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Les civils du Valenciennois dans la Grande Guerre 1914-1918
23 août 2016

Victimes de leurs compatriotes

 Mise à jour du 19/09/2016

    J'emploie a dessein pour le titre le terme de la Gazette des Ardennes pour sa rubrique quasi-quotidienne :

VDLC

     Il n'est pas possible de citer tous les noms parus, mais je relève ici ceux qui traitent du valenciennois.

 

     Publication du 20 août 1916 :

A BLANC-MISSERON (Nord)

Le 12 août 1916

 

  • LAMOTTE Henri, 35 ans, tué.

  • MARISSAL Victor, 59 ans, tué.

  • DUÉE Gilbert, 13 ans, tué.

  • DUÉE Paul, 10 ans tué.

  • DUÉE Auguste, 48 ans, blessé.

  • DUÉE Marcel, 7 ans ½ , blessé.

  • GENIN François, 40 ans ½ , blessé.

  • La femme FREMERY-GAUCHER Zelia, 55 ans, blessée.

  • NAVEAU Octave, 43 ans, blessé.

  • MORY Nestor, 51 ans, blessé.

  • STORDEUR Victor, 25 ans, blessé.
     

 

     Blanc-Misseron n'est pas une commune, c'est un quartier bien connu car lieu d'implantation de nombreuses industries, dont ferroviaires, à cheval sur Crespin et Quièvrechain, deux communes voisines limitrophes de la Belgique. Le nom viendrait d'un misseron (moineau en patois) blanc comme neige, dont Charles Deulin raconte l'histoire dans les Contes d'un buveur de bière, à lire sur Gallica. (Remarque : La source St Landelin n'est pas loin ;o) )

 


(cliquer pour accéder au site et à la suite de l'histoire)

 

     Le bois d'Amblise existe toujours, il a donné son nom à une aire de l'autoroute A2 qui le coupe, le chemin d'Amblise est à l'ouest de Crespin sur cet assemblage de plans du cadastre, le long de la frontière entre Crespin et Quarouble 3e commune qui est aussi limitrophe de Quiévrechain, la Belgique est à l'Est.

B-M

     La rue "Entre deux bois" est l'ancien chemin de Quarouble (à Crespin). Ces rues permettent, à partir des actes de décès, de localiser le lieu du drame. Je n'ai pu retrouver que 3 des 4 actes :

 

  • LAMOTTE Henri, né à Holain (Aisne) le 15/05/1881, décédé à Crespin au lieu-dit "Entre deux bois",

  • MARISSAL Victor, né à Quarouble le 20/04/1857, décédé à Quarouble au lieu-dit Amblise,

  • DUÉE Paul, né à Crespin le 8/08/1906, domicilié chemin d'Emblise à Quiévrechain y décédé :"tué par une bombe lancée par un aéroplane".

    Les heures de décés de ces 3 actes coïncident : 14h et 15h. Bien que l'acte de Paul Duée comporte une rature ("Gilb") je n'ai pas trouvé l'acte de Gilbert Duée : Paul avait un frère de ce prénom, né à Quarouble le 11/08/1903.

 

A noter qu'à Blanc-Misseron (Quiévrechain), la fonderie Ruelle, transformé en fabrique de munitions sera le théâtre d'une explosion le 1er juin 1918. Voir sur ce blog : Explosion à Quièvrechain

 


 

     Publication du 5 octobre 1916, des blessés à Anzin : la gazette pousse le souci du détail en citant pour chaque victime les membres de sa famille proche qui sont au front, ou prisonniers.

A ANZIN (Nord)

Le 2 Août 1916

  • LENNE Eugène, 19 ans, grièvement blessé. (Son père, Lenne Eugène, 43 ans, est soldat au 127e régimenet d'infanterie ; un oncle, Moriamoz [sic mais plus probablement Moriamez] Henri, est prisonnier de guerre ; un deuxième oncle, Moriamoz (sic) Léon est soldat au 127e régiment d'infanterie.)

  • LEGRAND Georges, 19 ans, grièvement blessé. (Son frère, Legrand Alfred, 28 ans, est soldat au 127e régiment d'infanterie.)

  • La femme PREAT Désirée, 57 ans, grièvement blessée. (Son fils, Preat Léon, 27 ans, est soldat au 40e régiment d'artillerie.)

