Témoignage familial
Auguste DUBOIS, le frère aîné de mon père avait rédigé ses souvenirs pour le cinquantenaire de l'Armistice, c'est à partir de ce document plus précis que la simple mémoire orale que je suis parti à la recherche de cet extrait de film que j'ai déniché - déjà grâce à internet- il y a 20 ans à l'Imperial War Museums, auprès duquel j'avais pu obtenir une précieuse cassette vidéo.
Quand Jean, mon père, parlait de cette journée, il signalait un mort sur la place du faubourg en face de la Pharmacie Hedot au 36 rue du Faubourg de Paris, un autre cour Leroy, un chez Mme Armbruster, et plusieurs autres à l'écluse Notre-Dame et dans les rues. Après guerre la famille -qui venait d'Haulchin- dont la maison était inhabitable logeait au 23 avenue de Lorraine.
Les détails fournis par les souvenirs de l'ainé cadrent bien avec les très courtes séquences qui composent ce film passé dans les années 1920 "aux actualités" à Valenciennes : une chance inouïe qu'elle ait pu être vue par les intéressés qui ne devaient pas aller souvent au cinéma.
Ne voulant pas couper le récit, j'ai ajouté des renvois numérotés vers un certain nombre d'explications, commentaires ou illustrations, voire à d'autres pages de ce blog.
Nous avons vécu les dernières semaines de la guerre, mes parents mes trois frères et moi-même, dans la cave de notre maison du faubourg de Paris qui se trouvait sur le tracé de la rue établie depuis, quand disparut l’ancien passage à niveau et que fut construit le pont sur la voie ferrée. 1 Nous n’avions pu être évacués en raison de la grippe espagnole dont nous étions presque tous atteints. Notre maison avait déjà reçu six obus quand un septième nous sortit littéralement de notre retraite. Par bonheur des poutres entrecroisées avaient soutenu les gravats et nous pûmes quitter notre trou. Devant le presbytère des barbelés avaient été posés. Tout le quartier avait été recouvert par les eaux lors de l’inondation déclenchée par les occupants, mais le niveau devait heureusement baisser, sans quoi nous n’aurions pu rester dans nos abris. Un jour où j’étais allé chercher du ravitaillement rue de la Vieille Poissonnerie où les services étaient réfugiés, M. Gabet me dit « Vous n’allez pas rester là ». Nous restâmes cependant. Auguste DUBOIS (1903-1971) |
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Plans superposés montrant en rouge le "Chemin des planches" traversant la voie par un passage à niveau près de la halte (voir photos ci dessous), et en clair l'actuel tracé par le pont à hauteur de la gare du Faubourg de Paris, maintenant désaffectée. Du chemin des planches, coupé en deux par la voie ferrée au niveau de la Halte, il ne reste que la partie coté boulevard, appelée maintenant "Rue du Chemin des planches" ; l'autre tronçon, qui rejoignait la rue du Faubourg de Paris s'appelle maintenant rue Henri Caffiaux.
Je n'ai pas l'adresse de la maison détruite, les DUBOIS ne figurent pas -encore- au recensement de Valenciennes en 1911, mais on peut l'imaginer à l'entrée de la rue du Faubourg de Paris en allant vers l'église que l'on aperçoit en arrière-plan de la seconde photo.
Maisons de la rue du Faubourg de Paris.
Etant donné l'orientation de l'église, ces maisons sont probablement
celles vouées à la destruction pour la construction de la nouvelle rue.
Dans ses notes mon père indique "la cave du café situé juste en face de l'église", peut-être l'actuel n°42.
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La rue Malplaquet sur la rive gauche de l'Escaut
On aperçoit au fond la Brasserie-Malterie Dupont, 16 faubourg de Cambrai, (un petit km à vol d'oiseau) inscrite à l'Inventaire général du patrimoine culturel, dont les tours subsistent encore aujourd'hui.
Au premier plan aurait du figurer la brasserie Carlier, sise 27, rue Malplaquet, inscrite également à l'Inventaire général du patrimoine culturel, rasée, reconstruite, puis laissée à l'abandon, dont les derniers bâtiments seront transformés en résidence au début des années 2010 :
Chapelle Notre-Dame des affligés
Sur un lieu connu pour sa dévotion depuis le 16e siècle, une chapelle avait été construite en 1829 ; située à l'entrée du cimetière St Jean (ouvert en 1855), rasée en 1918, remplacée par une chapelle provisoire en bois, puis reconstruite quasiment à l'identique en 1928.
