058

P1010061

   Barthélémy DESORMEAUX est né à Quarouble le 9/12/1899 de Ulysse et LEFEBVRE Roseline-Marie. C'est un cousin (au 5e degré) de DESORMEAUX Nestor, traité sur ce même blog.


VILLARS Emile Désiré figurant sur le monument sans indication de régiment est une autre victime civile décédée à Cysoing le 4 octobre 1914.

Les mêmes informations figurent au monument aux morts du cimetière communal.

P1130002

 

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