  • CARLIN Noël, 55 ans, grièvement blessé. (A deux fils et un gendre dans l'armée française : Carlin François, 25 ans, Carlin Noël, 24 ans, tous deux soldats au 1er régiment d'infanterie, en garnison à Commercy ; son gendre Duchesne, 24 ans, est soldat au 127e régiment d'infanterie.)
  • DERBANNE Alexandre, 14 ans, grièvement blessé. (A un frère, Derbanne Henri, 22ans, soldat au 43e régiment d'infanterie ; un oncle, Godeau Clémence; 40 ans,soldat au 127e régiment d'infanterie et prisonnier de guerre.)

  • MARCHAND Gaston, 14 ans, légèrement blessé. (un de ses frères, Marchand Julien, 25 ans, est dans une colonne du train ; un deuxième frère, Marchand Emile, 19 ans ½ , est prisonnier civil ; un troisième frère, Marchand Henri, est soldat au 127e régiment d'infanterie ; son beau frère, Marianny Emile, 33 ans, est soldat au 91e régiment d'infanterie, en garnison à Mézières ; son oncle, Leuleu Félicien, 40 ans, soldat au 327e régiment d'infanterie, apparemment prisonnier de guerre au camp de Friedrichsfeld.)
  • TOMBA Hocine, 15 ans, légèrement blessé.
  • AVORTE Jules, 13 ans, légèrement blessé. (A un oncle qui est soldat dans un régiment d'infanterie en garnison à Nancy.)

     Les renseignements, qui, vu certaines imprécisions, semblent avoir été donné par les familles, mettent en évidence - pour nous qui les lisons 100 ans plus tard - l'implication des familles dans la guerre, et reposent la question de l'information dans les territoires occupés, question à laquelle répond très partiellement la Gazette des Ardennes, (notamment avec les listes de prisonniers), même si le but est multiple dans un journal émis par l'occupant.

 Voir le sujet sur la Gazette des Ardennes dans ce blog.

     La cause exacte n'est pas indiquée, mais Anzin étant situé loin du front, il est plus que probable que ce soit un bombardement aérien.

 


A SAINT-AMAND-LES-EAUX (Nord)

le 17 octobre 1916

 

  • QUESNOY Louis, 68 ans, tué. (Il avait un gendre, M. Flour, soldat dans l'armée française.)

  • HOUZÉ Émile, 33 ans, tué. (Il avait un frère soldat dans l'armée française.)

  • BRUON Edouard, 39 ans tué.

  • VERGIN Pierre, 50 ans, tué.

  • La femme VERGIN-MARCHAND Pauline, 42 ans, légèrement blessée.

  • La femme CHALANT-EDOUARD, 49 ans, légèrement blessée.

  • Veuve LEMAIRE-DHOTE Louise, 47 ans, légèrement blessée.

 

Les actes de décès à St-Amand donnent peu d'information

  • QUENOY Louis Arthur, né le 26/12/1848 à Bruille-lez-Saint-Amand, décédé en sa demeure 17 rue Gambetta.
  • HOUZÉ Émile Edouard, né le 03/08/1883 à St-Amand, décédé en sa demeure, Croix du Petit-Dieu, 37.
  • BRUON Édouard, né le 20/04/1877 à Ethe, province du Luxembourg (Belgique), décédé en sa demeure, 36 rue du Bruille.
  • VERGIN Pierre, né le 07/01/1867 à St-Amand, décédé en sa demeure, Croix du petit-Dieu, 37.

     Les lieux de décès (leurs domiciles, assez éloignés les uns des autres) ne permettent pas de déterminer un endroit pour ce qui a fort probablement été un bombardement aérien. Il faut souligner que la tenue de l'état civil était surveillée par l'occupant : au début de tels actes de décès étaient plus détaillés, puis beaucoup moins, ne nous laissant guère d'indice (de trace ?). Il faut parfois comprendre entre les lignes, quand, à Valenciennes par exemple, il est indiqué que l'acte est dressé sur ordre de la Commandanture, pour deviner qu'il s'agit d'un fusillé.

QUENOY, HOUZÉ et VERGIN figurent au monument aux morts de St-Aland : voir sur ce blog.

     A noter que la Croix du Petit-Dieu désignait un quartier où se trouve la placette éponyme du quartier du Moulin des Loups, à l'angle de la rue Roger-Salengro et du chemin de l'Empire. Là se trouvait comme à l'époque une grande croix, devant laquelle passaient les condamnés avant d'être emmenés au Mont du Gibet, situé au sud, un peu au-dessus de la rue de la Cense-au-bois. Voir une des gravures de l'album de Croy .

