Déporté Résistant au titre de la grande guerre
Alors que la notion de déporté apparaît clairement durant la première guerre, même si elle se confond souvent avec internés et prisonniers, tous civils, les actes de résistance à l'envahisseur, quels qu'ils soient, ne débouchent pas sur la notion de "Résistance organisée" comme sera le cas durant la seconde guerre mondiale.
Le statut des déportés et internés résistants est défini par la loi du 6 août 1948.
Si dans l'article premier, je cite : "La République française reconnaissante s’incline respectueusement devant la mémoire des martyrs de la barbarie nazie et fasciste qui ont contribué à sauver la patrie, salue leurs familles et rend hommage aux rescapés de la Résistance dont elle proclame les droits.", rien dans les articles suivants ne lie le statut de déporté-résistant exclusivement à la guerre qui vient de se terminer.
L'article 2 commence par "Le titre de déporté résistant est attribué à toute personne qui, pour acte qualifié de résistance à l’ennemi, a été :
1° Soit transférée par l’ennemi hors du territoire national, puis incarcérée ou internée dans une prison ou un camp de concentration ;
2° Soit incarcérée ou internée par l’ennemi dans les camps et prisons du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle;"
De fait, en parcourant les états de services militaires de certains hommes des territoires occupés durant la grande guerre - le plus souvent parce qu'ils ont été distingués dans les années 1920 -, mobilisables durant l'occupation mais qui n'ont pu rejoindre, ainsi que ceux dont l'état des services porte la mention "Non recensé en temps utile par suite d'un cas de force majeure"
(parfois suivie dans le Nord de la formule "Retrouvé en pays reconquis"), il arrive que l'on trouve mention de la reconnaissance vers 1957-58 de la qualité de déporté-résistant .
Si ce n'est pas vrai pour tout ceux qui furent dans le même cas, c'est qu'il fallait prouver ces actes de résistance, notamment pour ceux qui ont tenté de rejoindre la France libre via la Hollande mais ont été capturés, qu'ils soient -probablement- encore en vie et que quelqu'un ou un organisme se charge de faire la demande.
Voici ceux dont j'ai connaissance, la liste sera complétée au fur et à mesure :
BISIAUX Lucien (M.), agriculteur à Fontaine-au-Pire (Nord). Médaille de la reconnaissance française, JORF du 19/06/1923. |
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Bronze ☞ |
Voulant se rendre en France non occupée pour être incorporé, a été arrêté, le 10 juin 1915, et fait prisonnier à la frontière de Hollande ; maintenu pour ce fait pendant deux mois en cellule à Aix-la-Chapelle, a été dirigé ensuite sur Darmstadt, où il a travaillé dans une ferme jusqu'à l'armistice. BISIAUX Edouard Lucien né le 26/10/1897 à Caudry (Nord) de Jules et LERICHE Elise. Il ne semble pas y avoir de fiche à son nom dans les archives du CICR. "Non recensé en temps utile par suite d'un cas de force majeure" (sic), il est affecté au 81e RI dont il sera libéré le 16/09/1919. Cependant, avec la guerre suivante, la notion de déporté résistant va apparaître, et son état des services (Matricule 2387, classe 1917 Cambrai) porte la mention suivante : |
BEAUBE Paul-Émile (M.) Mouleur à Saint-Michel (Aisne). Médaille de la reconnaissance française, JORF du 11/03/1923. |
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Argent ☞ |
A logé et ravitaillé pendant 11 mois un aviateur français. Condamné aux travaux forcés à perpétuité (27 mois d'internement). Né le 31/03/1889 à St Michel, de Jean Baptiste et FLEURY Zélie, il épouse Marguerite-Blanche Berteaux le 12/07/1888. Il est incarcéré à Rheinbach en Nov. 1916 et à Cassel/Wehlheiden en Jan. 1917. De la classe 1909, il avait été ajourné puis exempté, maintenu tel car "en pays envahi à la mobilisation" (Hirson est envahi par la 2e armée allemande le 28 août 1914). Ce n'est qu'en 1957 qu'il sera comme de rares autres considéré comme déporté-résistant. (Etat des services : matricule 173, classe 1909 Saint-Quentin) |
DUPONT Charles-René-Edouard-Joseph (M.) Cultivateur à Bevillers (Nord). Médaille de la reconnaissance française, JORF du 11/03/1923. |
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Argent ☞ |
Arrêté en Belgique le 1er juin 1915 au moment où il tentait de franchir la frontière hollandaise emprisonné a refusé de dénoncer les personnes ayant facilité son départ et a été interné en Allemagne pendant trois ans et demi (Holzminden et Senelager). Né à Bevillers le 11/03/1897, sa fiche aux archives de la Croix-Rouge porte la mention "fait prisonnier à Kalmetut", en réalité Kalmthout dans la province d'Anvers, à 3km de la frontière hollandaise. Probablement d'ailleurs ne savait-il pas que celle-ci était barrée par le "Dodendraag" (câble de la mort), clôture électrifiée dressée par l'occupant le long de la frontière belgo-néerlandaise, à moins qu'un passeur ne l'accompagnât. "Non recensé en temps utile, cas de force majeure" (sic) il est appelé avec sa classe en 1919, et sert 3 mois au 3e dragons. |