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A la guerre suivante, mes parents avaient fait de même, la cave de la maison rue Charles-Quint communiquait avec les deux maisons voisines, je me souviens encore de ces étroites ouvertures faites ( puis rebouchées) dans les murs.
Il s'agit des soldats Canadiens du 38e bataillon qui, venant par l'Avenue Desandrouin et l'Avenue Faidherbe avaient passé le canal de l'Escaut à l'écluse Notre-Dame, s'étaient emparé du Moulin Gilliard et descendaient par la rue du Faubourg de Paris.
Lire cette page qui renvoie à mon blog traitant spécifiquement des Canadiens.
La pharmacie Hédot était située au 36 de la rue du Faubourg de Paris : à gauche avec des volets sombres sur cette photo extraite du film tourné le 2 novembre 1918 dont il est question plus loin, devant les soldats alliés, le cadavre d'un soldat allemand.
et à droite sur cette carte postale :
La séquence dont il est question est visible maintenant (grâce aux progrès de l'internet et des mises en ligne) à deux endroits distincts :
- Sur le site de l'Imperial War Museums britannique, à 6'55 du début : la séquence complète sur Valenciennes, précédée par des vues la Croix d'Anzin commence à 4'48.
- Sur le site allemand portal.de à du 8'07 début : la séquence complète sur Valenciennes débutant à 6'29, dans une meilleure qualité d'image et de cadrage. Il s'agit de la même séquence, assemblée avec d'autres décrites sur la page de chaque vidéo.
J'ai pu en extraire des images,
- Une photo très nette montrant au premier plan avec une casquette Jean DUBOIS, né en 1906 et derrière le groupe à droite Auguste DUBOIS, né en 1903, le narrateur :
- Pour plus de facilité, j'ai monté en boucle les rares secondes de cette séquence ICI ; dans ses notes mon père indique que les cadavres allemands sont restés jusqu'au 4 ou 5 novembre, sans en être gênés. En tous cas ce cadavre se retrouve sur d'autres photographies, dont celle-ci, où il avait encore son casque :
- Un plan de la rue du Faubourg de Paris monté en panorama de la pharmacie Hédot (actuel n°36 rue du faubourg de Paris) à gauche jusqu'à l'église Notre-Dame du Sacré-Coeur :
Le même panorama de nos jours : l'église achevée en 1879 reconstruite après la guerre n'a pas résité aux années, sa construction sur pieux en bois a été fragilisée par la baisse du niveau de la nappe aquifère lors des modications des tracés des canaux et l'église a été détruite par sécurité en 1980.
- L'église Notre-Dame du Sacré-Coeur avant la guerre (reconstruite à l'identique) et l'intérieur après les bombardements :
A droite le presbytère (photo avant guerre)
Lire sur ce blog la Fête de la délivrance ou Victory parade, réalisée le 7 Novembre par les Troupes Britanniques et Canadiennes.
Lire sur ce blog la Visite du Président Poincaré le 10 Novembre 1918, veille de l'Armistice.
Commission for Relief in Belgium
La Commission for Relief in Belgium (CRB) est une organisation internationale créée par Herbert Hoover, qui deviendra plus tard président des États-Unis. Elle était chargée du ravitaillement en Belgique et dans le nord de la France sous l’occupation allemande durant la guerre 1914-1918.
Dès 1915 les populations envahies, où les réfugiés affluent, privées de toute ressource recevront blé, charbon, vêtements, médicaments, semences, par le biais de magasins communaux. Les prisonniers civils, otages, déportés ne seront pas oubliés.
Voir sur le site de la Belgian American Educational Foundation
Initialement Comité Hispano Américain fondé par le même H. Hoover que le CRB, le Comité hispano-néerlandais pour la protection du ravitaillement en Belgique et dans le Nord de la France, sous le haut patronage de LL. EE. MM. les Ministres d'Espagne et des Pays-Bas, était dirigé par un Espagnol : Pedro Saura et un Néerlandais G. Vandenbergh, dont les délégués surveillaient la distribution dans les régions d'Etape lorsque la CRB sera réorganisée pour maintenir sa neutralité quand les Etats-Unis entrent en guerre en 1917.
Petit clin d'oeil de l'Histoire pour des régions qui avaient été longtemps province des Pays-Bas espagnols.......
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Outre les pages citées ci-dessus, on pourra trouver de nombreuses vues de Valenciennes "à la libération" dans ce même blog