 


A VALENCIENNES

Dans la Gazette du 20 mai 1917 : bombardement du 2 mai 1917 : voir sur ce blog  suivre les années  pour 1918


 

 

Cette page est susceptible d'apports en fonction des parutions de la gazette.

 

 

 

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19 août 2016

Autour d'une affiche à Valenciennes

 entete

     Ainsi commence l'article de la "gazette régionale" de la Gazette des Ardennes. Voici l'affiche en question :

Valenciennes 19160630 c
Théâtre Municipal de Valenciennes
Samedi 1er juillet 1916
Spectacle du théâtre municipal d'opérettes de Leipzig
Direction: Joseph Gross

"Cher Augustin"

Operette en 3 actes de Rudolf Bernauer et Ernst Welisch
Musique de Léon Fall

 

 L'article continue ainsi :

Un rassemblement ne tarde pas à se former. Des hommes et des femmes sont arrêtés devant la dite affiche à laquelle ils ne comprennent qu'une chose : c'est qu'il y aura une représentation au théâtre de Valenciennes, le samedi 1er juillet 1916 et qu'on y jouera une opérette.

Les conversations vont leur train :

- " Si ce n'est pas honteux de faire du théâtre en temps de guerre !" dit une pâle jeune fille d'une vingtaine d'années.

- "Oui, à l'heure même ou se font tuer nos maris, nos fils, nos enfants !" ajoute une femme .

- "A eux aussi, on tue des hommes et ils pourraient bien se dispenser, il me semble, de donner en spectacle des pièces à rire, quand il y a tant à pleurer pour tout le monde !" conclut un monsieur âgé.

Son observation tombe comme une sentence et tous de l'approuver du geste et de la parole .
Ils ne savent donc pas qu'à Paris, qu'à Marseille, qu'à Bordeaux, que dans toutes les grandes villes de France enfin, les cafés-concerts, les bals y sont ouverts, et qu'on y joue, et qu'on y chante et qu'on y danse ?

Ils ignorent que nos soldats prisonniers en Allemagne, ont installé des théâtres dans les camps, fondés des musiques et des chorales, et qu'ils s'amusent, eux aussi, à jouer, à chanter et à danser pour tuer le temps ?
Ou serait-ce qu'ils raisonneraient de parti-pris, avec la Haine plus aveugle encore que l'Amour ?
L'ignorance ou le parti-pris de cette foule à laquelle nous sommes mêlés nous fait pitié et résolument, nous prenons à coeur de lui apprendre, de lui ouvrir les yeux à une plus juste réalité, à un jugement meilleur. Nous lui disons tout cela, à ce troupeau de Panurge dont les "Mauvais Bergers" exploitent la naïveté et la bonne foi, depuis près d'un demi-siècle, dans les journaux, dans les livres, dans les conversations, dans tout et partout ... jusque dans l'histoire.

Et ces hommes et ces femmes qui nous écoutent, bouche bée, les yeux écarquillés de l'étonnement qu'ils ont d'apprendre ce qu'ils ne savaient pas, et le monsieur âgé semble dépité quand, à notre tour nous laissons tomber cette sentence :

"En septembre 1812, les Français parvenaient à établir un théâtre à Moscou, échappé à l'incendie, et l'on y jouait la comédie avec des acteurs français et italiens qui furent payés pour six mois, cela afin de faire croire aux Russes que nous étions disposés à passer l'hiver dans cette ville."

Ce que les Allemands font en 1916, nous l'avons fait il y a un peu plus de cent ans, et si vous en doutez, c'est écrit en toutes lettres, dans les "Mémoires du sergent Bourgogne" mort adjudant de place le 15 avril 1867, ici même, dans la bonne et franque ville de Valenciennes

Vous le voyez, rien n'est nouveau sous le soleil ...

      Je ne commenterai ni le ton ni cet article, ne sachant si le rédacteur était sur place, ni même s'il s'est exprimé, ce dont je doute fortement ..... "Das ist Propaganda".

     Il cite Adrien Jean-Baptiste François Bourgogne, né le 12 novembre 1785 à Condé-sur-l'Escaut, décédé le 14 avril 1867 à Valenciennes et inhumé avec son épouse au cimetière St-Roch :

stele B

Militaire français des guerres de l'Empire, célèbre pour ses mémoires sur la campagne de Russie. Le livre est disponible sur Gallica, en voici le passage cité :

 MSB

 

    L'auteur - pour amadouer le lecteur ? - fait également allusion au chroniqueur Jehan Froissart, né à Valenciennes vers 1337, qui disait :

Si aucun quiert qui je suis, je m'appelle Jehan Froissart, natif de la bonne et franke Valenciennes.

     La pièce, créée en 1912 fut bien entendu jouée comme beaucoup d'autres ; en voici un extrait : "Lass dir Zeit" (Prenez votre temps), chanté par Franz Fehringer vers 1950

 

 

13 août 2016

Civils victimes accidentelles d'engins de guerre

 

Le 20 avril 1916, vers huit heures du matin, quatre enfants du Chemin-Vert ont trouvé un petit obus perdu et se sont amusés à vouloir le défoncer avec un marteau.
Tout à coup cet engin fit explosion et les quatre enfants furent tués.
Aussitôt les officiers et les soldats qui logent dans la commune se sont rendus sur le lieu de l'accident, et c'est les larmes aux yeux qu'ils constatèrent la fin tragique de ces pauvres innocents.
Les obsèques eurent lieu le 21 à trois heures du soir, au milieu d'une nombreuse assistance.
Dans le cortège et en tête on a remarqué la présence d'un très grand nombre d'officiers et de soldats porteurs de gerbes et de couronnes.
La municipalité d'Aulnoy y assistait également.
Pendant l'office, M. le Curé a remercié les autorités militaires et civiles des marques de condoléances qu'elles témoignaient aux familles de ces malheureuse victimes.
A la sortie du cimetière, MM. les officiers se sont rendus chez Mme NEUS, mère de deux victimes, et en termes émus ils adressèrent à cette pauvre femme affolée de douces paroles de consolation et la part de douleur qu'ils prenaient pour la perte cruelle qu'elle venait d'éprouver.
La présence et l'esprit humanitaire des officiers et des soldats furent très commentés dans la commune.

     Cet article parait le 15 mai 1916 dans la rubrique "LA GAZETTE RÉGIONALE" du numéro 191 de la Gazette des Ardennes. Le ton de certains passages de l'article est très largement dû au fait que cette publication est éditée par l'occupant.

    Il n'en reste pas moins que le fait est avéré, il s'agit de :

  • DOOM Estelle Diane Sidonie, 6 ans, née à Hamme (Flandre-Orientale, Belgique) le 17/03/1910.
  • DOOM Maurice Camille, 7 ans et demi, né à Hamme (Flandre-Orientale, Belgique) le 06/08/1908.
  • NEUS Henri, 10 ans et demi, né à Hamme (Flandre-Orientale, Belgique) le 24/12/1905.
  • NEUS Pierre César, 2 ans et demi, né à Aulnoy le 30/09/1913. (Son acte de décès le fait naitre à Hamme, mais son acte de naissance a été rédigé à Aulnoy)

dont les noms figurent au monument aux morts d'Aulnoy :

noms

MaM

 

(A noter que le nom de Jean JAURES est également inscrit sur le monument)

       Le journaliste - qui insiste beaucoup sur la présence des militaires allemands - ne donne aucun détail sur ce "petit obus perdu". Gageons que s'il s'était agit d'un obus français ou anglais, voire une bombe d'avion, il n'aurait pas manqué de le signaler, ajoutant ainsi des noms à la longue liste des "Victimes de leurs compatriotes" qui paraissait dans presque toutes les Gazette des Ardennes.

      Le plus petit calibre d'obus utilisé (des deux cotés) était 37mm, et le calibre allemand le plus courant 7,7cm. Que faisait-il là où les enfants l'ont trouvé ... ?????? Peut-être l'obus était-il sur sa douille en laiton et ont-ils voulu récupérer celle-ci, ou la ceinture de cuivre.....

 


 

     On trouve quelque temps après la relation d'un accident du même type à Berseaucout (hameau de Pertain, Somme). Ce sont les enfants de la famille Alliot qui en ont été les victimes le 3 août 1916 :

Berseaucourt-Pertain 80

deux noms figurent parmi les victimes civiles du monument aux morts de Pertain : André et Fernand ALLIOT

80 Pertain mam
Photo :Stéphane Protois

 

Puis à Bruxelles, décidément malgré la guerre qui les entourait, l'attrait du danger est le plus fort :

Brux
VANNITSEN Joséphine Henriette

 

En juin 1917, c'est à Montmédy que le drame, toujours relaté par la Gazette des Ardennes, arrive :

Montmedy 1917-364
MIGNION Georges

 

 L'Est Républicain du 24/12/1918 signale de pareils accidents à Famars, Curgies, Saint-Amand-les-Eaux, Marly et Vieux-Condé :

Victimes
Paul BOURSE (St Amand les Eaux)
Jules MERIAUX (Marly)

 

Le 7 juin c'est à Lille qu'un accident semblable se produit :

1918-484 Lille
Gazette des Ardennes du 4 aout 1918, VAN HECKE Charles-Louis

Une fois de plus la Gazette des Ardennes, du 21 juillet 1918, relate :

1918-473 Valenciennes

     FERTIN Gaston Léon Emile était né à Valenciennes le 30 octobre 1908, de FERTIN Léon Joseph Jules et de DELATTRE Louise Léonie Agnès.

 
Il y en eut certainement bien d'autres  !

100 ans après ce genre d'accident arrive hélas encore dans nos régions ; n'oublions pas la règle :


"La munition n'a ni amis ni ennemis, elle ne connaît que des victimes"

 

Ces imprudences ne s'arrêtaient pas aux zones de front ou occupées :

1918-316 grenade à Toulon
Mai 1918 Charles JAUME

 

1918-384 obus à Pte-Synthe
Juin 1918, Albert BOHN

 

GdA 1918-599
Gazette des Ardennes du 25 septembre 1918, Marius LAIR

 

    La fin des hostilités va augmenter les risques, l'occupant  n'assurant pas le déminage ni le nettoyage, qui va incomber aux alliés :

Lille

 

Le 20 juillet 1919, le Bulletin de Meurthe et Moselle signale un accident par éclatement de grenade à SORNEVILLE : Jeanne BOTTELIN, 10 ans. (Son nom figure au monument aux morts de Sornéville).

Bulletin M&M 19190720

 

Le 12 avril 1927, Le Grand Echo du Nord relate une nouvelle tragédie, à Cuinchy cette fois :

GENF 19270412

 

 

3 août 2016

La Gazette des Ardennes : listes des camps de prisonniers et autres informations.

 

    Quand on tente d'imaginer la vie en territoire occupé, par exemple pour ceux du Valenciennois durant les 1531 jours de l'occupation, on se demande ce qu'ils savaient de ce qui se passait de l'autre coté de la ligne de front, et comment ils le savaient : il ne faut pas perdre de vue que l'habitant lambda ne pouvait que subir l'occupation sans correspondance avec la zone libre, et donc sans nouvelle des proches évacués, réfugiés, ni des parents et amis prisonniers de guerre. Ce n'est que lorsque les prisonniers ont pu envoyer des cartes qu'ils ont pu -parfois- faire passer avec leurs nouvelles un peu d'information (voir sur un autre de mes blogs le cas de mon grand-père maternel). Cependant toute communication concernant la zone libre par le biais de prisonniers de guerre était proscrite et censurée.

 

     Il y a bien eu en mai 1916 une procédure de "Correspondance avec les départements envahis" mise en place par le ministère de l'intérieur. Elle ne s'adressait qu'aux réfugiés de ces départements qui devaient se procurer auprès des autorités une carte, où ils rédigeaient un message de 20 mots. Une fois traduite en allemand et transmise par le biais de la Croix-Rouge suisse installée à Francfort-sur-le-Main aux autorités d'occupation qui ont semble-t-il toléré ce procédé qu'ils ne reconnaissaient pas officiellement, la carte, arrivée auprès des destinataires (s'il n'avaient pas changé de domicile), permettait une réponse -en allemand- et suivait le chemin inverse pour finalement (re-traduite) être adressée à l'expéditeur après un certain temps ... parfois 6 mois. Ont été autorisés à profiter de cette correspondance les militaires ayant de la famille en zone occupée.

 

    C'est donc le biais de nouvelles des proches que l'occupant a choisi pour délivrer un peu d'information en créant des listes de noms de prisonniers, puis de soldats évacués en Suisse etc. Cette parution était un argument d'achat de la Gazette des Ardennes, même si celle-ci restait un organe de propagande. D'autre part la question des prisonniers était un sujet sensible, l'Allemagne, qui n'avait pas apprécié que des soldats allemands capturés soient internés dans nos colonies d'Afrique, fera pression en prenant des otages civils qu'elle ira jusqu'à interner en Lithuanie, mais veut montrer par ces listes le soin apporté aux Français qu'elle détient. Par la même occasion un rédacteur français publiera des articles pacifistes et critiquant l'Angleterre.

    Bien entendu la Gazette sera la cible des critiques, comme celle d'Eugène Thébaut qui parait en 1918 dans la "Revue des Deux Mondes" sous le nom de "Gazette infâme" : à lire sur gallica.fr :

 


utiliser les flèches ou cliquer pour accéder au site

    Le premier numéro de la Gazette parait le 1er Novembre 1914, édité à Rethel, distribué gratuitement et diffusant les communiqués, puis à Charleville à compter du 15 Mars 1915 ; la dernière Gazette portant le n° 773 parait le 8 novembre 1918. Il y aura jusqu'à 6 numéros par semaine, sur 4 puis 6 colonnes, une feuille recto-verso, davantage lorsque de longues listes de noms, puis les pages de réclames apparaissent.

Bandeau

L'intégralité des exemplaires est disponible sur le site de l'Université de Heidelberg, une partie seulement des 3042 pages numérisées permet la recherche en mode texte, la qualité des documents ne permettant de toutes façons pas une reconnaissance fiable des caractères, surtout des noms propres.

 

521 listes de noms de prisonniers répartis par camp seront publiées irrégulièrement à partir du 2 avril 1915 ; la dernière -évoquant une suivante- le sera le 25/10/1918. Chacune donne une estimation du nombre de noms qu'elle contient (de 100 à 6700), dénombrement probablement évalué "à la colonne" mais dont le total (réel ?) est signalé fréquemment.

L'en tête de la dernière liste est ainsi rédigée :

Le total des noms publiés jusqu'aujourd'hui se monte à environ 406.450
Le total des prisonniers français se trouvant en captivité en Allemagne jusqu'au 10 juillet 1918 se monte à environ 475.000, dont environ 40.000 ont été échangés.
    J'ai traité sur ce même blog des Listes de Soldats Français Inhumés derrière le Front Allemand qui paraîtront à partir du 24 mai 1916.

    Un premier relevé a été effectué ici par Jérôme du Forum "Pages 1418", qui a permis de connaître les camps apparaissant dans chacune des 521 listes : à la relecture on relève 204 lieux de détention pour 1758 citations de camps. Si les informations provenaient de l'occupant, elles étaient rédigées en France, pour que le journal ne souffre pas de ces fautes de français (surtout de construction des phrases) qui faisait sourire les lecteurs des affiches placardées quasi quotidiennement (voir Les Affiches sur ce blog) ; de ce fait les noms de lieu peuvent inversement souffrir de coquilles que n'aurait pas faites un parfait germanophone.

Un exemple : deux versions de ce qui pourrait bien être un même camp apparaissant dans les listes 11 et 20 :

  Altdamm A   Altdamm B  

    Or ce que l'on connaît actuellement des camps n'en signale qu'un seul à ce nom noté ALTDAMM ou -aux Bayerisches Hauptstaatsarchiv- "Gefangenen-Lager Alt-Damm bei Stettin". S'il s'agit du même, la ville est maintenant Dąbie en Pologne, 150km à l'est de Szczecin, ce qui nous éloigne (beaucoup) de la mention Bayern notamment.

 

      Il faudrait pour s'en convaincre étudier -via le site de la Croix-Rouge- les prisonniers cités : un premier essai a permis de trouver 4 fiches dont deux seulement mentionnent un camp pour ce prisonnier interné en Suisse le 1/12/1916 venant de Cottbus, mais qui avait séjourné à Döberitz venant de Halle (il avait été blessé et capturé le 20/09/1914 près de Vic sur Aisne -à Autrèches précise le registre du CICR- et fut rapatrié, probablement pour être soigné, le 27/02/1918)

Buckenmeyer Aloys
Aloys BUCKENMEYER de Belfort, soldat au 35e RI

    

     Une carte des camps est parue dans la Gazette le 4/06/1915, à cette page ; si elle n'est pas fausse elle est difficilement lisible, on imagine les proches l'examinant à la loupe pour situer un prisonnier. On pourra s'aider de celle-ci, plus lisible,

carte gallica
parue dans Gallica.

 

    Voici d'abord les dates de parutions de ces listes, puis pour chaque camp les listes où il apparaît. A chaque fois, un lien dirige vers la page correspondante de la Gazette :

  • Lien direct pour les listes par numéro ,

  • Liens vers chaque camp... Pour certains, la liste s'étend parfois sur 2 à 3 pages, le lien pointe toujours sur la première.


Merci de me signaler toute erreur ou omission, hors coquille d'origine.

         Viendront ensuite les listes de :

  • Prisonniers blessés évacués en Suisse (avec mention des blessures),
  • Soldats français décédés derrière la ligne de front,
  • Ceux décédés en Allemagne, (dans les hôpitaux des camps)
  • Personnes décédées en territoire occupé,
  • Victimes civiles résultant de bombardements (artillerie ou aviation) et qualifiées de "victimes de leurs compatriotes",
  • La transcription de "Nécrologies Françaises" (tirées de journaux parisiens),
  • Prisonniers Français faits par les Bulgares,
  • ou spéciales, comme celles donnant
    • des nouvelles de PG Ardennais au camp de Friedrichsfeld,
    • la liste des victimes de la catastrophe des 18-Ponts à Lille le 11/01/1916,
    • les morts de Gallipoli,
    • les noms des évacués vers les Ardennes.

     Comme on le constate, aucune n'est particulièrement réjouissante, le manque d'information (en temps réel) depuis la zone libre vers les territoires occupés accentue le sentiment d'abandon, favorisant ainsi le recours à la propagande allemande.

     A noter qu'une "copie" française de la Gazette des Ardennes Illustrée portant le n°12 et datée du 1er mars 1916 sera lancée par avion, mais je n'en connais pas le contenu ; elle différait de l'officielle par la présentation qui venait juste de changer avec le n°11.

GDAI 10

GDAI 11

La première page du "vrai" n°12 étant celle-ci :

GDAI 12
source : bm-lille

    Il y aura également une copie de la Gazette ordinaire portant le n°154 du 12 mars 1916, peut-être suivie d'autres, c'est du moins ce que dit la Gazette officielle ........

 

La liste n°125  (par ex.) du 17 mars 1916 commence ainsi :

     Les sentiments humanitaires dont s'inspire la publication, dans la "Gazette des Ardennes", des noms des 815.000 prisonniers français actuellement internés en Allemagne, n'ont pas été appréciés par tous avec la même équité. Que nous importe ! Nos lecteurs ne pensent pas de même qu'on le fait dans certaines rédactions sur les boulevards parisiens. Nous ne laisserons pas troubler l'intime contentement que nous éprouvons d'avoir pu contribuer à calmer les inquiétudes de milliers de familles françaises, portant un rayon de joie dans les foyers laissés dans la plus douloureuse incertitude par le gouvernement français, en leur annonçant la bonne nouvelle que leur fils était sain et sauf, se retrouvant en captivité allemande aussi heureux que le permettent les circonstances.

        La présentation déroulante ci-dessous ne permettant pas le référencement des noms de camps, la liste complète de ceux-ci est répétée plus bas. 

 

La dernière Gazette


 

Liste n°     
 Date de parution   Nombre
de noms

 

 

 
Camp 
 Listes N°       

 


 

Liste des camps cités dans la gazette des Ardennes (voir ci-dessus).

 

Aachen Guetersloh I/Westf. Nürnberg
Altdamm I/Bayern Hagen I/Westf. Offenbach A/Main
Altdamm I/Brdbrg. Halbe (Brandenburg) Offenburg I/Baden
Altengrabow I/Brdbrg. Halberstadt Ohrdruf I/Th.
Amberg I/Bayern Halle A/Saale Osnabrueck
Andernach Hamburg Paderborn
Augsburg Hameln A/Weser Parchim I/Mecklenburg
Bad-Orb Hammelburg I/Bayern Passau
Bautzen I/Schl. Hanau Pforzheim
Bayreuth Hannover Pirmasens
Benediktbeuern I/Bayern Hannoversch-Muenden Plassenburg (Post Kulmbach)
Berger-Damm Heidelberg Plassenburg B/Kulmbach I/Bayern
Berlin Heidelberg (Officiers) Preussisch Holland
Bernaud /OBB Heilbronn Puccheim I/Bayern
Bernburg /Anhalt Heilsberg Quedlinburg
Bielefeld I/West Heuberg B/Konstanz Rastatt
Bischofswerda I/S. Hofgeismar Regensburg
Bischofswerda I/S. (Officiers) Hohenasperg I/Wtmrg Reisen I/Posen
Brandenburg an der Havel Homburg (Pfalz) Rosenberg-Kronach I/Bayern
Burg B/Magdeburg (officiers) Ingolstadt Rostock
Burg bei Magdeburg Iserlohn I/Westf. Saarbruecken
Cassel-Niederzwehren Kaiserslautern Saarburg I/Lothr.
Celle I/H. Karlsruhe Saarlouis
Chemnitz Karlsruhe (Annexe) Saint-Ingbert (Pfalz)
Clausthal I/Harz Kempten Salzwedel
Coblenz Koenigsbrueck I/S. Sangerhausen
Colmar I/E. Koenigstein Scheuen/Celle (Hann.)
Cöln A/Rh. Konstanz Schleissheim I/Bayern
Cottbus I/Brandenbrg. Lagensalza I/Th. Schwäbisch Gmuend
Crefeld Landau (Pfalz) Senne I/Westf.
Crefeld (officiers) Landsberg A/Lech Sennelager I/Westf.
Crossen A/Oder Landshut I/Bayern Siegen I/Westf.
Cuestrin Langensalza Skalmierschuetz
Darmstadt Laufen (Oberbayern) Soltau (Hannover)
Diedenhofen Lechfeld Speyer
Dillingen I/Bayern Limburg A/Lahn St.-Avold
Doeberitz Lindau A/Bod. Stargard I/Pomm.
Duelmen Lippspringe Stendal
Duesseldorf Lippstadt Stettin
Duisburg Ludwigsburg-Eglosheim Stralsund
Duss I/Lothringen Ludwigshafen A/Rh. Strasburg I/Elsass
Dyrotz Luebeck Stuttgart
Ebenberg-Landau I/Bayern Luswigsburg I/Wbg. Tauberbischofsheim
Edewecht (Oldenburg) Magdeburg Torgau
Eichstaett I/Bayern Magdeburg (officiers) Trier
Erfurt Mainingen Tuchel
Erlangen Mainz Tuebingen
Festung Koenigstein Mainz (Officiers) Ulm
Festung Torgau (officiers) Mannheim Verden (Hannover)
Festung Wesel Mergentheim Verden A.D.Aller
Forbach I/L Merseburg Villingen I/Baden
Frankfurt A/M. Meschede I/Westf. Wahmbeck
Frankfurt A/O Metz Wahn/Rheinland
Freiburg I/Breisgau Metz (St Clemens) Weilburg A.D. Lahn
Freising Minden I/Westf. Weingarten I/Wurttbg.
Friedberg (Hessen) Muelhausen I/E Werl I/Westf.
Friedrichsfeld B/Wesel Muelheim A.D. Ruhr Wesel
Fuerstenfeldbruck I/Bayern Muenchen I/B. Wetzlar
Galgenberg/Wuerzburg Muenden (Hannover) Wetzlar (Annexe)
Gardelegen I/Brdbrg. Muensingen I/Wuertbrg. Wiesa (Erzgerb.)
Germersheim I/Bayern Muenster I/Westf. Wittenberg
Giessen Mülhausen I/E. Worms
Goettingen Munster Wuelzburg B/Weissenburg I/B.
Golzern A/Mulde Münster Wuerzburg
Grafenwoehr I/Bayern Munster-Hannover Zerbst (Anhalt)
Grosskarolinenfeld Neuburg A/D Zossen
Guben Neunkirchen (Saar) Zweibruecken I/Bayern
Guestrow I/M. Niederzwehren B/Cassel Zwickau I/Sachsen

 


Listes de blessés rapatriés.

 

     Le 4 juin 1915, le n°56 de la Gazette publie une première liste de soldats blessés rapatriés. Il s'agit en même temps de montrer que l'occupant est beaucoup moins inhumain qu'on ne le dit. Ce sont de grands blessés, rapatriés par voie d'échange, et, selon la Gazette, déjà rentrés en France -via la Suisse- au moment où les listes sont publiées.


Voir ci-dessous l'en-tête de la première liste, puis de la 5e, qui font aussi œuvre de propagande.

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57 listes seront publiées tout au long de la guerre (en fonction des échanges ?). Comme toujours, la qualité de la typographie interdit toute reconnaissance optique de caractères, et tout dénombrement (sans certitude aucune de l'exhaustivité de ces listes). Près de 10.000 soldats sont ainsi nommés.

    Un point intéressant est que le type de blessure est signalé, (sauf vers la fin), ce qui constitue un renseignement de plus pour les chercheurs.

 

      Date de parution

 Liste 

 

Les autres listes se trouvent ICI

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